Il dut y avoir là des luttes morales, touchantes, qu’on ne peut s’empêcher de soupçonner, qu’il ne nous appartient pas de sonder dans toutes leurs délicatesses. […] Un critique historique distingué et modeste17, qui a pu, dans le Globe, entretenir le public jusqu’à six fois, et toujours avec intérêt, des livraisons successives des Ducs de Bourgogne, s’est appliqué à faire ressortir ce qui résultait des divers tableaux en conséquences politiques et en déductions morales sur le caractère des hommes et des temps ; il s’est plu à ajouter au fur et à mesure cette pointe de conclusion que le narrateur précisément se retranchait. […] Un sentiment moral, sympathique, humain s’exhale partout de ces pages, qui n’affectent point de rester froides en se montrant plus colorées.
Les applications morales, en effet, détournent presque toujours la science de sa fin véritable. […] Disons plutôt : Tout sera pour le mieux quand l’homme, ayant accompli son œuvre légitime, aura rétabli l’harmonie dans le monde moral et se sera assujetti le monde physique. […] Ces erreurs viennent presque toutes des idées étroites qu’on se fait sur les révolutions qu’a déjà subies le système moral et social de l’humanité, et de ce qu’on ignore les différences profondes qui séparent les littératures et la façon de sentir des peuples divers.
La littérature sérieuse n’est pas celle du rhéteur, qui fait de la littérature pour la littérature, qui s’intéresse aux choses dites ou écrites, et non aux choses en elles-mêmes, qui n’aime pas la nature, mais aime une description, qui, froid devant un sentiment moral, ne le comprend qu’exprimé dans un vers sonore. […] Quand l’objet scientifique a par lui-même quelque intérêt esthétique ou moral, il occupe tout entier celui qui s’y applique ; quand, au contraire, il ne dit absolument rien à l’imagination et au cœur, il laisse ces deux facultés libres de vaquer à leur aise. […] La bassesse, selon les idées mondaines, n’existe pas pour l’homme placé à un point de vue moral.
Selon lui encore, il en est de l’illusion au moral comme au physique : elle engendre des résultats qui peuvent être beaux et bons, relativement à la société et à l’homme. […] Ainsi, au moral, nos illusions intérieures sur la liberté, sur la cause première, ont engendré la religion, la morale, le droit, toutes choses utiles, naturelles à l’homme, et même vraies si l’on veut, mais d’une vérité purement relative et toute subordonnée à la configuration, à l’illusion première. […] Vers l’an 1750, dit Voltaire, la nation rassasiée de vers, de tragédies, de comédies, d’opéras, de romans, d’histoires romanesques, de réflexions morales plus romanesques encore, et de disputes théologiques sur la grâce et sur les convulsions, se mit enfin à raisonner sur les blés.
Le sens moral et sympathique ne l’avertissait pas. […] Le Palais-Royal a été puni par où il avait péché ; il a été mis finalement en pénitence, et il est devenu moral. […] C’est dans cette dernière partie qu’on trouve des tableaux de la Révolution et de la Terreur au point de vue moral, qui rappellent parfois l’idée, la plume, et j’ose dire, la verve d’un Joseph de Maistre.
Il se montra en même temps humain et moral, fidèle à ses principes de Lyon, en insistant pour qu’on prévînt la conspiration une fois connue, au lieu de la laisser à demi éclater comme quelques ministres l’auraient voulu Vers ces années, pour se consoler des injustices de l’opinion publique à son égard, se sentant peu de goût d’ailleurs pour tout ce qui se pratiquait à la Cour, et croyant aussi qu’il était séant à une époque de paix d’inaugurer le rôle d’une espèce de grand seigneur industriel, il conçut l’idée de fonder dans sa terre de Châtillon un vaste établissement où il assemblerait toutes les industries, et moyennant lequel il doterait son pays des innovations utiles en tous genre. […] Dans le traitement des sociétés, il est tout différent d’agir au hasard, sans préparation, sans consulter l’état moral de l’ensemble, ou de tenir compte de ces données générales qu’on dirige et qu’on modifie ensuite, mais qu’on ne supprime pas. […] De telles précautions morales étaient alors nécessaires dans l’état des esprits, et si une transaction avait été possible à quelque moment, comme l’espérait le maréchal, elle ne l’était que moyennant ces ménagements mêmes.
L’âme qui était en cet acteur, le cœur qui a vécu derrière cet esprit, il les exige et les réclame ; et s’il ne peut recueillir tout cet être moral, toute la vie intérieure, il commande du moins qu’on lui en apporte une trace, un jour, un lambeau, une relique. […] Elle étudiera et définira les révolutions morales de l’humanité, les formes temporelles et locales de la civilisation. […] Par l’analyse psychologique, par l’observation de la vie individuelle et de la vie collective, par l’appréciation des habitudes, des passions, des idées, des modes morales aussi bien que des modes matérielles, nous voulons reconstituer tout un monde disparu, de la base au sommet, du corps à l’âme.
Il ne s’agit pas de peindre, de dessiner d’une manière originale les laideurs morales de la sacristie ; il faut plaire au soldat-laboureur : le soldat-laboureur mangeait du jésuite. […] Pour l’apprécier dignement, il faut l’analyser au point de vue de l’artiste et au point de vue moral. — Comme artiste, ce qui distingue Daumier, c’est la certitude. […] Quant au moral, Daumier a quelques rapports avec Molière.
La suppression des intervalles physiques hâte la suppression des intervalles moraux. […] Les inventions scientifiques et leurs applications industrielles aboutissent souvent ainsi, par ce détour, à de profondes transformations morales. […] Denis, Histoire des théories et des idées morales dans l’antiquité, II, p. 70.