S’il est vrai qu’une des facultés qui font les grands poètes c’est de saisir entre le monde moral et le monde matériel beaucoup plus de rapports et de plus inattendus que ne fait le commun des hommes, M. […] Sully Prudhomme, avec ses poèmes, la Justice, le Bonheur, a voulu, et cet effort mérite tous les éloges, faire entrer dans les solides cadres de ses dogmes moraux et de ses conceptions sociales, la matière frémissante d’une riche sensibilité que tout ébranle, que tout froisse et meurtrit.
. — Caractère moral du quatrumvirat de Molière, La Fontaine, Racine et Boileau. […] Mais il était moraliste, et surtout moral, quand il disait au roi dans sa première épître : …………… Laissons là les sièges, les batailles ; Qu’un autre aille en rimant renverser les murailles, Et souvent sur tes pas, marchant sans ton aveu, S’aille couvrir de sang, de poussière et de feu ; À quoi bon d’une muse au carnage animée Échauffer ta valeur déjà trop allumée ?
Gauchie dans ses voies, mise hors des règles, qui sont la force, et hors des idées morales, qui sont l’honneur, la littérature de l’individualisme et de l’indépendance a tué l’esprit, qui, comme la mousse des vins pétillants, est toujours le résultat d’une compression. […] Puisque nous sortons de Cabanis, qui a fait un livre de l’influence du physique sur le moral de l’homme ; puisque c’est la plus puissante inspiration du cerveau de ce temps qu’une bonne digestion stimulée ; puisque nous appliquons en grand la doctrine de Broussais, que l’homme tout entier n’est qu’un tube ouvert aux deux bouts, nous demandons le résultat cérébral du dîner et de la doctrine.
C’est ce nerf héroïque, cette veine de sentiments énergiques déjà anciens, cette lutte prolongée du moral et du physique, qui mérite étude et qui offre à l’observation un intérêt puissant. […] Justice est rendue et au noble caractère du colonel Cavaignac, « droit et consciencieux, mais susceptible et impressionnable » (Saint-Arnaud jouit de ses qualités, qui sont nombreuses, en évitant de heurter ses défauts), et à Changarnier, « le Masséna africain », qui montre un moral de fer dans les dangers, et à Bedeau, « homme de vrai mérite qui, tandis que d’autres se jalousent, s’efface tant qu’il peut, ne médit de personne, juge tout le monde et gémit ». […] Le choléra s’abat sur nous et fait de grands ravages… la 1re division est décimée ; la 2e moins touchée ; la 3e a peu de cas ainsi que la 4e, mais la 5e est horriblement maltraitée… Le moral des troupes est excellent, mais comment oser entasser pour quatre ou cinq jours sur des vaisseaux des hommes qui ont le germe cholérique, germe qui existe aussi sur la flotte, où plusieurs équipages sont atteints et ont eu des morts ! […] Cependant il faudrait faire quelque chose, et nous sommes prêts… Malgré tout, je fais face à l’orage et mon moral est et sera toujours le même. […] Malgré tout, le moral de l’armée est excellent, et je continue mes préparatifs.
Les propriétés organiques se désorganisent sous le choc des réactions sociales de toutes sortes : pénalités politiques, juridiques, plus ou moins violentes, pénalités pédagogiques ou morales. […] Il croit que tous les essais d’unification fondés sur l’action de l’esprit, sur l’influence des religions et des morales sont insuffisants, superficiels et sans avenir. […] L’idée de vérité a été de tout temps la citadelle des dogmatismes sociaux, la pierre angulaire des orthodoxies religieuses, philosophiques, scientifiques et morales. […] Nous ne dirons rien de l’extrême variété des opinions dans les sciences morales et sociales. […] Brunetière recommande de sacrifier les résultats de la critique et de la science aux intérêts moraux et sociaux de la société où l’on vit.
Bien des jugements faux, inexacts, légers et passionnés, outrageux pour d’anciens bienfaiteurs du genre humain, ont été portés par eux, et ont longtemps altéré l’opinion, qui s’en affranchit à peine d’aujourd’hui ; mais le but moral, bien que souvent poursuivi à faux, leur demeura toujours présent ; la commune pensée humaine, la sympathie fraternelle, fut religieusement maintenue. […] L’éclat, la force, l’ordre et la grandeur matérielle substituèrent leur ascendant à celui des idées morales qui semblaient à bout, ayant passé par toutes les phases de fanatisme et de sophisme. […] Tout ce qui a paru fort et puissant dans le passé a été absous, justifié et déifié, indépendamment du bien et du mal moral. […] Michelet a senti en un endroit cette absence de soin moral qui caractérise le moment présent, si animé d’ailleurs, si intelligent et si vivement poétique ; il a exprimé son regret et son espoir en paroles ardentes qu’on est heureux d’avoir pour auxiliaires : ne pourrait-on pas les lui opposer à lui-même quelquefois ? […] Victor Hugo ; jamais notre langue n’avait rendu tant de chocs et d’éclairs ; jamais le despotisme du génie tribunitien n’avait été inauguré dans une telle pompe ; jamais cette sorte de bête fauve, comme l’écrivain l’appelle, ne s’était montrée si puissamment déchaînée : nous regrettons un certain souffle moral que nous n’avons nulle part senti circuler.
À ces spectateurs qui ne sont pas obligés d’être bienveillants pour la France, elles donnent une singulière idée de l’état moral de notre pays, de ce qui y est permis et de ce qui y est défendu. […] À cet extrême moment de la discussion, n’étant point d’ailleurs moi-même un jurisconsulte, ne me croyant point une autorité suffisante sur des matières que j’aborde pour la première fois législativement, je me bornerai en quelque sorte au côté moral de la loi, et j’y signalerai la plus grave lacune à mon sens : je veux parler de la juridiction. […] Sous la Restauration, le 7 août 1827, sous une juridiction pareille à celle qu’on maintient aujourd’hui, on a vu comparaître devant le tribunal de police correctionnelle un homme vénérable, un homme de bien, un philosophe éminent, M. de Sénancour, auteur d’un Résumé de l’histoire des traditions morales et religieuses ; on l’a vu, pour quelques phrases qui ne semblaient pas assez respectueuses envers les religions positives, accusé avec véhémence par un avocat du roi qui ne croyait que remplir son devoir ; on l’a vu, comme de juste, condamné par le tribunal : car, d’ordinaire et provisoirement, en pareil cas, la police correctionnelle commence par condamner. […] Jules Richard : « L’Académie des sciences morales et politiques a fait samedi un choix qui est un acte, dans ce moment où une Chambre française a songé sérieusement à priver des droits politiques les écrivains condamnés par la police correctionnelle. L’Académie des sciences morales et politiques a choisi pour membre, en remplacement de M.
Toutes ces sociétés ne seraient pas d’égale valeur et l’on pourrait en trouver les raisons, si c’en était le lieu, et essayer par là une classification des qualités morales ; mais elles peuvent toutes exister et subsister. […] Il se méfiera naturellement de tous les préceptes particuliers de la morale, des « vertus », des « points d’honneur », de toutes les morales spéciales et professionnelles. […] Il saura que le problème moral est insoluble. […] Et, tel que je le conçois, ses préférences iront à une forme sociale, à un système moral qui donneraient à l’individu le maximum de développement individuel compatible avec une harmonie de l’ensemble aussi pure que possible, mais pas très serrée. […] Ses désirs tendraient à susciter une humanité pacifique, moins industrielle qu’artiste, où les éléments seraient un peu plus libres, seraient moins pressés les uns contre les autres, au physique et au moral, où s’ébaucheraient librement des groupes plus unis qui s’agrandiraient peut-être, en brisant les vieilles formes d’associations, et se fédéreraient à leur tour.
Quand je m’interroge sur les articles les plus importants et le plus définitivement acquis de mon symbole scientifique, je mets au premier rang mes idées sur la constitution et le mode de gouvernement de l’univers, sur l’essence de la vie, son développement et sa nature phénoménale, sur le fond substantiel de toute chose et son éternelle délimitation dans des formes passagères, sur l’apparition de l’humanité, les faits primitifs de son histoire, les lois de sa marche, son but et sa fin ; sur le sens et la valeur des choses esthétiques et morales, sur le droit de tous les êtres à la lumière et au parfait, sur l’éternelle beauté de la nature humaine s’épanouissant à tous les points de l’espace et de la durée en poèmes immortels (religions, art, temples, mythes, vertus, science, philosophie, etc.), enfin sur la part de divin qui est en toute chose, qui fait le droit à être, et qui convenablement mise en jour constitue la beauté. […] Mais il n’en est pas ainsi dans les sciences morales, où les principes ne sont que des à-peu-près, des expressions imparfaites, posant plus ou moins, mais jamais à plein sur la vérité. […] Ceux qui déclament contre le style et la beauté de la forme dans les sciences philosophiques et morales méconnaissent la vraie nature des résultats de ces sciences et la délicatesse de leurs principes. […] Dans les sciences morales, au contraire, il n’est jamais permis de se confier ainsi aux formules, de les combiner indéfiniment, comme faisait la vieille théologie, en étant sûr que le résultat qui en sortira sera rigoureusement vrai. […] Il se peut donc qu’en raisonnant très logiquement on arrive dans les sciences morales à des conséquences absolument fausses en partant de principes suffisamment vrais.