Ce bon jeune homme si mal déguisé égayerait décemment une comédie de genre ; mais il n’est pas à sa place dans une pièce qui porte le titre effrayant de la Contagion. Son mal est trop anodin, son indisposition trop légère. […] C’était l’adolescent ramolli d’esprit, dépravé de cœur, « pourri de chic », c’est le mot, imperméable aux choses intellectuelles et aux idées généreuses, les repoussant avec les formules courantes de l’argot pervers, ne croyant qu’à l’argent et aux plaisirs qu’il procure, produit mal venu du cynisme et du béotisme. […] Un chapitre défectueux vaut mieux qu’un excellent appendice ; une scène mal faite, mais sortie directement de l’idée première, est préférable à une belle scène greffée après coup. […] Dans le cas contraire, il repassait bien vite sa dernière tirade de rechange : Ainsi de tous les maux qu’Othello vous a faits, Vous vous vengez tous trois, mais c’est par des bienfaits !
Quel mal y a-t-il à ce que excessivement ait pris le sens de extrêmement, ou que le mot potable s’achemine vers la signification générale de convenable ? […] Deschanel, frapper le remplacerait fort bien ; impressionner le remplacerait fort mal. […] Il reconnaît cependant lui-même que les langues se modifient sans cesse ; mais il ajoute : « Ce n’est pas toujours en bien. » Rien de plus juste, mais comment reconnaîtrons-nous le bien et le mal ? […] Celui qui dit : des estampes et des estatues parle-t-il plus mal, en théorie, que celui qui dirait : des stampes et des statues ? […] Je sais : les uns sont des participes français et les autres des adjectifs latins mal francisés.
Zola, toute cette cochonnaille, qu’il nous étale et dont il nous repaît, et dont il finit par nous donner le mal au cœur, c’est de l’art. […] La chaude après-midi avait amolli les fromages ; les moisissures des croûtes fondaient, se vernissaient avec des tons riches de cuivre rouge et de vert-de-gris, semblables à des blessures mal fermées ; sous les feuilles de chêne, un souffle soulevait la peau des olivet, qui battait comme une poitrine… un flot de vie avait troué un livarot, accouchant par cette entaille d’un peuple de vers. […] Ce n’est pas pour lui la faute de l’abbé Mouret qui est le crime et le mal, c’est sa pureté avant la faute, et, après, c’est son repentir. […] Zola est d’une brutalité de touche qui, de simples qu’elles sont, les fait basses, et son amour dépravé du détail laid — le mal général de la peinture à cet instant du xixe siècle — les abaisse davantage encore. […] Émile Zola — et pour moi ce n’est pas un éloge — doit être tenu pour le réaliste le plus accentué, le plus résolu, le plus systématiquement exaspéré d’une littérature qui n’a de cœur pour rien et mal au cœur de rien… Ni MM. de Goncourt, qui ont commencé la triste chaîne du Réalisme contemporain, ni Flaubert et tant d’autres, par lesquels elle a passé pour aboutir à M.
— Ma nièce, répliqua le chevalier, cet aphorisme ressemble au mal que les gourmands disent des truffes devant les gens qui n’ont pas dîné. […] Au dessert, on se mit à dire un peu de mal du prochain et de la prochaine. […] Les relations sont les escaliers par lesquels, dans toutes les conditions, on arrive, sans se donner trop de mal, à atteindre les étages supérieurs. […] Je commence à mal augurer de mon voisinage, et je propose diplomatiquement à Nadar de lui faire le sacrifice de mon rez-de-chaussée. […] Il n’y a qu’un remède à ce mal-là : — c’est le départ.
Individuel, il se définit mal. […] Il est certain que le théâtre de Molière, bien ou mal compris, a agi sur la mentalité française. […] (mais non à vrai dire que la belle Aude tournerait assez mal). […] Lanson, une édition savante des Fleurs du Mal ? […] Il ne lui reste donc qu’un moignon de liberté, sur lequel il se traîne tant bien que mal.
Or : 1° une moyenne représente mal les quantités différentes auxquelles on la substitue pour les commodités de la statistique, car elle ne dit pas quelle est leur distribution sur l’échelle numérique ; les quantités extrêmes, qu’elles soient en petit nombre ou en grand nombre, sont également annulées, et, dans le second cas, l’inexactitude est grave ; 2° s’il s’agit de qualités, comme pour le timbre, la qualité la plus commune représente encore plus mal l’ensemble des qualités hétérogènes. […] Tout signe analogue au genre est inégalement analogue aux individus qui composent le genre ; les représentant inégalement, il représente mal le genre tout entier. […] Tout signe étant une image d’un ordre déterminé, représentera mal les images qui lui sont irréductibles ; c’est là un défaut auquel le signe analogique n’échappe pas plus que le signe arbitraire, et, sous ce rapport, une idée particulière est aussi difficile à bien exprimer qu’une idée générale. […] Ces opérations diverses ont un fond commun : elles consistent avant tout à ralentir le cours de la pensée et, en portant l’attention sur les mots, à raviver les idées que les mots mal étudiés révèlent imparfaitement. […] Chez ceux-là mêmes, l’attention, le plus souvent, n’est pas toujours en éveil ; intermittente, mal distribuée, elle succombe à la fatigue après tout effort un peu prolongé.
Des vers mal faits, quelle que soit d’ailleurs la beauté de l’idée, la rareté du sentiment, ou la singularité de la sensation qu’ils veulent exprimer, ne sont pas des vers. […] Quelques services que les publicateurs d’inédits aient rendus à la cause des lettres, ils leur ont fait sans doute plus de mal encore que de bien. […] Jules Le Petit, s’abstenant de parler de ce qu’il connaît mal, l’enrichira d’autant de ce qu’il connaît mieux. […] Que signifie la distinction que l’on faisait jadis, et à laquelle il faudra bien, bon gré, mal gré, que l’on revienne, entre l’histoire littéraire d’une langue et l’histoire de sa littérature ? […] Ils l’ont mal lu ; — voilà ce qu’ils devront se dire, et surtout, ils lui ont rendu le mauvais service, en le copiant maladroitement, d’abuser un moment l’opinion sur son compte.
Cela peut finir très mal ; mais c’est toujours un peu comique. […] Rodogune est un personnage mal établi. […] Elle est conseillère de bien, plus souvent que de mal. […] le grand mal ! […] Que vous la connaissez mal !
Il en sortit enfin seul capable de donner les conseils de l’ambition pratique aux bons ou aux mauvais desseins et d’écrire ce livre du Prince, manuel du bien et du mal pour les ambitieux. Son véritable crime ne fut pas d’avoir préféré le mal au bien dans ce commentaire sur les entreprises des princes : son crime fut son indifférence apparente, sa neutralité extérieurement impassible entre le crime et la vertu. Nous disons neutralité apparente à l’extérieur, parce qu’en le lisant dans ses douze volumes et en l’étudiant impartialement dans sa vie, on reconnaît avec bonheur qu’il n’était nullement neutre, encore moins pervers ; qu’il aimait l’honnête, qu’il le pratiquait pour lui-même, et que son tort est d’avoir eu l’intelligence du mal, mais non le goût. […] Machiavel, mal inspiré, ne s’y rendit pas. […] Lisez cette phrase : « Les cruautés, dit-il, sont bien employées (si toutefois le mot bien peut être jamais appliqué à ce qui est mal) quand on les commet d’un seul coup et en masse, etc. » Vous voyez, par la parenthèse, qu’il parlait du succès, et non de l’innocence des cruautés.