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1281. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

Alors commençait entre ces trois hommes, d’âge, d’esprit et de condition si divers, un entretien d’abord familier comme le voisinage et nonchalant comme le loisir sans but ; mais bientôt après l’entretien sortait des banalités de la simple conversation ; il s’élevait par degrés jusqu’à la solennité d’une conférence sur les plus graves sujets de la philosophie, de la politique et de la littérature. […] Philosophie, religion, législation, histoire, poésie, roman, journal même, tout passait et repassait tour à tour ou tout à la fois par les controverses de cette académie en plein air. […] L’histoire elle-même me semblait mesquine et triviale quand elle ne racontait pas les événements humains avec l’accent surhumain de la philosophie, de la tragédie ou de la religion.

1282. (1856) Cours familier de littérature. I « VIe entretien. Suite du poème et du drame de Sacountala » pp. 401-474

Nous trouvons ces règles du drame indien profondément analysées dans une étude de M. le baron d’Eckstein, qui a mêlé un des premiers la philosophie à la traduction. […] VII Quant au style dans lequel ces drames sont écrits, il égale et surpasse même en images, en pureté, en harmonie, tout ce que nous admirons dans les anciens et dans les modernes ; et si le mécanisme, la propriété de termes, la transparence de métaphores, l’harmonie de sons, la richesse de nuances, la pureté élégante de diction, sont les preuves sensibles de la perfection de mœurs, de civilisation et de philosophie chez un peuple, le style des poèmes et des drames de l’Inde atteste évidemment une littérature primitive idéale, ou une littérature parvenue à une perfection idéale aussi par la collaboration de siècles sans nombre ; car les langues se forment presque aussi lentement que le granit. […] Telles étaient les représentations scéniques de l’Inde primitive, pendant que le reste de l’Asie, à l’exception de la Chine, l’Afrique, l’Europe, la Grèce, Rome et les Gaules balbutiaient encore la langue de la philosophie, de la poésie et des arts ; quoi qu’en ait dit Voltaire, le jour moral s’est levé en Orient comme le jour céleste.

1283. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Il n’est pas rare qu’un personnage comique blâme une certaine conduite en termes généraux et en donne aussitôt l’exemple : témoin le maître de philosophie de M.  […] Je ne parle pas de ce détachement voulu, raisonné, systématique, qui est œuvre de réflexion et de philosophie. […] Plusieurs philosophies du rire gravitent autour d’une idée analogue.

1284. (1901) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Deuxième série

Ils ne sont une contribution ni à la philosophie, ni à l’histoire, ni à la statistique, ni à la science sociale, ni même à la morale ou à la critique littéraire, ni à rien qui s’enseigne et qui s’apprenne. […] Il faut les goûter jusqu’au fond de la coupe, et vraiment on peut même, avec un grain de philosophie, finir par trouver je ne sais quelle saveur dans l’amertume du breuvage. […] De Littré, savant modeste et scrupuleux, simple vulgarisateur, en philosophie, d’une partie de la pensée d’Auguste Comte, on fit une espèce de « libertin » malgré lui et d’épouvantail de l’Église. […] Tout ce qui est art pur dans l’ordre littéraire n’existe que par lui ; et tout ce qui n’est pas strict objet de science ou simple matière d’information, l’esthétique, la critique, les considérations littéraires et morales, la philosophie de l’honnête homme, a besoin de son secours. […] Toute œuvre d’art ou de philosophie est un rêve bien fait.

1285. (1774) Correspondance générale

Ce qui est hors de là est préjugé, fausse philosophie. […] Faites-nous souvent de ces ouvrages-là, pour l’honneur de la philosophie, le vôtre et votre santé. […] Les ennemis de la philosophie sont faits pour recevoir coup sur coup toutes ces sortes de désagréments : l’année est mauvaise pour eux. […] Un noble enthousiasme me gagne ; mes doigts se portent d’eux-mêmes sur une vieille lyre dont la philosophie avait coupé les cordes. […] Parlez-lui littérature, philosophie, honneur, vertu, et quand elle vous aura écouté, elle sera bien dédommagée de ce que j’aurais pu lui dire.

1286. (1896) Les Jeunes, études et portraits

Une littérature s’inspire toujours d’une philosophie, quelle qu’elle soit. […] La philosophie de M.  […] Telle est la « morale d’espèce » qu’essaie de créer la philosophie contemporaine. […] Il sert à expliquer la philosophie, la peinture, la religion, la musique et la littérature. » Et voici les médecins de villes d’eaux. […] Mais le drame a plus de portée, parce qu’il est la traduction sous forme scénique d’une idée de philosophie.

1287. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « M. Denne-Baron. » pp. 380-388

Dans sa philosophie désintéressée et qui promenait volontiers son regard sur l’immensité des choses, il croyait peu à la gloire, à ce miroir artificiel et magique qui concentre sur un point quelques rayons.

1288. (1874) Premiers lundis. Tome II « Doctrine de Saint-Simon »

On y verra clairement jusqu’où peut aller, en aperçus ingénieux de l’avenir, la philosophie sans la foi, la sagesse sans la religion ; on se demandera quel bonheur il revient au genre humain d’une idée isolée, trouvée une fois lancée dans le monde pour le plus grand plaisir de quelques penseurs, et à laquelle toute une vie d’amour et de dévouement n’a pas été consacrée ; on admirera Lessing ; on saluera en passant, avec bienveillance et respect, la statue de marbre du sage, mais on se jettera en larmes dans les bras de Saint-Simon ; on se hâtera vers l’enceinte infinie où l’humanité nous convie par sa bouche, et où l’on conviera en lui l’humanité ; on courra aux pieds de l’autel aimant et vivant, dont il a posé, et dont il est lui-même la première pierre4.

1289. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VIII. Du crime. »

Un homme véritablement criminel, ne peut donc point être ramené ; il possède encore moins de moyens en lui-même, pour recourir aux leçons de la philosophie et de la vertu ; l’ascendant de l’ordre et du beau moral perd tout son effet sur une imagination dépravée ; au milieu des égarements, qui n’ont pas atteint cet excès, il reste toujours une portion de soi qui peut servir à rappeler la raison : on a senti dans tous les moments une arrière-pensée, qu’on est sûr de retrouver quand on le voudra, mais le criminel s’est élancé tout entier ; s’il a du remord, ce n’est pas de celui qui retient, mais de celui qui excite de plus en plus à des actions violentes ; c’est une sorte de crainte qui précipite les pas : et, d’ailleurs, tous les sentiments, toutes les sources d’émotion, tout ce qui peut enfin produire une révolution dans le fond du cœur de l’homme, n’existant plus, il doit suivre éternellement la même route.

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