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147. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Conclusion »

Or, quand nous considérons les objets matériels en eux-mêmes, nous renonçons à ce compromis, puisque nous les tenons pour impénétrables et divisibles, c’est-à-dire pour indéfiniment distincts les uns des autres. […] Ces considérations préliminaires nous ont permis d’aborder l’objet principal de ce travail, l’analyse des idées de durée et de détermination volontaire. […] La science a pour principal objet de prévoir et de mesurer : or on ne prévoit les phénomènes physiques qu’à la condition de supposer qu’ils ne durent pas comme nous, et on ne mesure que de l’espace. […] Kant imagine des choses en soi d’un côté, et d’autre part un Temps et un Espace homogènes au travers desquels les choses en soi se réfractent : ainsi naîtraient d’un côté le moi phénomène, celui que la conscience aperçoit, et de l’autre les objets extérieurs. […] Avec lui nous avons admis que l’espace homogènes est une forme de notre sensibilité ; et nous entendons simplement par là que d’autres intelligences, celles des animaux par exemple, tout en apercevant des objets, ne les distinguent pas aussi nettement, ni les uns des autres, ni d’elles-mêmes.

148. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre II. Le Bovarysme comme fait de conscience son moyen : la notion »

Difficulté de distinguer parmi les notions, celles qui doivent demeurer de simples objets de connaissance de celles qui peuvent fixer des buts à une activité individuelle. […] C’est parce qu’elle est impliquée dans un fait de vision que cette définition emporte avec elle la certitude de l’existence de son objet. Il est malaisé de décider si le monde est un phénomène de pur idéalisme ou s’il comporte une réalité objective, si nos perceptions ont pour unique origine nos sensations s’élevant de nous-mêmes et engendrant les phénomènes, ou si elles se forment à l’occasion d’un objet extérieur : mais quelle que soit l’hypothèse, la réalité n’existe pour l’esprit qu’avec le fait de la perception. […] Si une image réelle emporte avec elle la certitude de son objet, il n’en est pas de même en effet des notions. […] Il semble que le risque de se concevoir autre qu’il n’est augmente pour l’être humain avec le développement de la civilisation : avec l’accroissement de la richesse collective, la difficulté devient plus grande pour l’individu de distinguer parmi tous les acquêts du passé, parmi toutes les conceptions réalisées par l’effort moral, intellectuel ou sentimental de l’Humanité antérieure, d’un mot, parmi toutes les notions qui s’offrent à lui, celles qui doivent demeurer pour lui des objets de connaissance et des spectacles de celles qui peuvent être pour lui des objets de pratique.

149. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre I. Le Roman. Dickens. »

. —  Comment chez lui les objets inanimés se personnifient et se passionnent […] Mais les images restent nettes ; dans cette folie, il n’y a ni vague ni désordre ; les objets imaginaires sont dessinés avec des contours aussi précis et des détails aussi nombreux que les objets réels, et le rêve vaut la vérité. […] Les objets, chez Dickens, prennent la couleur des pensées de ses personnages. […] Jamais objets ne sont restés plus visibles et plus présents dans la mémoire du lecteur que ceux qu’il décrit. […] Sous sa lumière, la terre réfléchit les objets comme l’eau.

150. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7172-17709

La langue latine a encore une maniere qui lui est propre, de déterminer un nom appellatif d’action par le rapport de cette action à l’objet ; ce n’est pas en mettant le nom de l’objet au génitif, c’est en le mettant à l’accusatif. […] Le plan qui nous est prescrit ne nous permet aucun détail sur ces deux objets. […] Tous les objets de nos pensées peuvent se réduire à différentes classes : il y a les objets réels & les abstraits ; les corporels & les spirituels ; les animaux, les végétaux, & les minéraux ; les naturels & les artificiels, &c. […] Le moyen le plus utile & le plus avoué par la raison & par l’expérience, c’est de diviser l’objet dont on traite en différens points capitaux, auxquels on puisse rapporter les différens principes & les diverses observations qui concernent cet objet. […] R. ont assez bien rempli cet objet à l’égard du grec, du latin, de l’italien, & de l’espagnol.

151. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Plan, d’une université, pour, le gouvernement de Russie » pp. 433-452

L’objet est de la plus grande importance, la tâche d’une étendue peut-être au-dessus de mes forces ; mais le zèle, qui quelquefois supplée au talent, a toujours excusé les défauts de l’ouvrage. […] Ce n’est point un petit objet. […] Quel est l’objet dans l’art ou dans la nature qui ne soit pas de son ressort ? […] Objet d’une école publique. […] On entre ignorant à l’école, on en sort écolier ; on se fait maître soi-même en portant toute sa capacité naturelle et toute son application sur un objet particulier.

152. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre premier. Du rapport des idées et des mots »

Au premier jet, ils sont sortis du contact des objets ; ils les ont imités par la grimace de la bouche ou du nez qui accompagnait leur son, par l’âpreté, la douceur, la longueur ou la brièveté de ce son, par le râle ou le sifflement du gosier, par le gonflement ou la contraction de la poitrine. Encore aujourd’hui, si éloignés que nous soyons de l’imitation corporelle, ils gardent avec eux une partie du cortège qui les entourait à leur naissance ; ils renaissent en nous accompagnés par l’image des gestes que nous avons faits lorsqu’ils sont venus sur nos lèvres ; ils traînent après eux la figure de l’objet qui pour la première fois vous les fait jaillir… De sorte qu’un mot bien choisi fait en nous comme un éveil de sensations ; par lui un point clair se détache, et tout alentour apparaissent et s’enfoncent par échappées les choses environnantes. […] Par cette puissance, l’imagination reproduit et remplace la vue ; le livre tient lieu de l’objet ; la phrase rend présente la chose qui n’est pas là. […] Il faut qu’ayant l’idée d’un objet et d’un événement, il trouve d’abord non pas le mot exact, mais le mot naturel, c’est-à-dire l’expression qui jaillirait par elle-même en leur présence et par leur contact.

153. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

L’enfant porte ainsi une quantité de jugements sur les objets et les faits qui lui sont familiers : « Le sucre est bon. […] Or, tous ces cas s’accordent en un point, à savoir que l’objet qui se couvre de rosée est plus froid que l’air qui le touche. […] Est-ce un fait que l’objet baigné de rosée est plus froid que l’air ? […] Toutes les fois qu’un objet se recouvre de rosée, il est plus froid que l’air. […] Même par-delà les dernières nébuleuses, deux faits ou objets ajoutés à trois faits ou objets de la même classe font cinq faits ou objets de la même classe ; s’il s’y trouve un triangle, la somme de ses angles est, comme chez nous, égale à deux droits ; si un corps y est mû par deux forces dont les directions font un angle, il suivra comme chez nous la diagonale.

154. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre deuxième. Rapports du plaisir et de la douleur à la représentation et à l’appétition »

En général, l’estimation, le jugement, la représentation et la perception ne sauraient jamais être primitifs ; la représentation n’existe que par un objet donné et un sujet donné qui est spectateur ou appréciateur, soit moi, soit autrui, soit ma conscience, soit une autre. […] À notre avis, la qualité n’est pas l’objet exclusif d’une intelligence insensible, elle n’a pas cette indifférence essentielle que de Hartmann lui attribue. […] Aussi le temps nécessaire pour sentir purement et simplement un objet, par exemple le tranchant et le froid de l’acier pénétrant dans les chairs, est-il aujourd’hui moins long que le temps nécessaire pour éprouver la douleur de la blessure. […] Richet ne compare donc pas les objets sous les mêmes rapports. […] C’est là, croyons-nous, la vérité qu’on peut retirer des systèmes qui ont voulu réduire le sentiment à l’intelligence jugeant les rapports des objets entre eux ou leurs rapports à nous-mêmes.

155. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 11, que les beautez de l’execution ne rendent pas seules un poëme un bon ouvrage, comme elles rendent un tableau un ouvrage precieux » pp. 71-72

Section 11, que les beautez de l’execution ne rendent pas seules un poëme un bon ouvrage, comme elles rendent un tableau un ouvrage precieux Il n’en est pas des poëtes, qui n’ont d’autre merite que celui d’exceller dans la versification, et qui ne sçavent pas nous dépeindre aucun objet capable de nous toucher ; mais qui, pour me servir de l’expression d’Horace, ne mettent sur le papier que des niaiseries harmonieuses, comme des peintres dont je viens de parler. […] Nous y retrouvons la chair des hommes, et nous reconnoissons dans ses païsages les differens effets de la lumiere et la couleur naturelle de tous les objets. Dès que le erite principal des poëmes et des tableaux consiste à répresenter des objets capables de nous attacher et de nous toucher si nous les voïons veritablement, il est facile de concevoir combien le choix du sujet est important pour les peintres et pour les poëtes.

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