Le dernier mot du poème Le Mont des Oliviers est d’un accent profond qui est déchirant. […] Le heurt des mots entrechoqués d’une main vive et très habituée au vocabulaire en fait presque tous les frais. […] Croirait-on qu’on ait pu écrire un livre sur la Révolution de 1830 où il n’y eût pas un mot de l’état social de la France en 1830 ? […] On n’avait qu’indiqué, et très vaguement, une tendance, ce qui est encore un mot de ce temps-là. […] Tout mot est une métaphore, et d’une métaphore à un mythe, il n’y a qu’une différence de degré.
Le roi se retira sans dire un mot aux ambassadeurs et sans tourner seulement la tête de leur côté. […] Les calates, en un mot, n’ont point de prix limité, et on les donne plus ou moins riches, selon la qualité des gens. […] Ce mot est le comparatif de meh, grand, et répond au mot majordome ; cette charge est la même que celle de grand chambellan ; il porte la bourse, l’anneau, la montre, etc., du roi, et ne le quitte jamais, pas même dans le harem, au milieu des femmes. […] Le dernier mot signifie désir. […] Ce mot est composé de κανδῆλι, kandila, chandelle, d’ανάπτω, anapto, j’allume.
C’est un chef-d’œuvre, je maintiens le mot. […] Un mot à la poste de la Madeleine, R. […] Voilà encore un mot excellent dénaturé comme opportunisme. […] Un journal qui ne flatte aucune passion en un mot. […] le joli mot et qu’il fait bien dans le paysage.
L’idée de paternité ne s’attachait donc pas à ce mot. […] Il était synonyme des mots rex, ἄναξ, βασιλε´θς. […] Une institution est quelquefois expliquée par le mot qui la désigne. […] Tous ces mots portent en eux l’idée de filiation. […] Ce n’était pas un vain mot.
Qui sait celui qui aura le dernier mot auprès de nos neveux indifférents. […] Auguste Préault l’a très spirituellement appelé « Mademoiselle Byron » ; le mot est juste et lui restera. Toutes les qualités féminines légères, délicates, fragiles, souffrantes ; ce qu’on entendait par de l’aristocratie quand le mot avait un sens ; la gracilité de ces héritiers élégants et maladifs en qui s’éteignent les familles nobles ; charmant, touchant, oui, — grand, non. […] (Il est vrai qu’on peut alors développer le contenu de ces mots « jeunesse et amour », et que cela ne laisse pas d’être long.)
Avec son vocabulaire opulent et varié, d’où surgissent à chaque phrase les mots strictement choisis, avec sa claire vision de paysages fondus, ses images dorées, ses plastiques ondulantes ou sévères, M. de Régnier a le goût qui distingue, élit, compare et dispose ; il a l’instinct souverain de l’ordonnance qui assigne à ses poèmes la solidité du verbe immobilisé comme un marbre. […] Pour lui, le sens des belles formes n’a pas dû être, comme chez d’autres, développé par l’étude, la comparaison, la « mesure » de toutes choses qui se fait en nous vers l’adolescence ; il a compris sans doute l’eurythmie aux premiers mots qu’il ouï prononcer, au paysage dont s’éblouit son regard d’enfant. […] Remy de Gourmont M. de Régnier est un poète mélancolique et somptueux : les deux mots qui éclatent le plus souvent dans ses vers sont les mois or et mort, et il est des poèmes où revient, jusqu’à faire peur, l’insistance de cette rime automnale et royale… M. de Régnier sait dire en vers tout ce qu’il veut, sa subtilité est infinie ; il note d’indéfinissables nuances de rêve, d’imperceptibles apparitions, de fugitifs décors ; une main nue qui s’appuie un peu crispée sur une table de marbre, un fruit qui oscille sous le vent et qui tombe, un étang abandonné, ces riens lui suffisent, et le poème surgit, parfait et pur. […] Et ces mots, nous les inscrivons avec tranquillité.
Les villes d’université comme Bologne enfantèrent tout naturellement le docteur, le pédant ridicule, dont chaque mot est une délicieuse ânerie ; les modèles n’étaient pas rares dans un temps où l’engouement pour les lettres grecques et latines dégénérait aisément en folie ; c’était l’époque où Philelphe le Florentin et Timothée entamaient, à propos de la force d’une syllabe grecque, une querelle acharnée, dans laquelle le dernier jouait et perdait sa grande barbe et en mourait de chagrin. […] Ils étaient, en outre, habiles à amuser les spectateurs avec des lazzi, expression technique qui désignait moins des bons mots, comme nous l’employons en France, que les fantaisies pittoresques de la pantomime. Voulant donner la définition de ce qu’on entendait par ce mot, qui, étymologiquement, veut dire liens (lazzi, parole lombarde, au lieu de lacci, parole toscane), Riccoboni se sert de l’exemple suivant : « Dans la pièce d’Arlequin dévaliseur de maisons, Arlequin et Scapin sont valets de Flaminia, qui est une pauvre fille éloignée de ses parents et qui est réduite à la dernière misère. […] Mais elle est évidemment le dernier mot de l’art dramatique.
C’est la grande opposition du corps et de l’âme, reconnue par toutes les religions et toutes les philosophies élevées, opposition très superficielle si on prétend y voir une dualité de substance dans la personne humaine, mais qui demeure d’une parfaite vérité, si, élargissant convenablement le sens de ces deux mots et les appliquant à deux ordres de phénomènes, on les entend des deux vies ouvertes devant l’homme. […] L’homme parfait serait celui qui serait à la fois poète, philosophe, savant, homme vertueux, et cela non par intervalles et à des moments distincts (il ne le serait alors que médiocrement), mais par une intime compénétration à tous les moments de sa vie, qui serait poète alors qu’il est philosophe, philosophe alors qu’il est savant, chez qui en un mot, tous les éléments de l’humanité se réuniraient en une har-monie supérieure, comme dans l’humanité elle-même. […] La fin de l’homme n’est pas de savoir, de sentir, d’imaginer, mais d’être parfait, c’est-à-dire d’être homme dans toute l’acception du mot ; c’est d’offrir dans un type individuel le tableau abrégé de l’humanité complète et de montrer réunies dans une puissante unité toutes les faces de la vie que l’humanité a esquissées dans des temps et des lieux divers. […] À vrai dire, ces mots de poésie, de philosophie, d’art, de science, désignent moins des objets divers proposés à l’activité intellectuelle de l’homme que des manières différentes d’envisager le même objet, qui est l’être dans toutes ses manifestations.
Des esprits inattentifs ont souvent, comme on sait, accusé le peuple hébreu de n’avoir pas connu autrefois le dogme de l’immortalité de l’âme, parce que, prétendaient-ils, ce dogme n’est nulle part textuellement énoncé dans la loi judaïque ; mais il était bien plus formellement énoncé que par des mots ou des propositions, puisqu’il jaillissait du génie même de la langue, si fortement empreint du sentiment de la continuité d’existence. […] Pendant que ces choses se passaient dans l’entendement, l’analyse resserrait de plus en plus les limites de nos langues : les mots consacrés par elles avaient subi tant d’épreuves de tous les genres, qu’ils avaient fini par recevoir un sens trop fixe et trop déterminé, qui était en opposition avec l’indépendance naturelle de la pensée. […] Alors on parvint à atténuer la dissonance au point de la faire disparaître ; mais, il finit l’avouer, vous n’obtenez ainsi qu’une harmonie d’à-peu-près, comme le demandait Aristoxène, faute de mieux, au lieu d’une harmonie rigoureuse comme l’exigeait Pythagore ; tranchons le mot, vous avez une harmonie de convention, au lieu d’une harmonie essentielle, fondée sur la nature même du son et de l’ouïe. […] En un mot, la pensée, ainsi que le sentiment musical, manquait d’une expression franche, nette, énergique, dont la force fût en elle-même.