Mais il est peu probable que cette espérance se réalise, malheureusement pour la paix, la liberté et le bien-être des peuples, heureusement pour les luttes morales et les conceptions de l’intelligence. […] Le peuple français, particulièrement, est doué en ceci d’une façon incurable. […] Aucun peuple n’est plus esclave des idées reçues, plus amoureux de la routine, plus scandalisé par tout ce qui frappe pour la première fois son entendement. […] Si cette affirmation incroyable est fondée, non seulement les réflexions qui précèdent sont fausses, mais encore, ce qui est plus grave, l’âme du peuple français contient en vérité peu de chose. […] La virtuosité du peuple français est et sera toujours une chimère éternelle, car, dans le monde de l’art, le peuple français est aveugle et sourd.
Il me reste une œuvre importante : La Tour des Peuples. […] Et dans la vie journalière même, la propriété de ce peuple n’était pas ce qu’elle est devenue depuis. […] Autour d’eux, un peuple de manouvriers taciturnes vaquait aux occupations requises. […] Le poème, c’est le battement du cœur d’un peuple. […] Il faut savoir que, là-bas, un artiste trouva la flamme qui devait entraîner un peuple vers la lumière et la vérité.
Mais c’est surtout aux détails de mœurs, à l’influence des lieux sur les habitudes et la littérature des peuples, que nous attachons du prix. […] Mais ici, autour de l’idée principale, venaient naturellement se grouper une foule de questions accessoires que l’auteur a négligées et que provoquait l’esprit de l’époque : jusqu’à quel point est légitime et approuvé par le goût cet emprunt d’images étrangères ; en quoi il peut réellement consister ; si c’est en bravant l’harmonie par une foule de mots barbares tirés d’idiomes encore grossiers, ou en reproduisant simplement une pensée naïve, une coutume touchante d’un jeune peuple, si c’est en s’emparant sans discernement des êtres créés dans des mythologies étrangères, ou en ne s’enrichissant que des allégories ingénieuses et faites pour plaire en tous lieux, que le poète imitateur méritera dignement de la littérature nationale ; ou encore, s’il n’y a pas l’abus à craindre dans ce recours trop fréquent à des descriptions de phénomènes ; si Delille, Castel, que l’auteur cite souvent, et les écrivains de cette école qu’il paraît affectionner, s’en sont toujours gardés ; si enfin il n’y a pas souvent cet autre danger non moins grave à éviter, de parler à la nation d’une nature qu’elle ne comprend pas, d’en appeler à des souvenirs qui n’existent que pour l’écrivain, et réduire l’homme médiocrement éclairé à consulter Buffon ou Cuvier pour entendre un vers. […] Les mœurs africaines, la traite et la révolte des esclaves, y sont peintes des plus vives couleurs, et l’on y puise une généreuse indignation contre un trafic hautement désavoué par la conscience des peuples.
La portion du peuple juif qui a résisté au règne spirituel du Messie, se rendra en voyant venir son règne temporel, et toutes les prophéties seront accomplies, car toutes les prophéties sont vraies. » La justification du mosaïsme ressort avec éclat des travaux d’Eugène. Il était providentiel, en quelque sorte, que ce fût un juif qui, le premier, du point de vue saint-simonien, réhabilitât à son rang dans la tradition cette société religieuse, la plus forte qui ait jamais existé, et donnât la clef de l’obstination mystérieuse du peuple dispersé qui sert de spectacle au monde. […] Le mosaïsme, moins développé en dogme que la religion chrétienne ; s’en tenant, avant tout, à l’unité de Dieu, qu’il importait de conserver entière et pure au sien du polythéisme ; renonçant à lier et à associer l’humanité encore rebelle et trop peu assimilable ; le mosaïsme, même avec ses restrictions, ses ignorances et ses grossièretés, cimentait plus fortement qu’aucune autre religion n’eût fait, et coordonnait en société complète, dans sa contrée étroite et montagneuse, son petit peuple choisi.
Lui aussi il eut le désir d’écrire une bible ; les dernières années de sa vie, il les consacra au peuple. […] Il a donné les Entretiens et il a publié le Civilisateur : « Déjà presque au terme de ma longue carrière, a-t-il écrit dans la préface de cet ouvrage, avant d’avoir perdu une seule note de ma voix, mon ambition serait de recevoir en bas, dans les rangs obscurs mais honorables du peuple, la naturalisation littéraire et poétique que j’ai reçue autrefois en haut, dans les rangs supérieurs et élégants de la société. […] Il a essayé de donner aux peuples les paroles de foi qu’ils demandent, qu’ils attendent, qu’ils espèrent, qu’ils sollicitent sans cesse.
Il y démontre jusqu’à l’évidence, et par l’esprit même de ces institutions, qu’elles ne furent point la fantaisie d’un homme phénoménal, qui ne se croyait que la vaine durée d’un phénomène, mais qu’elles étaient plutôt l’expression des besoins d’un peuple et la modification nécessaire de son passé. Conserver, en le modifiant, tout ce qui peut être sauvé du passé d’un peuple, c’est peut-être la seule ressource laissée pour manifester leur génie aux grands politiques des vieilles civilisations. […] Mais le temps a montré aux esprits les plus superficiels ou les plus aveuglés que les institutions de l’Empereur répondaient aux besoins compris de la France et à ce qu’il y a de moins transitoire chez un peuple, — ses nécessités et ses instincts.
Le génie de la figuration d’un peuple, qui dresse ce peuple tout vivant et le fait flamber par les différences en face des autres peuples, sur le fond d’une civilisation commune, ce génie spécial de la figuration qui est le génie de l’histoire, Dupont-White n’en a pas une lueur.
Que les bienfaits du prince soutiennent ceux que la confiance de ses vertus a fait naître ; négliger le peuple pour les grands, c’est croire que la tête peut subsister en affamant le corps ; c’est hâter la chute de l’État30. […] « Prince, pour juger des hommes, rapportez-vous-en à la renommée ; c’est elle qu’il faut croire, et non pas quelques hommes : car quelques hommes peuvent et séduire, et être séduits, mais personne n’a trompé un peuple entier, et un peuple entier n’a jamais trompé personne37.
Pour l’excuser, on disait : Molière travaillait aussi pour le peuple qui n’était pas encore décrassé ; le bourgeois aimait ses grosses farces et les payait ; elles lui étaient nécessaires pour soutenir sa troupe. […] Lorsque Uranie ne comprend pas d’abord la beauté d’une œuvre d’art vantée par les suffrages de tout un peuple, elle médite sur elle en silence jusqu’à ce qu’elle l’ait sentie. […] Le peuple français si léger, si superficiel, dit-on, est de tous les peuples peut-être le plus curieux de choses intelligibles et abstraites, pourvu qu’elles se présentent à lui sans pénible effort, parées d’une aimable simplicité. […] Comment une fourmi peut-elle dire ce proverbe du peuple à une cigale ? […] De même le peuple en général, et les chefs des anciennes familles royales de la Grèce n’ont jamais pensé ni parlé comme les personnages d’Eschyle ; ils ont encore moins approché de la beauté de ceux de Sophocle.