Mais c’est, tout à la fois vulgaire et précieux, sentant d’une lieue sa vieille mythologie grecque, à laquelle, moins que personne, M. […] Ernest Hello, c’est de ne rien faire comme personne, non par originalité littéraire ou calcul d’art, mais par une originalité bien autrement grandiose et profonde, l’embrasement d’une foi religieuse qui, dans un temps où l’enthousiasme est tué dans tous les esprits et dans tous les cœurs, est la plus étonnante, — la plus stupéfiante originalité ! […] Mais Saint-Bonnet, qui vient de mourir et dont la mort a fait un trou dans le siècle, que personne, du reste, ne voit, ne se résigna pas comme Brucker, et ses Œuvres, malgré tout ce que j’en ai crié, sont à peine lues, même par les lettrés. […] Ernest Hello, je l’ai dit au commencement de ce chapitre, ne procède de personne.
que beaucoup de gens avaient en secret cette idolâtrie ; mais, quoique nous soyons assez disposés à faire la théorie de nos vices, il ne s’était encore trouvé personne pour faire la théorie de celui-là. […] Disons-le à l’honneur de tout le monde, de ce côté-ci de l’hémisphère personne, même parmi ceux que l’or qu’ils remuent dans leurs mains puissantes devrait fasciner, n’aurait voulu penser tout haut que l’amour de l’argent et sa production fussent le dernier mot de la moralité humaine, l’idéal enfin de la perfection absolue pour les individus et pour les peuples. […] voilà une grandeur de mérite dont, malgré la bonne opinion qu’elles peuvent avoir d’elles, ne se doutent pas les gracieuses personnes qui visent, dans tout pays, à un mariage d’intérêt, et font la traite innocente de leur propre chair, comme si elles avaient des lettres de naturalité américaine dans leur poche ! […] … Personne.
Mais Dargaud, qui n’a pas les mêmes raisons pour proscrire le moi sous sa forme la plus naïve, et j’ajoute la plus nécessaire, a écrit à la première personne un livre qui, restant tout ce qu’il est au fond, mais écrit autrement, aurait été froid et d’une réalité moins sentie. […] Un berceau dans lequel et autour duquel il n’y a plus personne, et, comme dit Dargaud, des foyers éteints, ces foyers auxquels nous nous sommes assis dans les plis traînants de la robe de notre mère et que voilà noirs, solitaires et froids à jamais, pendant qu’en nous la vie dure toujours, comme si c’était une ironie, tel est, dans sa simplicité féconde, le sujet de ce livre touchant. […] Plus que personne, Dargaud a senti ce charme du passé qui est une saveur et un poison tout ensemble, et quoique nous n’en eussions pas, hélas ! […] À côté de la niaiserie du bon sens pipé et de l’invention d’une bourgeoise sagesse, à côté de cette religion naturelle qui est, au fond, si on creuse bien, toute leur doctrine, ils dressent de grands mots qui font rêver les imaginations sans guide et ils pataugent dans l’Infini… Nous ne savons personne plus digne de pitié que ces espèces de philosophes qui n’ont pas même une philosophie complète pour remplacer une religion qu’ils n’ont plus, — qui prennent les ondoyantes et capricieuses lueurs de leur propre sentimentalité pour la ferme lumière de la conscience et vivent en paix avec eux-mêmes.
Il l’a écrite pour ses enfants et à la troisième personne, et la prose de ce poète, qui a coulé la sienne dans ce moule à balles du vers, du vers qui concentre si fort la pensée, prouve une fois de plus que c’est avec des poètes qu’on fait les plus grands prosateurs ! […] Comparez, par exemple, les vers ravissants de Corneille : À la marquise qui lui reprochait son âge, et l’admirable préface d’Agrippa d’Aubigné, incitable parce qu’elle est trop longue : Livre, celuy qui te donne N’est esclave de personne ; Tu seras donc libre ainsi, Et dédié de ton père À ceux à qui tu veux plaire Et qui te plairont aussi. […] Que mon cœur enfelonné Ne s’enfle contre personne : Donne moy que je pardonne, Afin d’estre pardonné. […] Je n’ay vu depuis ta personne Rien qui doive estre souhaité, Ainsi je n’ay rien apporté Que ce cristal que je te donne.
Bientôt, le poète de L’Artiste eut ses quarante personnes auxquelles Stendhal, l’homme de goût, noblement dégoûté, bornait la gloire. […] , ce Roger Bontemps de l’esprit, qui jeta le sien, comme sa fortune, par la fenêtre, sous laquelle personne ne l’a ramassé ! […] Elle porte l’odeur d’un autre dans le mystère de sa personne, et sur ses chastes bras, l’impression brûlante encore des bras qui déjà l’ont étreinte… Lamartine a seul, parmi nous, la virginité de la Muse· C’est la seule voix de notre siècle qui ne rappelle pas une autre voix. […] Elles ne descendaient de personne.
Ainsi, dans l’oraison funèbre de Henriette d’Angleterre, il dit, en parlant des princes, « Qu’ils s’imaginent avoir un ascendant de raison comme de puissance ; qu’ils mettent leurs opinions au même rang que leurs personnes, et qu’ils sont bien aises, quand on a l’honneur de disputer avec eux, qu’on se souvienne qu’ils commandent à des légions ». […] Personne ne saisit plus fortement ce que son sujet lui présente, mais quand son sujet l’abandonne, personne n’y supplée moins que lui. […] Il s’élance, il s’écrie, il s’interrompt ; c’est une scène dramatique qui se passe entre lui et les personnes qu’il voit, et dont il partage ou les dangers ou les malheurs.
Des personnes difficiles, qui souffrent impatiemment ce qui s’élève, ce qui retentit et menace de se prolonger, ont demandé d’abord quelle théorie précise, définitive, complètement nouvelle, M. Lerminier mettait en avant : ces personnes lui auraient conseillé volontiers d’enfermer son dernier mot dans sa première phrase. […] Lerminier les a vivement abordées, et prises, pour ainsi dire, corps à corps dans la personne de leurs trois représentants essentiels, MM.
Je n’y chercherai donc qu’une occasion d’exprimer de nouveau au plus cher de mes maîtres spirituels mon admiration reconnaissante, et aussi d’avertir les personnes frivoles d’une des erreurs où elles tombent le plus aisément au sujet de l’auteur des Origines du Christianisme, de protester enfin contre une légende fâcheuse et très mal fondée : celle du scepticisme de M. […] Ils l’ont aussi jugé sur des causeries improvisées à des banquets, sub rosâ, et où ce sage pliait par instants sa sagesse à une extrême indulgence pour les faiblesses ou la frivolité des personnes qui l’entendaient. […] Je ne pense pas que personne, dans aucun temps, ait pris plus sérieusement la vie que ce petit Breton de vingt-cinq ans dont l’enfance avait été si pure, l’adolescence si grave et si studieuse, et qui, au sortir du plus tragique drame de conscience, seul dans sa petite chambre de savant pauvre, continuait à s’interroger sur le sens de l’univers, — et cela, dans un tel détachement des vanités humaines, que ces pensées devaient rester quarante ans inédites par la volonté de leur auteur.
La croyance en l’unité de la personne, moyen de cette individuation, qui est elle-même le moyen de la connaissance, se fonde sur l’identité originelle et métaphysiquement vraie de ces deux principes d’action et de contemplation qui semblent absorber toute la substance de l’être. […] C’est cet espoir d’un bonheur à conquérir pour sa propre personne ou d’une douleur à s’épargner, qui donne à tout son jeu cette sincérité, cette variété et cette ardeur par où le spectacle s’anime d’un intérêt si fort. […] À savoir qu’ils ne peuvent rien changer à la forme de leur volonté, aux modes de leur activité, à la fatalité de leurs passions, non plus qu’aux circonstances avec lesquelles leur personne doit en venir aux prises, la plupart des hommes seraient atteints de désespoir ou frappés de torpeur.