Au temps de la jeunesse du peintre, je l’avais trouvé insupportable, plus tard, et surtout depuis quelque années, où je dînais avec lui chez Sichel, j’avais découvert sous l’enveloppe balourde et grossière de l’homme, un loyal garçon. […] Samedi 17 février Le peintre Munckaczy, ce peintre à la solide et grasse peinture : un grand corps dégingandé, surmonté d’une broussaille grise de cheveux, qui ressemble à un buisson d’automne couvert de toiles d’araignées. […] L’esprit de X…, on pourrait dire qu’il ressemble à d’amusantes caricatures, tracées par la badine d’un peintre humoristique, sur le sable, à la margelle de la marée montante. […] Le ciel de Paris avec ses bleus délavés, la pierre grise des maisons, l’affiche en ses coloriages, tirant l’œil dans le camaïeu général, c’est merveilleux ; et dans ce tableau encore les figures ont le format qu’il faut au talent du peintre napolitain, le format de grandes taches spirituelles. […] Le premier peintre de ce temps est un paysagiste : c’est Théodore Rousseau.
Mais, à s’en rapporter à l’original, le peintre réaliste a mis beaucoup d’imagination dans ce récit, qui affiche des prétentions biographiques. […] Puis, il faut bien le dire, les peintres et les gens de lettres, au milieu desquels il s’était trouvé tout naturellement vivre, révoltaient avec leurs mœurs bohémiennes sa dignité si susceptible ; leurs petites jalousies dégoûtaient sa fierté. […] Étudiez cette Sainte Famille, vous y verrez qu’à l’exemple du peintre flamand, il pousse sa sollicitude des détails jusque sur les plans les plus éloignés, mais, je le répète, sans que le paysage se morcelle et s’éparpille : tout en gardant son individualité, chaque détail vient s’y rattacher à l’ensemble, — l’analyse vient s’y fondre dans la synthèse.
Grand talent descriptif, qui sait encore mieux distribuer et encadrer ses tableaux que les peindre, il a précisément, comme peintre, le défaut de sa qualité souveraine : il pèche par l’ardeur ; il est froid comme l’exactitude et comme la majesté. […] C’est un peintre, en effet, avant tout, que Buffon, et son grand mérite, qui est énorme et que nous ne voulons pas plus diminuer que ne le veut M. […] Buffon, c’est le grand peintre du dix-huitième siècle, qui n’a pas inventé seulement la description scientifique, comme parle M.
Le moraliste, chez lui, a fini par l’emporter sur le peintre. […] Mais ce n’est nullement le peintre des boudoirs indécents, comme je l’ai entendu dire à des imbéciles. […] en d’autres termes, et comme on dit crûment, quant aux filles de ses livres, à ce peintre des courtisanes du xixe siècle à toutes les hauteurs, personne n’a, sans colère à l’Alceste, traité avec plus de mépris ces drôlesses.
Manet l’a, d’ailleurs, maintes fois représentée et elle lui servit souvent de modèle, car elle fréquentait volontiers l’atelier du peintre. […] Cette même photographie nous montre, à califourchon sur une chaise, un visiteur qui est le peintre Henri Gervex. […] Il ne fut pas cependant sans subir celle des peintres du groupe impressionniste qu’il fréquentait, et l’exemple d’un Manet et d’un Degas eut part à sa formation. […] C’est de Daumier que relèvent peut-être principalement le peintre et le caricaturiste que devint l’élève du bon M. […] Ce fut aussi un romancier que j’eus à accueillir en René Boylesve, l’un des peintres les plus délicats de la vie provinciale et des psychologies sentimentales.
Elle est coiffée d’un filet couleur feu, elle porte une robe agrémentée de dessins légèrement cabalistiques, et est couverte de bijoux pareils à des amulettes : un costume de nécromancienne vivant dans le monde des peintres. […] Toutes les miettes d’études, toutes les raclures de carton, toutes les bribes de crayonnage, tous les ratages, tous les repentirs, tous les essuie-pinceaux du peintre sont là, exposés en grande pompe, religieusement. […] Dans l’amateur, de temps en temps, le savant passe, et à propos de l’équilibre du mouvement chez Fragonard, revient, sur ses lèvres, cette définition de son peintre adoré : « C’est le peintre dynamique ! […] C’est Mlle D… la fille du peintre… Toutes les têtes de femmes sont à demi masquées par un petit voile de dentelle noire, étroit comme un loup, et finissant au sourire qu’il semble chatouiller, en laissant le haut du visage dans une pénombre mystérieuse. […] Quel merveilleux tableau pour un vrai peintre de la vie élégante, si le xixe siècle en avait un !
Le peintre aveugle lui disait, qu’éveillé, il n’avait plus la mémoire des couleurs ; mais qu’il la retrouvait dans les rêves de son sommeil. […] Tout jeune, il s’est senti le vouloir d’être peintre, mais les idées provinciales de son père ne lui ont permis que de prendre une carrière, avoisinant cet art : l’architecture. […] Les Marseillais s’arrachent les aquarelles du jeune peintre, les élèves pleuvent. […] Il est pour moi définitivement un décorateur plutôt qu’un peintre. […] C’est lui qui s’est fait construire, sur le toit de la Vieille Résidence, un lac, où il vogue dans une barque, en forme de cygne, le long d’une chaîne de l’Himalaya, coloriée par un peintre allemand.
Thomas, on peut encore être curieux des essais des peintres actuels même (et surtout plutôt) quand quelques-uns restent stériles. […] Et nous déroulerons ces notes sur FILIGER parce qu’après tous les peintres « parisiens » il est agréable d’en voir un qui s’isole au Pouldu ; parce qu’il montre présentement une sainte Cécile avec un violon et trois anges, et que cela est très beau ; parce qu’il nous plaît ainsi ; parce qu’enfin c’est un déformateur, si c’est bien là le conventionnel nom du peintre qui fait ce qui est et non — forme soufflée dont il le dégangue — ce qui est conventionnel. […] Ainsi les vieux peintres peignaient leurs cadres avec le plus grand soin et les verriers ecclésiastes rompaient l’hostie du mastic des vitres. […] Charbonnier est un des peintres dont Jarry aura, quantitativement — (quinze lignes !) […] Guiguet était un peintre très en vogue au Mercure : cette même année 1894, il venait de portraiturer Rachilde.
Ajoutant ainsi continuellement à son acquis, à son fonds de comparaisons et d’idées, assouplissant et gouvernant avec une dignité de plus en plus aisée sa noble manière, semblant justifier en lui cette définition, que le génie (une haute intelligence étant supposée comme condition première), c’est la patience, il est arrivé, sur les plus grands sujets qu’il soit donné à l’œil humain d’embrasser, à la plénitude de son talent de peintre et d’écrivain. Il y avait, du temps de Buffon et de son âge, un homme avant lui illustre, un homme né naturaliste comme d’autres naissent musiciens, peintres ou géomètres, un homme dont le nom est devenu celui de la science même, le Suédois Linné. […] En tout, Linné, l’homme de l’ordre et de la méthode, observateur neuf, ingénieux, inventif, à l’œil de lynx, écrivain concis et expressif, poète même dans son latin semé d’images et taillé en aphorismes, Linné fait un parfait contraste avec Buffon, le peintre du développement et des grandes vues, et dont la phrase aux membres distincts et nombreux, enchaînés par une ponctuation flexible, ne se décide qu’à peine à finir. […] J’ai souvent causé avec des savants modestes qui se rattachent à cette méthode de philosophie et d’expérience, et, après chaque entretien, je suis toujours sorti plein de respect pour Buffon savant, sans parler de cette autre admiration qu’on a de soi-même pour le peintre et l’écrivain.