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350. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Ses travaux de revue en particulier, ou même ses simples articles de journal, qui sortaient des formes usitées, et dont chacun offrait un tout, le désignèrent d’emblée à l’attention comme un maître d’un genre nouveau. […] Placé dans une école de sa ville natale, un petit collège tenu par des ecclésiastiques, il y fit avec succès ses études jusqu’à l’âge de seize ans : les maîtres de ce collège étaient des prêtres du pays, de la vieille roche, graves, instruits, enseignant les belles-lettres avec solidité et bon sens, et antérieurs à toute invasion de ce qu’on peut appeler le romantisme clérical ou le néo-catholicisme. […] À son arrivée dans ce monde sulpicien, il lui semblait, au contraire, se retrouver de nouveau dans son milieu de Bretagne ; entouré d’hommes graves, paisibles, de maîtres instruits (l’abbé Gosselin), quelques-uns profonds et très originaux (l’abbé Pinault, par exemple), il commença à développer lui-même sa propre originalité : « L’éducation ecclésiastique, a-t-il dit, qui a de graves inconvénients quand il s’agit de former le citoyen et l’homme pratique, a d’excellents effets pour réveiller et développer l’originalité de l’esprit. […] Il résolut de quitter Saint-Sulpice sans y commencer sa troisième année, et annonça sa détermination à ses maîtres.

351. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre II. La critique »

C’est Sainte-Beuve que nous retrouvons, d’abord, dans la période qui nous occupe : de 1840 à 1860 environ, il est le maître incontesté de la critique. […] Fromentin, enfin, a laissé, dans ses Maîtres d’autrefois (1876), un remarquable essai de critique d’art. […] L’auteur dit ses surprises, ses découvertes, ses dépits, ses ravissements devant des tableaux : c’est un peintre qui saisit la facture, les procédés, et qui, dans la technique, atteint le génie des maîtres. […] Eugène Fromentin (1820-1876). — Éditions : Un été dans le Sahara, 1 vol. in-18, 1857 ; Une année dans le Sahel, in-18, 1850 ; Dominique, in-18. 1863 ; les Maîtres d’autrefois, in-18, 1876.

352. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXV » pp. 259-278

Le total est à la vérité un tissu exact et continuel d’abus de puissance, de violence, d’injustice ; mais une fois prince du sang en tout et partout, il n’y a plus qu’un pas à faire ; et il est moins difficile donner la préférence à un prince du sang sur les autres, pour une succession dont on se prétend maître de disposer, puisqu’on se le croit de faire des princes du sang par édit, qu’il ne l’est de fabriquer de ces princes avec de l’encre et de la cire, et de les cendre ainsi tels sans la plus légère contradiction73. » Madame de Maintenon ne fut ni créole, ni créole publique, ce qui signifie femme publique, ni à l’aumône. […] « Une nuit qu’il était couché dans la garde-robe de son maître avec le sieur de la Fosse, il lui dît à plusieurs reprises : Notre maître est un ladre verd, et le plus ingrat mortel qu’il y ait sur la surface de la terre. […] Mais son maître ne lui en fit pas pour cela plus mauvais visage le lendemain ; aussi ne lui en donna-t-il pas un quart d’écu davantage. » Récit de d’Aubigné.

353. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XX. De Libanius, et de tous les autres orateurs qui ont fait l’éloge de Julien. Jugement sur ce prince. »

Comme il mettait dans son discours cet accent fier et vigoureux de la liberté et du courage, un homme pour qui apparemment cet accent-là était nouveau, lui dit : « Orateur, tu es bien près du fleuve Oronte, pour parler si hardiment. » Libanius le regarda, et lui dit : « Courtisan, la menace que tu me fais ne peut que déshonorer le maître que tu veux me faire craindre » ; et il continua. […] Ainsi, multipliant leur fortune par la misère des autres, ils étendaient leur insatiable avidité aux bornes de la terre, demandant, au nom et sous l’autorité du prince, tout ce qui flattait leurs désirs, sans qu’il fût jamais permis de refuser ; les villes les plus anciennes étaient dépouillées ; des monuments qui avaient échappé au ravage des siècles, étaient conduits à travers les mers pour embellir les palais destinés à des fils d’artisans, et leur faire des habitations plus belles que celles des rois : ces oppresseurs en avaient d’autres sous eux qui les imitaient ; l’esclave avait son ambition comme le maître ; à son exemple, il outrageait, tourmentait, dépouillait, chargeait de fers, et pour s’enrichir, reversait sur d’autres le despotisme que son maître exerçait sur lui. […] Ainsi, il s’occupa du soulagement des peuples ; mais d’autres empereurs qui eurent les mêmes vues, n’étant pas contredits sur le trône, purent être humains impunément : Julien, longtemps César, assujetti dans son pouvoir même à un tyran jaloux, qui l’avait créé par besoin et le haïssait par faiblesse, qui lui eût permis de faire le mal pour se déshonorer, et craignait qu’il ne fît le bien, qui, tout à la fois barbare et lâche, désirait que les peuples fussent malheureux, pour que le nouveau César fût moins redoutable ; Julien, environné dans les Gaules, des ministres de cette cour, qui étaient moins ses officiers que ses ennemis, et déployaient contre lui cette audace qui donne à des tyrans subalternes le secret de la cour, et l’orgueil d’être instruments et complices de la volonté du maître ; Julien enfin, traversé en tout par ces hommes qui s’enrichissent de la pauvreté publique, eut bien plus de mérite à arrêter les abus et à soulager les provinces.

354. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Verhaeren, Émile (1855-1916) »

Comment se peut-il que d’aucuns aient même osé nier — ou renier — le maître écrivain dont nous parlons et se soient si peu respectés qu’ils oublièrent qu’une telle œuvre et un tel homme imposent tout au moins le respect ? […] quels maîtres coups de corne administrés au goût, à la raison, au sens véritable des choses ! […] Cette première période est débordante de vie ; en même temps qu’il mène une campagne en faveur des peintres impressionnistes, il livre d’autres œuvres où sont fixées d’admirables notations de peintre, dignes d’un fils instinctif des vieux maîtres flamands.

355. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Corneille, et le cardinal de Richelieu. » pp. 237-252

On admiroit ces coups de maître où le fils le plus amoureux sacrifie son amante à son père ; où ce même fils entre chez sa maîtresse qui vient de promettre sa main au vainqueur de son amant. […] Il y répondit à la fin, mais très-succinctement & de ce ton de maître que sa grande réputation l’autorisoit à prendre. […] Piganiol de la Force remarque, d’après un autre écrivain aussi spirituel que lui, que le corps de ce ministre ambitieux est placé dans le même endroit où étoient auparavant les latrines du collège de Calvi : « Soit, dit-il, que la providence, qui gouverne tout, ait voulu humilier, après sa mort, un homme qui avoit joué un si grand rôle dans le monde ; soit qu’elle ait voulu confondre l’orgueil des hommes, en leur faisant voir où se terminent les honneurs qu’ils estiment le plus. » Corneille étoit de Rouen, fils d’un maître des eaux & forêts.

356. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre onzième. »

C’est ici le lieu de développer une partie des idées que je n’ai fait qu’effleurer, à l’occasion de la fable du chien qui porte au col le dîner de son maître, et de celle de l’hirondelle et de l’araignée. […] Madame la duchesse du Maine, occupée d’idées plus ambitieuses, lui disait : Vous apprendrez au premier moment que M. le duc d’Orléans est le maître du royaume, et vous de l’académie française. […] Couche-toi le dernier, etc… La moralité de cette fable entre dans celle de l’œil du maître, livre IV, fable 21.

357. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

Il a l’inexpérience, la candeur de ses vingt-trois ans, le respect naïf de ses maîtres et le respect fécond qui s’en invente. […] Comme je l’ai dit plus haut, il a gardé son indépendance, et non seulement vis-à-vis de ceux qu’il prend pour ses maîtres, mais vis-à-vis de ce Dante lui-même, en face duquel sa grande jeunesse aurait pu trembler. […] Quelle que soit la grandeur du maître en poésie qu’il a devant lui, le jeune homme obscur a dit avec une virilité prématurée ce qui lui semblait le vrai sur le Dante tout entier, auteur et homme, et bien loin de le mesurer avec le mètre enflammé de ceux qui en font un génie complexe et presque universel, et un double grand homme aussi auguste par la force du caractère que par la force de la pensée, le critique à ses premières armes a dédaigné ces exagérations, ces italianismes de l’enthousiasme, et il n’a vu dans l’auteur de la Divine Comédie qu’un poète à la manière des plus grands, mais, notez-le bien !

358. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VIII. De Platon considéré comme panégyriste de Socrate. »

Sans doute Platon, quand il composa ses dialogues, était frappé de la même admiration pour Socrate ; il avait été son disciple et son ami, il l’avait vu traîner dans les fers, il avait vu la ciguë broyée par la main de l’envie, et le fanatisme prenant d’elle la coupe empoisonnée pour la présenter à son maître. […] Plein de l’admiration générale et de la sienne, il voulut aussi contribuer à la gloire de son maître, en l’éternisant ; et il consacra presque tous ses ouvrages à son éloge. […] On peut donc regarder tous les dialogues de Platon ensemble comme une espèce de drame composé en l’honneur de son maître.

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