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216. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Elle reconnaît qu’entre race et nation il n’y a plus aucun rapport. […] Il y a longtemps qu’il n’y a plus de race pure, et l’impureté ethnique des nations augmente en même temps que leur civilisation même. […] La France est encore plus composite que toutes les autres ; la nation qui devait formuler les Droits de l’homme est aussi, on l’a répété souvent, « parente de toutes les races ». […] Leroy-Beaulieu, Israël chez les nations, p. 356. […] Bagehot, Lois scientifiques du développement des nations, p. 115 (F. 

217. (1861) Cours familier de littérature. XI « Atlas Dufour, publié par Armand Le Chevalier. » pp. 489-512

Qu’est-ce que la Syrie, où des rixes endémiques entre des fragments de populations aussi concassées que les cailloux d’une mosaïque, ne peuvent vous appeler à leur aide sans que leurs voisins à leur tour n’appellent aussi à leurs secours d’autres nations protectrices de l’Occident, pour que la domination donnée aux uns ne devienne pas à l’instant la servitude des autres, pour que les victimes d’aujourd’hui deviennent les massacreurs de demain ? […] Considérée comme existence visible, comme occupant sous le nom d’empire, de république, de race, de tribu, de nation, telle ou telle place dans l’espace et dans le temps, elle ne vaut pas plus que cela : car tout ce qu’elle remue n’est que poussière, tout ce qu’elle crée n’est que néant, tout ce qu’elle laisse après elle n’est qu’éblouissement, puis nuit profonde. […] Comment ces nations taries se sont-elles perdues comme des fleuves absorbés dans des nations nouvelles ?

218. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces diverses — Préface du « Rhin » (1842) »

Gouverner les nations, c’est assumer une responsabilité ; parler aux esprits, c’est en assumer une autre ; et l’homme de cœur, si chétif qu’il soit, dès qu’il s’est donné une fonction, la prend au sérieux. […] Elles se classent, avec le moine de Saint-Gall, avec le bourgeois de Paris sous Philippe-Auguste, avec Jean de Troyes, parmi les matériaux utiles à consulter ; et, comme document honnête et sérieux, ont parfois plus tard l’honneur d’aider la philosophie et l’histoire à caractériser l’esprit d’une époque et d’une nation à un moment donné. […] L’Allemagne, il ne le cache pas, est une des terres qu’il aime et une des nations qu’il admire. […] Il commence comme un ruisseau ; traverse un ravin près d’un groupe de chaumières, sous un petit pont d’une arche ; côtoie l’auberge dans le village, le troupeau dans le pré, la poule dans le buisson, le paysan dans le sentier ; puis il s’éloigne ; il touche un champ de bataille, une plaine illustre, une grande ville ; il se développe, il s’enfonce dans les brumes de l’horizon, reflète des cathédrales, visite des capitales, franchit des frontières, et, après avoir réfléchi les arbres, les champs, les étoiles, les églises, les ruines, les habitations, les barques et les voiles, les hommes et les idées, les ponts qui joignent deux villages et les ponts qui joignent deux nations, il rencontre enfin, comme le but de sa course et le terme de son élargissement, le double et profond océan du présent et du passé, la politique et l’histoire.

219. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’Empire Chinois »

Pour lui, comme pour nous, c’est, entre les autres symptômes de l’agonie des peuples à l’extrémité, le plus honteux indice de l’immense corruption qui gangrène la nation chinoise, — cette nation lymphatique et décrépite, dont la singularité (si grande soit-elle) ne va pas jusqu’à tomber en vertu de lois inconnues, et non plus en vertu des lois éternelles par lesquelles tous les peuples tombent dans l’Histoire ! […] Le rationalisme est, intellectuellement, le dernier terme pour les nations. […] Nation cadavre, la Chine entrera dans sa tombe avec ce flambeau à la main.

220. (1855) Préface des Chants modernes pp. 1-39

Elle représente bien, au reste, l’esprit étroit et routinier de la France, nation châtiable qui ne fait un pas en avant que pour avoir le droit d’en faire trois en arrière. […] Au reste, ce regret du passé n’est point rare non plus chez les autres nations — il est partout, chez tous les peuples. […] Voyez où nous en sommes aujourd’hui, en pleine moitié du dix-neuvième siècle, chez la nation qui est évidemment la nation la plus artistique du monde actuel. […] Une nation vigoureuse encore, malgré ses débilités, est obligé de le soutenir, À l’heure qu’il est, nous servons de béquille au monde catholique, au monde antique, au monde musulman. […] Il en est de même des nations.

221. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVe entretien » pp. 317-396

Des amis (jamais assez remerciés), qui présumaient trop bien de moi et du public, avaient cru pouvoir tenter, avec mon plein consentement, cet appel à l’intérêt de la nation, appel glorieux quand il est entendu, pénible quand il trouve les contemporains sourds. […] Les empereurs mêmes ne s’en dispensent pas ; ils vont, en tant que représentant la nation, rendre hommage à celui que la nation a reconnu solennellement pour maître, et c’est le fondateur de la dynastie des Han qui le premier en a donné l’exemple. […] L’histoire est le miroir de ma conscience : dans les autres je vois ma propre image, et j’entends, dans le jugement que je porte de mes prédécesseurs, le jugement qu’on portera de moi-même. » « Ces sortes de journaux sont dans les mœurs de la nation chinoise. […] Qu’on nous permette de transcrire ici un de ces entretiens du souverain avec la nation, qui précéda l’abdication d’un des derniers et des plus vertueux empereurs qui aient illustré l’histoire de la Chine. […] Dans les douze livres suivants il est parlé de tous les peuples et nations avec lesquels la Chine a eu des rapports depuis plus de deux mille ans.

222. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — III. Le Poëme épique, ou l’Épopée. » pp. 275-353

C’étoit à des hommes à talent, & du premier génie, à faire ce changement dans les idées, & à ramener les nations. […] Tous les écrivains de l’Europe s’érigèrent en juges : chaque nation eut son chef de parti. […] L’amour de la patrie ne les aveugla point, comme il arrive quelquefois chez les nations modernes. […] Quelques sçavans prétendent qu’il y a eu des romans chez toutes les nations & dans presque tous les siècles. […] Gomberville, La Calprenède, Desmarais & Scudéri, avoient le suffrage de presque toute la nation.

223. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — II. (Fin.) » pp. 254-272

Une nation si jeune, si vive, si exaltée, qui dans ce moment fait une litière d’épines au-dessus des roses qu’elle veut étouffer, tiendra-t-elle des engagements de manège ? […] … Je sais que votre nation peut s’aguerrir et qu’elle est capable des plus grandes choses par la supériorité de talents en tout genre : mais on ne sera pas assez maladroit, j’espère, pour vous laisser faire. […] Les émigrés, selon lui, ont emporté l’honneur (dans le sens royaliste) ; les rebelles n’ont gardé de leur nation que l’intelligence et le courage : il oublie que ces rebelles, qui sont à peu près tout le monde, ont, de plus, gardé intact le sentiment de patrie. […] Il y discute des changements que la Révolution devra apporter dans les mœurs publiques et dans le goût : « Après tout ce qui est arrivé depuis quelque temps, toutes les idées doivent décidément se renouveler. » Et d’abord il croit que l’universalité de la langue française en souffrira ; que Paris ne sera plus comme auparavant la capitale intellectuelle et littéraire reconnue de l’Europe, les autres nations voulant se venger d’avoir si longtemps obéi à l’esprit venu de Paris. […] La vue des crimes a ôté cette fraîcheur, cette grâce, cette urbanité des mœurs de la nation la plus aimable.

224. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VI. De la philosophie » pp. 513-542

Pour justifier tous les genres de servitude vers lesquels divers sentiments peuvent rappeler, l’on a recours du moins à des idées générales, à des motifs tirés du bonheur des nations, à des raisonnements que l’on fonde sur la volonté des peuples. […] Si une expérience physique peut manquer, parce qu’on ne s’est pas rendu compte d’une légère différence dans les procédés, d’un léger degré de plus ou de moins dans le froid ou la chaleur, quelle étude du cœur humain ne faut-il pas pour déterminer la considération qu’on doit donner au gouvernement, afin qu’il soit obéi sans pouvoir être injuste, et l’action nécessaire aux législateurs pour réunir la nation dans un même esprit, sans entraver l’essor individuel ? […] Quand vous dévouez des innocents à ce que vous croyez l’avantage de la nation, c’est la nation même que vous perdez. […] La science politique s’appliquant toujours aux hommes réunis en nation, les probabilités, dans cette science, peuvent équivaloir à une certitude, vu la multiplicité des chances dont elles sont tirées ; et les institutions que vous établissez d’après ces bases, s’appliquant elles-mêmes aussi au bonheur de la multitude, ne peuvent manquer leur objet.

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