Il se mêle, peut-être, quelque surprise à mon admiration quand je vois où va cette armée d’idées. […] Il les mêle aux vivants et c’est un des charmes de ses récits. […] Mais ne méconnaissons pas qu’il s’y mêle de la joie, du contentement et de l’orgueil. […] Il y mêlait d’étranges audaces. […] Ils avaient mêlé leurs enthousiasmes.
Que l’on relise, de même, la merveilleuse scène du fauchage dans Anna Karénine quand le seigneur Lévine, fatigué de discussions avec son frère, se mêle dès l’aube à la troupe d’ouvriers chargés de couper la moisson d’un pré et s’accablant de fatigue, s’apaisant dans la simplicité d’esprit et de souhaits acquise parmi ses nouveaux compagnons, avance andain par andain, les tempes battantes, sous l’oppression de la chaleur, dans la senteur vireuse de l’herbe tranchée et molle de tiède sève verte. […] Lévine et sa femme, Karénine, Anna, Wronsky, le prince Oblonsky et la princesse Dolly, la famille Cherbatky, les amis et les amies de tous ces gens, les enfants, les serviteurs et les paysans, font du roman contemporain de Tolstoï, une œuvre enchevêtrée et confuse, comble et embrouillée qui choque déjà toutes les règles d’unité et d’élaguement qui nous sont familières ; mais qu’est cette complication devant celle des trois gros volumes de La Guerre et la Paix où les vies complètes du prince André, du prince Pierre, de Nicolas Rostow, mêlées aux destins des membres de leurs familles, entourés d’une foule véritable de satellites, de connaissances, se poursuivent à travers de grandioses récits de batailles, de négociations, d’entrevues, dans lesquelles figurent tous les personnages célèbres du temps, à travers les scènes populaires, rustiques et sociales qui constituent toute l’histoire politique et intime d’un peuple ? […] Mêlée de vues bornées chez Lévine et sa femme, de morgue chez Wronsky, d’exaltée amertume chez Anna, de sèche étroitesse chez Karénine, cette bonté élémentaire et comme animale éclate pure cependant et puissante chez ce groupe d’êtres de haut rang, et dans le grave tableau de la mort de Nicolas Lévine, où son frère et la femme de celui-ci viennent simplement et cordialement s’asseoir au chevet de ce pauvre agonisant à côté de la prostituée dont il a fait sa compagne et, plus haute encore et plus belle, quand Anna adultère au su de son mari, et croyant mourir des couches de la fille de son amant joint la main de l’homme pour qui elle s’est perdue à celle de l’homme qu’elle a trahi et induit Karénine à pardonner avec tant de noblesse à son ennemi que le comte Wronski reste troublé de devoir s’incliner devant celui qu’il méprisait. […] La joie, l’ambition, le ressaisissement ; il se mêle aux affaires publiques, s’éprend, est trahi, retourne à la guerre et, mortellement atteint sur un champ de bataille, s’abandonne tout entier, au seuil de l’ombre, à cette méditation muette de la mort, cette contemplation ravie de l’inconnaissable où ne le touchent plus les caresses de son fils et de son amante. […] Maintenant qu’une intelligence ainsi douce pour la perception, le souvenir, la divination des esprits, soit telle que toutes ces notions sur le monde ne s’accompagnent pas des mêmes sentiments, des mêmes émotions ; que les sentiments agréables d’élation, de joie, d’acquiescement, suivent plus particulièrement la vue et le souvenir d’actes immédiatement bienfaisants à l’homme, que l’écrivain consolidant progressivement ce sentiment, lui laisse déterminer ses propres actes et ses mobiles, aussitôt le spectacle du monde étant mêlé de mal et de bien, toute une partie de la réalité sera envisagée avec des dispositions pénibles d’aversion, d’inquiétude, d’angoisse, de désespoir ; l’écrivain négligera le plus qu’il pourra de prêter attention à cette part de la réalité, l’omettra de sa mémoire, de son imagination, de son œuvre ; mais comme on ne peut éviter de la connaître, comme ses facultés d’observateur la lui représenteront sans cesse, il en viendra peu à peu à un état de trouble, d’éloignement pour le spectacle qu’il semblait destiné à connaître et à goûter pleinement.
Il s’adresse à Orion, aux Hyades qu’il nomme la Poussinière, et « aux signes qui sont au midi. » Il dit : « Dieu a mis un bout aux ténèbres. » Il nomme le diamant qui se cache : « la pierre de l’obscurité. » Il mêle à sa détresse l’infortune des autres, et il a des mots tragiques qui glacent : la veuve est vide. […] La nature et l’humanité se mêlent dans le hurlement attendri que jette Ézéchiel. […] Il parlait un grec barbare, mêlé de tours hébraïques et de mots syriaques, d’un charme âpre et sauvage. […] Dans ce poëme, l’impondérable, mêlé au pondérable, en subit la loi, comme dans ces écroulements d’incendies où la fumée, entraînée par la ruine, roule et tombe avec les décombres et semble prise sous les charpentes et les pierres ; de là des effets étranges ; les idées semblent souffrir et être punies dans les hommes. […] Car l’élément saxon est mêlé à l’élément britannique.
Les anarchistes faisaient exception et pour se distinguer une fois de plus des socialistes révolutionnaires, ils essayèrent de mêler leur drapeau noir aux drapeaux multicolores du cortège ; Élisée Reclus, leur homme remarquable, pria son ami Nadar d’inscrire son nom sur le registre mortuaire. […] Sous le pseudonyme de Genty, le général Hugo publiait en 1818 une brochure où se mêlent avec bonheur les préoccupations de l’industriel et du philanthrope15. […] Victor Hugo, Philosophie et littérature mêlées, 1831 Vol. 1. 203. […] Philosophie et littérature mêlées. 1834. […] Philosophie et littérature mêlées, 1831, p. 27-49-50-51.
Une mère demande pardon que sa fille n’en ait pas encore : « Mais cela viendra bientôt, me dit-elle, car à présent c’est une honte, elle est droite et mince comme un jonc. » Les aperçus politiques se mêlent à ces jolies peintures. […] Le prince de Ligne y mêle de ses jeux : « J’aime encore mieux les barils que les tonneaux », allusion aux Du Barry et à Mirabeau-Tonneau. […] Il lisait, il écrivait chaque matin à tout hasard ; il faisait imprimer ses Œuvres trop mêlées et trop noyées, toutes criblées des fautes de l’imprimeur, sans parler des siennes.
Une étude complète sur Massillon deviendrait naturellement celle de l’éloquence même dans la dernière moitié du règne de Louis XIV ; on y suivrait ce beau fleuve de l’éloquence sacrée, on le descendrait dans toute la magnificence de son cours ; on en marquerait les changements à partir de l’endroit où il devient moins rapide, moins impétueux, moins sonore, où il perd de la grandeur austère ou de l’incomparable majesté que lui donnaient ses rives, et où, dans un paysage plus riche en apparence, plus vaste d’étendue, mais plus effacé, il s’élargit et se mêle insensiblement à d’autres eaux comme aux approches de l’embouchure. […] Massillon qui paraissait pour la première fois devant Louis XIV, et qui y venait précédé d’une réputation d’austérité, savait mêler le compliment et l’hommage à la leçon même. […] L’Oraison funèbre qu’il prononça de Louis XIV, et dont j’ai cité l’admirable début, a de beaux détails, mais pèche également par l’ensemble : Massillon, en louant, ne sait point prendre de ces grands partis comme Bossuet ; il mêle des vérités et des restrictions qui font nuance, là où il faudrait une couleur éclatante, une touche large et soutenue.
Créatures fragiles, êtres d’un jour, malgré les hautains progrès dont ils se vantent, malgré les ressources croissantes dont ils disposent, la mort est là qui les déjoue aujourd’hui comme au lendemain d’Adam, et qui les saisit dans leurs plans d’ambition, d’accomplissement ou d’attente, dans leurs rivalités, dans leurs espoirs de revanche et de représailles sur la fortune : « Nous nous hâtons de profiter du débris les uns des autres : nous ressemblons à ces soldats insensés qui, au fort de la mêlée, et dans le temps que leurs compagnons tombent de toutes parts à leurs côtés sous le fer et le feu des ennemis, se chargent avidement de leurs habits… » Mais ceci ne vient qu’après un grand et inépuisable mouvement d’éloquence sur la fuite et le renouvellement perpétuel des choses, un des plus beaux exemples de la parole humaine. […] Je tâche de résumer les impressions qui se mêlent à l’admiration si légitime et si durable qu’inspire le Petit Carême. […] Il mêlait à cette tolérance une sorte d’aménité d’homme du monde ; il se plaisait à réunir à sa maison de campagne des jésuites et des oratoriens, deux sociétés assez peu disposées à s’entendre, et il les faisait jouer aux échecs : c’était la seule guerre qu’il leur conseillât.
Elle se moque d’une de ces critiques qui porte à la fois sur la conduite d’Hélénus, d’Hector et de Diomède, qu’Homère donne pour sages et qui, au moment même, se seraient emportés comme des imprudents : « Voilà un beau coup de filet pour M. de La Motte, dit-elle assez gaiement, d’avoir pris en faute trois héros d’Homère tout à la fois. » Quand elle en vient au travestissement en vers qu’il a donné de l’Iliade, elle en fait ressortir tout le chétif et l’indignité ; elle montre très bien, par exemple, que les obsèques d’Hector, exposé sur un lit dans la cour du palais, avec l’entourage lugubre des chanteurs et les gémissements de tout un peuple de femmes qui y répondent, sont devenues chez M. de La Motte quelque chose de sec et de convenu : « On croit voir, dit-elle, un enterrement à sa paroisse. » Mais ces traits d’esprit, que Mme Dacier oppose à ceux de l’adversaire, se mêlent trop d’images, de comparaisons et de citations qui juraient avec le goût moderne. […] Au même moment, d’autres champions de tout caractère et de taille diverse entraient en scène, et la mêlée devint générale : il y avait la vraie jeunesse du temps, les malins et les espiègles armés à la légère, comme l’abbé de Pons, comme Marivaux ; il y avait ceux qui ne riaient pas et les esprits rectilignes comme l’abbé Terrasson, membre de l’Académie des sciences. […] Pour elle, qui se mêle à ces illustres ombres, elle est accueillie aussi par les femmes célèbres dont la renommée peut faire envie aux plus grands hommes ; mais, jusqu’en cette demeure dernière et parmi ces naturelles compagnes, « ce n’est ni Sapho ni la docte Corinne qui lui plaisent le plus, c’est plutôt Andromaque et Pénélope ».
Pourtant Maucroix mêle à ses souvenirs littéraires, et aux imitations dont il s’appuie, un sentiment de mollesse qui lui est particulier et qui n’est pas sans charme. […] Des intérêts sérieux et respectables y étaient pourtant mêlés, et Maucroix, pendant les deux ans qu’il fut en charge (1667-1669), répondit à la confiance de ceux qui l’y avaient porté. […] On a les lettres charmantes encore, mais plus réservées, plus résignées, qu’il écrit pendant sa convalescence : c’est certainement du christianisme qui se réveille dans le cœur de Maucroix ; mais, avec le retour à la santé, il s’y mêle bien de l’Horace encore : … Je ne suis pas fâché, non, de n’être pas mort : je ne suis pas si dénaturé que cela.