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370. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre II. Des éloges religieux, ou des hymnes. »

Plein du sentiment religieux qui s’élève dans son cœur, il mêle sa voix à celle de la nature ; et du sommet d’une montagne, ou dans un vallon écarté, au bruit des fleuves et des torrents qui roulent à ses pieds, il chante une hymne en l’honneur de la divinité dont il éprouve la présence, et qui le fait exister et sentir. […] Ainsi, nous voyons par l’histoire que c’est surtout dans le temps des épidémies et des guerres, lorsque de grandes batailles étaient perdues, lorsque la peste faisait périr les citoyens par milliers, lorsque le peuple croyait voir pendant la nuit un spectre pâle et terrible répandre la désolation sur ses murs ; c’était alors que les prêtres dans les temples et aux pieds des autels, entourés d’un peuple nombreux, élevant tous ensemble leurs mains vers le ciel, composaient et chantaient de nouvelles hymnes.

371. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

Gladstone et les partisans des religions d’État avec une ardeur d’éloquence, une abondance de preuves, une force de raisonnement incomparables ; il démontre jusqu’à l’évidence que l’État n’est qu’une association laïque, que son but est tout temporel, que son seul objet est de protéger la vie, la liberté et la propriété des citoyens ; qu’en lui confiant la défense des intérêts spirituels, on renverse l’ordre des choses, et que lui attribuer une croyance religieuse, c’est ressembler à un homme qui, non content de marcher avec ses pieds, confierait encore à ses pieds le soin d’entendre et de voir. […] Le roi rampa devant son rival pour obtenir les moyens de fouler aux pieds son peuple, descendit jusqu’à être un vice-roi de France, et empocha, avec une infamie complaisante, ses insultes dégradantes et son or plus dégradant encore. […] Ces beaux et solides esprits forment une famille naturelle, et les uns comme les autres ont pour trait principal l’habitude et le talent de passer des idées particulières aux idées générales, avec ordre et avec suite, comme on monte un escalier en posant le pied tour à tour sur chaque degré. […] Pendant plusieurs siècles, il a été foulé aux pieds par des hommes de race plus hardie et plus entreprenante. […] Les marques de son ravage sont toujours autour de nous ; les cendres sont encore chaudes sous nos pieds.

372. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

Le terrain fut disputé pied à pied, enfin Ysabeau dut se résoudre à quitter la ville, la Convention l’ordonnait ; mais il fit avec lenteur ses préparatifs de départ. […] que ma mère fut belle, quand nous entrâmes dans l’église, qu’elle tomba à genoux aux pieds de l’Homme-Dieu ! […] Longtemps, longtemps, je couvris de baisers les pieds rouges de sang de notre bon Seigneur. […] — Je fais un lit sans pieds, le dernier que nous ayons ? […] Nous laisserons les morts en paix, qu’ils aient été colosses aux pieds d’argile ou colosses aux pieds d’airain.

373. (1898) La poésie lyrique en France au XIXe siècle

Ainsi, dans La Chasse du Burgrave, Victor Hugo s’amuse à faire des séries de vers où un vers d’un pied alterne avec un vers de huit pieds. […] à ce qu’il se jette, respectueux et timide, aux pieds de la jeune fille et lui demande de lui faire la grâce de devenir sa femme. […] Cette larme fut recueillie par les séraphins dans une urne d’albâtre et portée jusqu’au pied du trône de Dieu le Père. […] Caïn, ne dormant pas, songeait aux pieds des monts. […] Ils sont imprimés généralement sur du papier de chandelle ; et les vers, au lieu d’y avoir une mesure régulière, les vers ont tantôt treize pieds, — c’est le minimum, — tantôt seize ou dix-sept pieds ; d’autres fois, on essaie de les scander, mais on n’y arrive pas : il n’y a aucun rythme, aucune mesure appréciable.

374. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre II. Le Roman (suite). Thackeray. »

Assise au pied du lit, elle garde à vue la malade, la comble de potions, la réjouit de sermons terribles, et monte la garde à la porte contre l’invasion de l’héritier probable. […] Pour se représenter exactement cette altération de la vérité et de l’art, il faut comparer pied à pied deux caractères. […] Sir Pitt, père de Rawdon, se jette à ses pieds, muni de cent mille livres de rentes, et s’offre pour mari. […] Thackeray se joue d’elle, comme un enfant d’un hanneton, la laissant grimper péniblement au haut de l’échelle pour la tirer par le pied et la faire honteusement choir. […] Je le mets à vos pieds et je marche dessus ; je tire cette épée, et je la brise, et je vous renie.

375. (1864) Cours familier de littérature. XVII « Ce entretien. Benvenuto Cellini (2e partie) » pp. 233-311

Il avait pris pour type de son héros mythologique l’instant où Persée élève dans sa main la tête de Méduse qu’il vient de couper, et où il foule du pied droit le tronc sanglant qui palpite encore. […] Si Votre Excellence avait quelque connaissance de l’art, elle ne craindrait rien pour cette tête, mais pour le pied droit du Persée, qui est si éloigné de l’autre, et vers lequel la matière aura plus de peine à parvenir. […] Je jurais après tous ceux qui s’approchaient de moi, je les frappais des pieds et des mains, et je me désolais en disant : J’éprouve quelque trahison, mais je la découvrirai ; et, avant de mourir, je saurai m’en venger. […] Mais ce qui étonna davantage le duc, ce fut de voir accomplie la prédiction sur le pied de la statue. […] J’allai ensuite baiser les pieds du pape, dont j’espérais obtenir quelque travail ; mais il avait été prévenu par notre ambassadeur.

376. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DE LA MÉDÉE D’APOLLONIUS. » pp. 359-406

. — Apollon a repoussé du pied l’Envie, et a répondu : Vois le fleuve d’Assyrie, son cours est immense, mais il entraîne la terre mêlée à son onde et la fange. […] C’est alors que le roi, dissimulant un peu sa colère et imaginant un détour dont il se croit assuré, lui propose de lui céder la toison d’or à condition de l’épreuve suivante : Dans un champ consacré à Mars, il a deux taureaux aux pieds d’airain, et dont les naseaux vomissent la flamme ; si Jason parvient à les dompter, à les soumettre au joug, puis à labourer le champ de Mars, et, l’ayant ensemencé des dents d’un dragon, à moissonner la terrible moisson de géants armés qui en doivent naître, il aura la toison divine, mais pas autrement. — Jason, effrayé au fond, hésite ; il finit par s’engager pourtant, faute de pouvoir reculer, et sans savoir comment il sortira d’une telle lutte. […] Ses pieds la portaient au hasard çà et là. […] Ainsi parée, et tandis qu’on apprêtait le char, « la jeune fille, est-il dit, tournant çà et là dans le palais, foulait le sol dans l’oubli des maux qui s’ouvrent déjà sous ses pieds en abîmes, et de tous ceux qui vont s’amonceler dans l’avenir. » — Après un détail approfondi de l’herbe magique qu’elle prend pour donner à Jason, et des circonstances où elle l’a autrefois cueillie, le poëte, continuant de s’inspirer d’Homère, poursuit par des comparaisons enchanteresses que Virgile a ensuite imitées de tous deux : « Elle mit, dit-il, l’herbe magique à la ceinture odorante qui serrait son beau sein, et, sortant à la porte, elle monta sur le char rapide. […] Le cœur lui tomba de la poitrine, ses yeux se troublèrent d’un brouillard, une chaude rougeur saisit ses joues ; elle n’avait la force de lever les genoux pour faire un pas en avant ni en arrière, mais ses pieds restaient fichés sur place.

377. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (2e partie) » pp. 177-248

Partout, en tout temps, en tout pays, dans l’antiquité comme dans les temps modernes, dans les pays civilisés comme dans les pays sauvages, on le trouve au pied des autels, les uns vénérables, les autres ignobles ou sanguinaires. […] Dès lors, que peut-on souhaiter de mieux à une société civilisée qu’une religion nationale, fondée sur les vrais sentiments du cœur humain, conforme aux règles d’une morale pure, consacrée par le temps, et qui, sans intolérance et sans persécution, réunisse, sinon l’universalité, au moins la grande majorité des citoyens, au pied d’un autel antique et respecté ? […] Cette croyance pure, morale, antique, existait ; c’était la vieille religion du Christ, ouvrage de Dieu suivant les uns, ouvrage des hommes suivant les autres, mais, suivant tous, œuvre profonde d’un réformateur sublime ; réformateur commenté pendant dix-huit siècles par les conciles, vastes assemblées des esprits éminents de chaque époque, occupées à discuter, sous le titre d’hérésies, tous les systèmes de philosophie, adoptant successivement sur chacun des grands problèmes de la destinée de l’homme les opinions les plus plausibles, les plus sociales, les adoptant, pour ainsi dire, à la majorité du genre humain ; arrivant enfin à produire ce corps de doctrine invariable, souvent attaqué, toujours triomphant, qu’on appelle unité catholique, et au pied duquel sont venus se soumettre les plus beaux génies ! […] Ce double motif de rétablir l’ordre dans l’État et la famille, et de satisfaire au besoin moral des âmes, lui avait inspiré la ferme résolution de remettre la religion catholique sur son ancien pied, sauf les attributions politiques, qu’il regardait comme incompatibles avec l’état présent de la société française. […] Le fils du prince de Condé, le duc d’Enghien, jeune prince de grande race militaire et de haute espérance, se trouve à sa portée, quoique sur un territoire étranger et inviolable ; il le fait arrêter, conduire à Paris, juger par une commission, fusiller dans le fossé de Vincennes, les pieds sur sa tombe.

378. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

Lorsque j’arrivai au pied de la colline, je ne puis exprimer les sentiments dont mon cœur fut agité à l’idée de revoir mon bienfaiteur et mon souverain, qui avait eu tant de bontés pour moi, et en pensant au misérable état dans lequel se trouvait réduit ce Pie VI que j’avais vu au comble des splendeurs. […] Je me précipitai à ses pieds ; je les baignai de larmes ; je lui racontai tout ce qu’il m’en coûtait pour le revoir, et combien je souhaitais de rester à ses côtés pour le servir, l’assister et partager son sort. […] « Tout ce que je pus faire en cachette, et non sans courir certains risques, fut de me rendre une seconde fois à la Chartreuse pour communiquer au Pape mes vaines tentatives, pour lui baiser encore les pieds et recevoir sa dernière bénédiction. […] Ces réflexions, dit-il, l’avaient déterminé à passer à pieds joints sur les difficultés extrinsèques compensées bien certainement par les mérites personnels du sujet. […] On ouvrit alors le conclave, et le peuple se vit admis au baisement des pieds.

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