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1137. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — I. » pp. 84-104

Mais il y a un autre point de vue, plus vrai, plus naturel et plus humain, qui, tout en laissant subsister les parties supérieures et de première trempe, permet de voir les défauts, d’entrevoir les motifs, de noter les altérations, et qui, sans rien violer du respect qu’on doit à une noble mémoire, restitue à l’observation morale tous ses droits. […] Pour mieux dégoûter du suicide, l’ami ne craint pas de nous montrer l’impression d’horreur que cause même aux indifférents la vue d’un homme jeune et beau, d’une noble créature qui a ainsi attenté contre elle-même, et qui a tout fait pour dégrader et dévaster son image (jusque dans les traits qu’une mort ordinaire et naturelle sait respecter.

1138. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

Saluons et reconnaissons aujourd’hui la noble et forte harmonie du Grand Siècle. […] Aussi ces hommes de talent, se sentant dans un siècle d’anarchie et d’indiscipline, se sont vite conduits à l’avenant ; ils se sont conduits, au pied de la lettre, non comme de nobles génies ni comme des hommes, mais comme des écoliers en vacances.

1139. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Dans un des exercices publics qui avaient lieu dans la grande salle du collège, voyant entrer M. de La Visclède, secrétaire perpétuel de l’Académie de Marseille, et bien que l’auditoire fût en partie composé des plus jolies femmes de la ville : « Je ne voyais, dit-il, que M. de La Visclède, et mon cœur palpitait en le voyant. » Tel était Barthélemy à quinze ans : âme modérée, affectueuse et fine, esprit vif, curieux, délié, avide de savoir, ne mettant rien au-dessus des belles et nobles études qui se cultivent paisiblement à l’ombre des académies et des musées, on aurait dit que quelque chose de la pénétration et de la douceur des anciens Grecs, de ces premiers colons et civilisateurs de la contrée phocéenne, avait passé jusqu’à lui, et qu’il avait assez goûté de leur miel pour ne plus vouloir s’en sevrer jamais. […] Il put vivre avec les nobles exilés de Chanteloup, être fidèle, comme il le devait, à l’amitié, et garder un très beau revenu, dont il disposait généreusement et sans faste.

1140. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — II. (Fin.) » pp. 246-265

Il fait avancer d’abord le roi, qui est repoussé : « Il est bon, dit Richelieu, de ne pas négliger ces petits avantages ; mais il est dangereux de s’y assurer, principalement à un grand prince, qui doit plutôt emporter que dérober les victoires. » Que cela est noble et bien dit ! […] Je laisse ces divers problèmes, ces contradictions apparentes de quelques-unes de ses pensées et de ses actes à agiter aux historiens futurs ; la renommée de Richelieu (et la renommée, il l’a dit, est le seul paiement des grandes âmes) ne peut que s’accroître avec les années et avec les siècles : il est de ceux qui ont le plus contribué à donner consistance et unité à une noble nation qui d’elle-même en a trop peu ; il est, à ce titre, un des plus glorieux artisans politiques qui aient existé ; et plus les générations auront été battues des révolutions et mûries de l’expérience, plus elles s’approcheront de sa mémoire avec circonspection et avec respect.

1141. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

Pour ne parler que de la France, ces productions, généralement nobles et décentes sous Louis XIV, devinrent licencieuses et impies sous la Régence ; ensuite, sauf de glorieuses exceptions qui s’offrent à la pensée de tous, futiles et affectées pendant le long règne de Louis XV, elles semblèrent se régénérer, avec les mœurs publiques et privées, dans les années trop peu nombreuses du règne de son infortuné successeur ; et enfin, nous les avons vues, durant les jours de nos discordes civiles, partager la fortune diverse des partis, et suivre les phases variées du corps social, tantôt abjectes et furibondes, tantôt sublimes et dévouées, ici célébrant les épreuves de la vertu, et là consacrant les triomphes du crime. […] Ils savent que, dans les arts, la partie la plus noble de nous-mêmes veut autre chose que l’imitation de ce qui tombe sous nos sens ; que, dans la poésie particulièrement, l’âme et l’imagination demandent, pour aliment de leur dévorante activité, ces sentiments profonds et en quelque sorte infinis, dont la religion et l’amour sont les deux principales sources ; et que l’esprit même ne saurait être entièrement captivé qu’à l’aide de cet art délicat, qui consiste à ne pas arrêter avec trop de fermeté les formes de certains objets, et à étendre sur quelques autres un voile qui les laisse entrevoir ou seulement soupçonner.

1142. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

je ne demande pas à Lord Macaulay, le protestant anglais, et qui veut être conséquent en avant comme en arrière aux principes de la Constitution de 1688, d’avoir sur la souveraineté les opinions de Joseph de Maistre, mais pourtant il y a autre chose de plus noble et de plus chrétien, et, si nous sortons de l’ordre sentimental pour entrer dans l’ordre rationnel, de plus mâle et de plus profond à invoquer contre un Roi, même coupable, que la loi du talion et l’utilité, qui composent, à peu près, toute la morale de Lord Macaulay sur cette question et sur toutes les autres. […] C’est la plus libre et la plus noble des formes que la Critique puisse revêtir.

1143. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

Un homme qui avait autant de respect que moi pour le bon et grand homme dont la vertu toucha à la sainteté, Louis Veuillot, à propos des Fragments signalés dernièrement à l’attention publique, a parlé du noble courroux de l’auteur de ces fragments contre les incrédules et les révolutionnaires. […] Ils ont refait une gloire à de Maistre en précisant celle qu’on lui doit, en empêchant la vermine des idées communes de ronger les belles et pures lignes de cette noble et lumineuse figure.

1144. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

Il avait par excellence le caractère impérieux et noble. […] Le noble animal lui avait tourné le dos.

1145. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XV. »

Ami des Scipions, il avait trouvé pour l’art et pour le goût, dans le commerce de quelques nobles âmes, ce que la culture plus générale des esprits devait un jour étendre et renouveler sous le règne d’Auguste. […] C’est la poésie lyrique en action ; et nulle part, à nos yeux, elle n’aura montré plus de grâce noble et naïve.

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