La vertu de Fénelon, les grâces de son génie, le risque de toucher à une des gloires les plus aimées de notre pays, n’ont pu me réconcilier avec le chimérique, aujourd’hui sans partisans, de l’amour pur et de la royauté de Salente. […] Un utopiste de son temps, qu’il appelle du pseudonyme de Cassius, trouvait toutes choses si mauvaises dans son pays, qu’il s’était fait conspirateur. « Marié, écrivait-il à Rousseau, j’ai cru longtemps combiner mes affections avec mes devoirs. […] Émile et son gouverneur, comme les amants et les amis de la Nouvelle Héloïse, comme le souverain du Contrat social, sont des enfants du même père et des habitants du même pays. […] Chercher une épouse pour Emile dans son pays, parmi ses relations de famille, c’est ce que conseillait à son gouverneur un autre usage non moins sensé. […] Ils la trouvent dans un coin du pays d’Utopie, faite comme tout exprès au gré de l’élève et du maître.
. — Darius s’était brisé contre les Scythes nomades et sans villes : son fils pourrait-il vaincre un pays si riche en cités, des hommes aussi exercés aux combats de la terre qu’aux luttes de la mer ? […] Ayant appris que le territoire où siégeait son camp portait le nom de « Neuf-Voies », il y fit enterrer vifs neuf jeunes garçons et neuf jeunes filles du pays. […] Cependant le péril était deux fois grand, car les Grecs avaient contre eux, non point seulement le pays forcé, le territoire envahi, deux armées à peine éclaircies par les coupes de vaisseaux et d’hommes que la tempête et les Trois Cents avaient faites dans leur épaisseur, mais encore, chez eux, la lutte des esprits et l’anarchie des conseils. […] La peste et la famine achevèrent ses restes : aux bombances triomphales, aux banquets encombrant les plaines, de son entrée en campagne, succédèrent les étapes à jeun et les marches exténuées par les pays vides. […] Elle les vouait à une perte sûre, puisque leur pays découvert ressemblait à l’espace qui sépare deux armées aux prises.
Et comme je me récriais à propos de l’audace de l’assertion : “Et l’Alsace, et la Lorraine seront à jamais perdues pour vous, reprit le comte, parce que les petits États s’en vont, et que la faveur est pour les grands, parce que vous ne vous doutez pas de ce que l’Allemagne, après sa consolidation et votre amoindrissement, deviendra comme puissance maritime, et quelle préférence auront, en ce temps d’intérêt matériel, vos anciens nationaux pour un grand pays riche, qui demandera beaucoup moins d’impôts que leur ancienne patrie.” » « Un autre fait, messieurs, que je vous demande la permission de citer. […] Sans cette dépêche, toute l’armée se retirait derrière la rive gauche de la Seine, on y encadrait toutes les forces vives du pays, et nous livrions la bataille de Châtillon, cette fois avec de vrais soldats. […] Il voit Benouville peindre un paysage comme il les peignait ; se sent froid devant Raphaël ; est affecté par l’incoloration du pays, où tout est gris-violet. […] Puis encore une chose bien laide en ce pays. […] Pauvre prince, mélancolique personne royale, dont la douce folie fuit son temps et son pays, pour se réfugier dans du passé, dans du moyen âge, dans de l’exotique.
Il en est de même des subsistances : il faut qu’elles circulent pour que les pays abondants secourent les provinces moins favorisées ; il faut que le même sac de blé, qui ne peut satisfaire qu’un appétit, tranquillise dix imaginations dans un marché, comme le petit écu qui satisfait dix créanciers dans une foire… Je n’ai pas à entrer dans le fond : le curieux pour nous aujourd’hui, c’est que, dans un tel instant, M. […] Rien ne m’autorisait, en 1788, à penser que je pusse être jamais appelé à prendre quelque part aux affaires de mon pays. […] Mais dans un pays où la première ambition n’est pas celle d’être libre, où l’on veut d’abord être courtisan, fonctionnaire, riche, décoré de vains honneurs, et puis indépendant, les vanités sont un besoin, la liberté n’est qu’une fantaisie, et il est naturel qu’on éprouve l’incompatibilité de tant d’ambitions contradictoires.
. — La Trousse fut nommé pour aller commander les troupes en Dauphiné, et tâcher de faire aussi bien en ce pays-là que Bouliers a fait en Béarn, en Guyenne et en Saintonge. » Quelquefois on se passe de dragons, et c’est mieux : « Jeudi 27 septembre, à Chambord. — On sut que les diocèses d’Embrun et de Gap, et les vallées de Pragelas, qui sont dépendantes de l’abbaye de Pignerol, s’étaient toutes converties sans que les dragons y aient été. » — « Samedi 29, à Pithiviers. — Le roi nous dit que M. de Duras, revenant de ses terres, l’avait assuré ce matin à Cléry, au sortir de la messe, que tous les huguenots de ses terres s’étaient convertis. » — « Mardi 2 octobre, à Fontainebleau. — Le roi eut nouvelle, à son lever, que toute la ville de Castres s’était convertie. » — « Vendredi 5, à Fontainebleau. — On apprit que Montpellier et tout son diocèse s’étaient convertis. […] Folleville, qui est en ce pays-là avec son régiment, a marché à eux et avait mis des milices derrière les endroits où ils se retiraient d’ordinaire. […] — Et mercredi, 5 octobre 1689, à Versailles : « Il y a quelques jours que M. le marquis de Vins est parti pour aller commander à Bourg-en-Bresse ; on lui donne quelques troupes, avec lesquelles il contiendra les mauvais convertis et empêchera qu’on n’entre dans le pays. » Ces mauvais convertis, ce sont précisément ceux des conversions en masse et si expéditives, dont les nouvelles survenant en 1685, à chaque lever à Versailles, donnaient tant de joie et de contentement au roi.
Quand nous voyons dans la série des lettres missives de Henri IV son voyage en Limousin, dans l’automne de 1605, pour y étouffer quelque rébellion, sa lettre écrite de Bellac au landgrave de Hesse, où il se plaint des menées du duc de Bouillon, ce chef astucieux d’une intrigante famille laquelle a eu grand besoin de Turenne pour se faire pardonner de la France tous ses méfaitsq ; quand on lit ces pièces instructives, on n’a pas encore l’impression soudaine que faisait éprouver aux hommes de sens et aux amis de leur pays le réveil de ces remuements funestes, chers à quelques ambitieux mécontents ; et c’est ce que Malherbe, si sensé quoique poète69, a rendu dans une strophe admirable de son ode, ou plutôt de sa prière à Dieu pour le roi allant en Limousin : Un malheur inconnu glisse parmi les hommes, Qui les rend ennemis du repos où nous sommes : La plupart de leurs vœux tendent au changement ; Et comme s’ils vivaient des misères publiques, Pour les renouveler ils font tant de pratiques, Que qui n’a point de peur, n’a point de jugement. […] J’ai encouragé ceux du plat pays ; j’ai fait fortifier leurs clochers, et faut que vous die, Messieurs, que les oyant crier à mon arrivée Vive le roi ! […] Il la savait, surtout en de certains pays, ingrate et légère.
Après ma mort vous en userez comme vous le voudrez, et si vous vous écartez des principes et du système que mon père a introduits dans ce pays, vous serez le premier qui vous en ressentirez. […] [NdA] « Car, après tout, c’est sous la protection de l’art militaire que tous les autres arts fleurissent, et, dans un pays comme le nôtre, l’État se soutient autant que les armes le protègent. Si jamais on négligeait l’armée, c’en serait fait de ce pays-ci. » (Lettre au prince Henri, 4 mai 1767.)
Mais, en attendant, et à part toute discussion, pourquoi, dans ce ramas d’hommes de guerre et d’assiégeants, l’auteur n’a-t-il pas eu l’idée de nous faire rencontrer un Grec, un seul, animé de l’esprit de Gélon, un disciple, par la pensée, des Xénophon, des Aristote, des anciens sages de son pays, un jeune Achéen contemporain d’Aratus, ayant déjà en soi le germe des sentiments humains de Térence, ayant lu Ménandre, et qui, fourvoyé dans cette affreuse guerre, la jugeant, sentant comme nous et comme beaucoup d’honnêtes gens d’alors en présence de ces horreurs, nous aiderait peut-être à les supporter ? […] Il ne reste plus qu’à prendre Mâtho, qui est sur un autre point du pays avec un lambeau d’armée, à le faire prisonnier, et à épuiser contre lui les supplices, le jour où il est traîné en triomphe à Carthage et livré en victime au tenaillement de la populace. […] On aurait décrit tout à son aise le pays et le paysage ; on aurait montré les habitants, les races confondues ou persistantes, et discuté jusqu’à quel point il est légitime de conclure du présent au passé, et des autres peuples sémitiques de par-delà l’Égypte à ceux d’Afrique, si traversés et si mélangés.
Il a vu bien des pays, et il est avant tout un homme de bon sens, qui a gardé, je ne dis pas de son utopie première, mais de son ancienne religion, une faculté qui lui permet de sortir des classifications routinières et des compartiments convenus. […] un grand ministre enlevé si prématurément, Cavour, dans sa confiance pour le sentiment commun qui animait tous les patriotes de son pays, s’était fait un principe et un point d’honneur de ne gouverner et ne marcher qu’en laissant autour de lui souffler et gronder toute la liberté. […] Il me représente quantité d’esprits comme il y en a dans notre pays et à notre époque, mais comme il n’y en a peut-être pas assez, qui vont au fait, à l’utile ; qui ne sont pas préoccupés plus qu’il ne convient de la forme ; qui acceptent ce qui est bien, avec bon sens et sans chicane ; dont l’opposition n’a ni arrière-pensée, ni amertume ; qui élèvent plutôt qu’ils ne rapetissent les questions, qui ne les enveniment jamais ; qui peuvent sans doute préférer les méthodes et les solutions libérales, mais qui ne tiennent pas pour suspect tout bienfait qu’apporte un gouvernement fort ; qui prennent le régime sous lequel ils vivent, avec le franc et sincère désir d’en voir sortir toutes les améliorations sociales dont il est capable.