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450. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 1, du génie en general » pp. 1-13

Le tableau le mieux peint, comme le poëme le mieux distribué et le plus exactement écrit, peuvent être des ouvrages froids et ennuïeux. Afin qu’un ouvrage nous touche, il faut que l’élegance du dessein et la verité du coloris, si c’est un tableau, il faut que la richesse de la versification, si c’est un poëme, y servent à donner l’être à des objets capables par eux-mêmes de nous émouvoir et de nous plaire. […] On n’examine pas long-temps les ouvrages des grands maîtres sans s’appercevoir qu’ils n’ont pas regardé la régularité et les beautez de l’execution comme le dernier but de leur art, mais bien comme les moïens de mettre en oeuvre des beautez d’un ordre superieur. […] On peut profiter beaucoup dans la lecture de ces ouvrages, quoiqu’ils ne méritent pas toute la confiance du lecteur : je ne dois parler ici que du génie qui fait le peintre et le poëte.

451. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 10, du temps où les hommes de génie parviennent au mérite dont ils sont capables » pp. 110-121

La Fontaine étoit bien plus âgé quand il fit les premiers de ses excellens ouvrages. […] Plus le genre d’un ouvrage est excellent, plus il faut surmonter de difficultez pour le terminer. […] Il est vrai que les dattes de ses pieces qu’on a mises dans une édition posthume de ses ouvrages disent le contraire ; mais ces dattes souvent démenties, même par la piece de poësie, à la tête de laquelle on les a placées, ne me paroissent d’aucun poids. […] C’est-là qu’on voit ses premiers ouvrages, dignes du grand nom qu’il a présentement.

452. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « III »

Nous avons dit textuellement ceci : « Le goût est la faculté de sentir les défauts ou les beautés d’un ouvrage. » Nous serions curieux de savoir par quelle définition on pourrait remplacer la nôtre. […] … Le goût peut varier, en effet, et l’on peut changer d’opinion sur les beautés ou les défauts d’un ouvrage ; mais, quels que soient ces beautés ou ces défauts, le goût consiste et consistera toujours dans la faculté de les sentir. […] Bourgoin10 : « On peut hasarder dans tout genre d’ouvrages d’y mettre le bon et le mauvais : le bon plaît aux uns et le mauvais aux autres. […] etc. » Non, ce ne sont point mes ouvrages qui eussent fourni ses meilleurs chapitres à Haubert : il eût trop bien reconnu ses théories.‌

453. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome III

Ce qui manque essentiellement à tous ses ouvrages, c’est la vérité. […] Voltaire est le seul qui ait fait du moins un ouvrage qu’on peut lire, quoiqu’il soit froid à la représentation. […] Une parade parfaite en son genre est toujours un ouvrage méprisable. […] Un second motif, peut-être plus puissant encore, c’est la froideur et la platitude de l’ouvrage, aussi ennuyeux que méchant. […] L’ouvrage fut très mal accueilli dans la nouveauté.

454. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Note qu’il faut lire avant le chapitre de l’amour. »

De tous les chapitres de cet ouvrage, il n’en, est point sur lequel je m’attende à autant de critiques que sur celui-ci ; les autres passions ayant un but déterminé, affectent à peu près de la même manière tous les caractères qui les éprouvent. […] Non, il n’y a point d’amour dans les ouvrages gais, il n’y a point d’amour dans les pastorales, gracieuses. — Sans doute, et les femmes doivent en convenir ; il est assez doux de plaire et d’exercer ainsi sur tout ce qui vous entoure une puissance due à soi seule, une puissance qui n’obtient que des hommages volontaires, une puissance qui ne se fait obéir que parce qu’on l’aime, et disposant des autres contre leur intérêt même, n’obtient rien que de l’abandon, et ne peut se défier du calcul ; mais qu’a de commun le jeu piquant de la coquetterie et le sentiment de l’amour ? […] — Je n’ai voulu traiter dans cet ouvrage que des passions ; les affections communes dont il ne peut naître aucun malheur profond, n’entraient point dans mon sujet, et l’amour, quand il est une passion, porte toujours à la mélancolie : il y a quelque chose de vague dans ses impressions, qui ne s’accorde point avec la gaîté ; il y a une conviction intime au-dedans de soi, que tout ce qui succède à l’amour est du néant, que rien ne peut remplacer ce qu’on éprouve, et cette conviction fait penser à la mort dans les plus heureux moments de l’amour.

455. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

L’ouvrage se partage nettement en deux parts : l’auteur, voyant que la première avait réussi, y rattacha l’autre. […] L’abbé Desfontaines, dans ses Observations sur les Écrits modernes, parmi de justes critiques du plan et des invraisemblances de cet ouvrage, s’est montré de trop sévère humeur contre l’excellent doyen, en le traitant de personnage plat et d’homme aussi insupportable au lecteur qu’à sa famille. […] Le Pour et Contre, « ouvrage périodique d’un goût nouveau, dans lequel on s’explique librement sur ce qui peut intéresser la curiosité du public en matière de sciences, d’arts, de livres, etc., etc., sans prendre aucun parti et sans offenser personne », demeura consciencieusement fidèle à son titre. […] … Au reste, le caractère de Tiberge, ami du chevalier, est admirable… Je ne dis rien du style de cet ouvrage ; il n’y a ni jargon, ni affectation, ni réflexions sophistiques ; c’est la nature même qui écrit. […] Ainsi rétabli dans la vie paisible, et désormais au-dessus du besoin, Prévost, jeune encore, partagea son temps entre la composition de nombreux ouvrages et les soins de la société brillante où il se délassait.

456. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre III. Littérature didactique et morale »

Des infiltrations, en quelque sorte, se produisirent de la littérature savante dans la littérature populaire, et l’on commença de mettre en français dès le xiie  siècle toute sorte d’ouvrages didactiques, ouvrages d’histoire naturelle, de physique, de médecine, de philosophie, de morale, livres de cuisine ou de simple civilité. […] Elle condamnera aussi les ouvrages de théologie que David de Dinant, disciple d’Amaury de Rêne, écrivit en langue vulgaire. […] De ce fatras se dégage immédiatement avec évidence un esprit général qui est tout contraire à l’aristocratique délicatesse de Guillaumede Lorris : et ce n’est pas la moindre singularité de l’ouvrage que cette absolue incompatibilité des deux intelligences qui l’ont faite. […] L’ouvrage est une suite de morceaux, qui s’accrochent comme ils peuvent, et se poursuivent parfois sans se rejoindre. […] Cependant on ne saurait exagérer la gravité essentielle de l’ouvrage.

457. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface du « Roi s’amuse » (1832) »

Au fond de l’un des autres ouvrages de l’auteur, il y a la fatalité. […] Si l’ouvrage est moral par l’invention, est-ce qu’il serait immoral par l’exécution ? […] Certes, si nous daignions descendre encore un instant à accepter pour une minute cette fiction ridicule, que dans cette occasion c’est le soin de la morale publique qui émeut nos maîtres, et que, scandalisés de l’état de licence où certains théâtres sont tombés depuis deux ans, ils ont voulu a la fin, poussés à bout, faire, à travers toutes les lois et tous les droits, un exemple sur un ouvrage et sur un écrivain, certes, le choix de l’ouvrage serait singulier, il faut en convenir, mais le choix de l’écrivain ne le serait pas moins. […] En effet, depuis quatorze ans qu’il écrit, il n’est pas un de ses ouvrages qui n’ait eu l’honneur malheureux d’être choisi pour champ de bataille à son apparition, et qui n’ait disparu d’abord pendant un temps plus ou moins long sous la poussière, la fumée et le bruit. […] Sans doute, si l’on ne considère que le peu d’importance de l’ouvrage et de l’auteur dont il est ici question, la mesure ministérielle qui les frappe n’est pas grand’chose.

458. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XX. De Libanius, et de tous les autres orateurs qui ont fait l’éloge de Julien. Jugement sur ce prince. »

Plusieurs ouvrages de Libanius se sont perdus, mais il nous en reste encore une partie. […] Libanius ne fut pas assez heureux pour avoir ce tort dans ses ouvrages. […] On voit, par toute la vie de Julien et par quelques-uns de ses ouvrages, que sa grande ambition était de ressembler à Marc-Aurèle. […] La critique qu’on fait ici du caractère de Julien, a quelque rapport avec celle qui en a été faite dans un ouvrage très estimable, plein de connaissances, de vues et d’esprit, qui a paru depuis peu, et qui est intitulé : De la félicité publique. Comme il y avait déjà plus de trois ans que mon ouvrage était écrit, je n’ai pas cru, malgré cette légère ressemblance, devoir rien changer à cet endroit.

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