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692. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

C’était Du Marsais, le philosophe grammairien, homme naïf, peu façonné au monde, franc et d’une inexorable justesse. […]  » Pressé sur ses raisons, il ne fit pas difficulté de les dire, et une longue amitié s’ensuivit, durant laquelle le philosophe modeste n’épargna pas d’utiles conseils, des conseils qui se rapportaient tous à la vérité, au naturel, à la propriété de l’expression. […] Celle-ci a laissé de Fontenelle un portrait charmant qui la peint pour le moins autant elle-même que le philosophe qu’elle savait si bien apprécier : Les personnes ignorées, écrit Mlle Le Couvreur, font trop peu d’honneur à celles dont elles parlent, pour oser mettre au grand jour ce que je pense de M. de Fontenelle ; mais je ne puis me refuser en secret le plaisir de le peindre ici tel qu’il me paraît.

693. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) «  Mémoires et correspondance de Mme d’Épinay .  » pp. 187-207

Voltaire disait d’elle encore au docteur Tronchin : Votre malade est vraiment philosophe ; elle a trouvé le grand secret de tirer de sa manière d’être le meilleur parti possible ; je voudrais être son disciple ; mais le pli est pris… Qu’y faire ? […] ma philosophe ! […] Rousseau, aux Confessions de ce philosophe.

694. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

Saint-Évremond, averti à temps, quitta la France, se réfugia en Hollande, puis en Angleterre, et vécut quarante-deux ans encore d’une vie de curieux et de philosophe, très goûté, très recherché dans la plus haute société, voyant ce qu’il y avait de mieux dans les pays étrangers, et supportant avec une fierté réelle et une nonchalance apparente sa disgrâce. […] Cinquante pistoles au lieu de cent, ce n’était pas le compte du philosophe exilé ; il trouva que c’était le traiter un peu trop en amant, c’est-à-dire avec une demi-infidélité, et pas assez en ami. […] Avant le terme convenu, elle s’exécuta sur le tout, se piquant d’être, en cela, plus exacte même que Marc-Aurèle, empereur et philosophe, mais qui ne payait point d’avance ses créanciers : Cela hausse un peu le courage, répondait-elle à Saint-Évremond ; et, quand vous y aurez bien pensé, vous verrez qu’il ne faut pas railler avec un banquier sans reproche… Je vous ai mandé que mes agréments étaient changés en qualités solides et sérieuses, et vous savez qu’il n’est pas permis de badiner avec un personnage.

695. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse esthétique »

La définition de l’œuvre d’art comprend au même titre le roman feuilleton et le roman d’analyse, les genres supérieurs et bas ; elle s’applique aussi bien à l’émotion d’un charretier écoulant une chanson de café-concert, qu’à celle d’un poète charmé par un lied de Schumann, d’un philosophe admirant les démonstrations de Malebranche, ou d’un ingénieur suivant le jeu d’une locomotive. […] [Le philosophe Jean-Marie Guyau (1854-1888), adversaire systématique de toutes les pensées de la transcendance, a tenté d’enraciner l’éthique et l’esthétique dans un immanentisme vitaliste. […] , p. 661-685), dans lequel le philosophe rapproche l’activité artistique de l’activité ludique, toutes deux caractérisées par des « mouvements sans objet » (p. 664).

696. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre VI. Le beau serviteur du vrai »

Homère était le géographe et l’historien de son temps, Moïse le législateur du sien, Juvénal le juge du sien, Dante le théologien du sien, Shakespeare le moraliste du sien, Voltaire le philosophe du sien. […] Les difformités publiques régnantes imposent à la conscience du penseur, philosophe ou poëte, des obligations austères. […] Il fait à chaque instant fonction de philosophe.

697. (1874) Premiers lundis. Tome I « Alexandre Duval de l’Académie Française : Charles II, ou le Labyrinthe de Woodstock »

C’est précisément parce qu’on n’écrit plus de pièces pour madame de Pompadour ou pour les jeunes filles de Saint-Cyr, mais pour des hommes d’État, des philosophes, des jeunes gens et un nombreux public, que nous réclamons la réforme et qu’elle ne peut manquer de s’accomplir. […] Cette œuvre du loisir et du recueillement, où viendront sans doute contraster et se confondre en mille effets charmants ou sublimes la vérité et l’idéal, la raison et la fantaisie, l’observation des hommes et le rêve du poète, arrivée dans le monde réel, exposée aux regards de tous, enchantera les âmes et ravira les suffrages ; les esprits les plus graves, philosophes, érudits, historiens, se délasseront à la contempler, car l’impression d’une belle œuvre n’est jamais une fatigue ; les politiques surtout, en n’y cherchant que du plaisir, y puiseront plus d’une émotion intime, plus d’une révélation lumineuse, qui, transportée ailleurs et transformée à leur insu, ne restera stérile ni pour l’intelligence de l’histoire, ni pour les mouvements de l’éloquence ; la tribune et la scène, en un mot, rivales et non pas ennemies, pourront retentir ensemble et quelquefois se répondre.

698. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Préface de la seconde édition » pp. 3-24

Le système de la perfectibilité de l’espèce humaine a été celui de tous les philosophes éclairés depuis cinquante ans ; ils l’ont soutenu sous toutes les formes de gouvernement possibles6. […] Je crois avoir essayé la première d’appliquer ce système à la littérature ; mais j’attache un grand prix à montrer combien de philosophes respectables ont, avant moi, soutenu victorieusement cette opinion, considérée d’une manière générale ; et je ne pense pas, comme un littérateur de nos jours, que ce soit la charmante pièce de vers de Voltaire, intitulée Le Mondain, qui ait donné l’idée de la perfectibilité de l’espèce humaine, et qui contienne l’extrait de tout ce qu’il y a de meilleur dans les longues théories sur cette perfectibilité.

699. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre III. Les dieux »

En même temps la science aide le dogme ; les forces naturelles disparaissent ; entre les mains des philosophes, les êtres perdent leur énergie efficace ; les dieux intérieurs qui vivent dans les choses sont anéantis ; toutes les puissances particulières se concentrent dans le Dieu unique. […] Pour le retirer de ce rôle administratif il fallait le transformer par l’abstraction et la métaphysique, comme le faisaient alors les philosophes, ou s’échapper du côté du mysticisme comme Hamon, Fénelon, et parfois Bossuet lui-même.

700. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre I. Vue générale du seizième siècle »

Quelques tentatives s’étaient produites pour élargir la pensée, ou renouveler la littérature : mystiques, hérétiques, philosophes et curieux de toute sorte avaient, avec plus ou moins de succès individuel, essayé de rompre le réseau du dogme. […] Ces sciences et la philologie se séparent de la littérature : celle-ci garde l’homme moral, et le grand traducteur du siècle, Amyot, offre Plutarque, non aux philosophes, ni aux grammairiens, mais à tous ceux qui veulent savoir ce que c’est que l’homme et que la vie.

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