Mais quand je pense que j’ai moins employé de temps à examiner deux cents morceaux, qu’il n’en faudrait accorder à trois ou quatre pour en bien juger ; quand j’apprécie scrupuleusement la petite dose de mon expérience et de mes lumières avec la témérité dont je prononce, et surtout lorsque je vois que moins ignorant d’un sallon à un autre, je suis plus réservé, plus timide, et que je présume avec raison qu’il ne me manque peut-être que d’avoir vu davantage pour être plus juste, je me frappe la poitrine, et je demande pardon à Dieu, aux hommes et à vous, mon père, et de mes critiques hasardées et de mes éloges inconsidérés.
Elles n’omettent aucun détail important, elles copient consciencieusement, chaque chose à sa place, en bonne lumière, afin que nul détail ne se noie d’ombres équivoques. […] Mais sa simplicité est pleine d’agrément, et les jeux combinés de la lumière et de l’eau la varient de mille manières. […] La mort, la nostalgie et la désolation suscitent, parmi les limbes de lumières, de pâles fantômes qui sont les rêves de nos âmes. […] Le poète s’est écarté de la Nature, de la lumière. […] Ses lumières extravagantes et ses fumées sont un prestige auquel cèdent irrésistiblement les volontés, et son appel retentit au fond des horizons.
Trop souvent on nous accuse de nous prélasser un peu trop dans notre orgueil littéraire, et de ne pas reconnaître volontiers les lumières que nous devons aux savants et aux hommes de lettres germaniques. […] Toujours poussé en avant par l’ardeur de son tempérament, attiré par la lueur de la vérité qu’il ne cessa d’entrevoir à l’horizon, Diderot dut traverser tour à tour toutes les croyances, comme toutes les lumières de son siècle. […] « La liberté, la vertu, la gloire, les lumières, dit-elle, ce cortège imposant de l’homme dans sa dignité naturelle, ces idées alliées entre elles, et dont l’origine est la même, ne sauraient exister isolément. […] La muse moderne sent que tout dans la création n’est pas humainement beau, que le laid y existe à côté du beau, le difforme près du gracieux, le grotesque au revers du sublime, le mal avec le bien, l’ombre avec la lumière. […] Il les brise en deux parties ; ou plutôt en fait jaillir la lumière comme des deux éléments de la pile voltaïque.
Sous la froide lumière d’un idéal de justice, le laboureur d’Ascra peut encore se faire une destinée enviable. […] Dante voit dans le ciel de Jupiter un aigle formé par des myriades d’âmes saintes resplendissantes de lumière. […] Pour Dante, il est tout lumière, contemplation, amour, extase. […] Le nom est une puissance sacrée, une lumière mystérieuse : Nomen, Numen, Lumen. […] Il l’anéantissait, mais il laissait subsister, à la place où elle avait été, des reflets de lumière et des nuages d’encens.
Lorsque midi surtout a versé sa lumière, Que ce n’est que chaleur et soleil et poussière ; Quand il n’est plus matin et que j’attends le soir, Vers trois heures, souvent, j’aime à vous aller voir ; Et là vous trouvant seule, ô mère et chaste épouse ! […] Mais ailleurs, mais partout, que la lumière est pure ! […] n’étais-tu pas mieux celui que chacun nomme, Celui que nous cherchons, et qui remplis nos cœurs, Quand par-delà les monts d’où fondent les vainqueurs, Dès les jours de Wagram, tu courais l’Italie, De Pise à Nisita promenant ta folie, Essayant la lumière et l’onde dans ta voix, Et chantant l’oranger pour la première fois ? […] Et de là nous viendront tes dernières moissons, Peinture, hymne, lumière immensément versée, Comme un soleil couchant ou comme une Odyssée ! […] Il était de ceux encore dont Pope, l’un des plus beaux esprits et des plus sensibles, disait : “Pour moi, j’appartiens à cette classe dont Sénèque a dit : ‘Ils sont si amis de l’ombre, qu’ils considèrent comme étant dans le tourbillon tout ce qui est dans la lumière.’”
Souvent, avant l’apparition de la lumière, je suis éveillé, j’ouvre ma fenêtre ; je rassasie mes yeux de la splendeur des trois planètes qui sont dans ce moment au-dessus de l’horizon ; je me rafraîchis en voyant l’éclat grandissant de l’aurore. — Presque toute la journée je reste en plein air, j’ai des conversations muettes avec les pampres et les vignes ; elles me donnent de bonnes idées, et je pourrais vous en raconter des choses étranges. […] Elles sont pour le naturaliste, non seulement parce qu’elles renferment les grandes lois que Goethe a découvertes, mais aussi et surtout parce qu’il y trouvera la méthode qu’un bon esprit doit suivre pour que la nature lui livre ses secrets. — Ainsi tous les esprits dévoués à la science, à l’art, seront reçus comme hôtes à la table que garnissent richement les œuvres de Goethe, et dans leurs créations se reconnaîtra l’influence de cette source commune de lumière et de vie à laquelle ils auront puisé ! […] En voici la preuve : « La lumière sans obscurité de la révélation divine est beaucoup trop pure et trop éclatante pour qu’elle convienne aux pauvres et faibles hommes, et, pour qu’ils puissent la supporter, l’Église vient comme médiatrice bienfaisante ; elle éteint, elle adoucit cette lumière pour qu’elle puisse aider et protéger beaucoup d’hommes. […] En conséquence, il ne se demande pas si tel livre de la Bible peut jeter de la lumière dans l’esprit, s’il renferme de hautes leçons de moralité, s’il offre des exemples d’une noble existence : l’important pour lui, c’est dans les livres de Moïse l’histoire de la chute, qui rend nécessaire le Sauveur ; dans les prophètes, les allusions qui sont faites au Désiré ; dans les évangiles, le récit de son apparition sur cette terre, et de sa mort sur la croix, qui expie nos péchés. […] « Donnez-moi plus de lumière !
C’est un miracle de lumière ! […] Il n’y avait guères qu’un ordre à suivre dans la traduction des œuvres de Shakespeare, c’était l’ordre chronologique, le seul qui mette bien l’œuvre d’un homme dans sa véritable lumière et nous donne les développements successifs de son génie. […] » Non seulement Hazlitt ne s’est pas rappelé le vieux lieu commun sur l’éternelle jeunesse des poètes, mais il a oublié bien plus : il a oublié que les poètes n’ont jamais plus de jeunesse et de puissance dans le talent que quand ils n’ont plus ce qu’ils chantent, que ce soit la force de la vie, l’amour, la beauté ou la lumière ; qu’ils aient les yeux crevés ou le cœur percé de la flèche de l’irréparable, — de la flèche qu’on n’en retire plus ! […] Ils ont la chaleur du cœur ; la vivacité, la véhémence, et sous leurs neiges, chaudes comme la lumière, tous les essors et toutes les qualités du printemps. […] Ce n’est pas ce groupe digne de Polyclès, noyé dans la lumière et les morbidesses du Corrège, et dont le monde, tant que le sentiment de l’idéal vivra en lui, retiendra dans sa mémoire charmée les trois immortelles attitudes, les trois inoubliables gestes : — le baiser donné par Roméo à Juliette et rendu par Juliette à Roméo avec la fougue naïve de l’amour vrai et l’intrépidité de l’innocence ; — l’adieu au balcon dans l’air auroral, empli des joyeux cris de l’alouette qui ne sont plus les chants du rossignol ; — et enfin l’entrelacement, sur le marbre du même mausolée, de ces deux êtres si vivants, devenus par la mort deux pâles statues !
Goethe, — qui, malgré ses airs d’Olympien, fut quelquefois grotesque, s’est plaint toute sa vie de la longueur du nez des chandelles qui éclairaient (mal) les veillées de son génie ; — Goethe, mourant comme il avait vécu, criait, en mourant : « Toujours plus de lumière ! toujours plus de lumière ! […] » parce que c’est plus de lumière. […] la lumière de Goethe. […] Il a ouvert le ciel comme un pavillon au-dessus de la montagne qui portait à son sommet l’image de l’archange, et il en a fait tomber une lumière céleste pour mieux éclairer les faits prodigieux qu’il allait raconter.
Vous êtes Italiens, sans doute, mais vous êtes Italiens comme les Hellènes étaient Grecs, Grecs dans la communauté de famille générique et dans la vaste autonomie du Péloponnèse, des îles et de l’Ionie, mais, en réalité, Lacédémoniens, Athéniens, Thébains, Corinthiens, Samiens, branches distinctes, toujours séparées, quelquefois hostiles de cette grande et héroïque famille grecque contenue à peine entre les montagnes du Péloponnèse, les archipels et les rivages de l’Asie Mineure ; branches ayant chacune son territoire, ses flottes, ses formes de gouvernement diverses, aristocratique ici, populaire là, militaire dans les montagnes, navale dans les ports, monarchique en Asie, théocratique à Éphèse, républicaine en Europe, rivale en temps de paix, confédérée en temps de guerre, indépendante pour le gouvernement intérieur, amphictyonique pour la défense commune, forme élastique qui s’étend ou se resserre selon les besoins de la race hellénique, et qui, en faisant l’émulation au dedans, la sûreté au dehors, le mouvement et le bruit partout, fit de la Grèce en son temps l’âme, la force, la lumière et la gloire de l’humanité ! […] Naples est le joyau de l’Italie, qui allèche à cette proie éblouissante toutes les convoitises ; mais Naples n’en est pas le patriotisme et la force ; d’ailleurs son peuple a immensément mûri et grandi en civisme et en nationalisme ; il n’accepterait plus les premiers venus pour arbitres de sa destinée ; peuple calomnié qui vaut mieux que sa renommée, Naples est peut-être aujourd’hui le royaume de l’Italie qui est le plus capable d’institutions modernes par ses lumières ; mais sa déshabitude des armes et son petit nombre ne lui donneraient pas la force de les défendre, encore moins de les imposer seul à toute l’Italie ; vous ne ressusciteriez qu’un fantôme ; par sa situation excentrique, comme celle du Piémont, Naples peut être un brillant rayon de l’Italie : il ne peut en être le centre. […] La lumière qu’ils ont autrefois répandue dans le Nord leur revient du Nord comme un reflet répercuté de leur propre et primitive splendeur ; de longues servitudes n’ont fait que les affamer de plus d’indépendance de sol et de liberté d’esprit : c’est une grande race dans de petits peuples, mais ces petits peuples forment de nouveau une grande race. […] La liberté constitutionnelle à laquelle vous aspirez sera justement plus assurée chez vous qu’à Turin ; ce n’est plus l’arbitraire d’un roi soldat qui vous mesurera selon ses intérêts cette liberté constitutionnelle, et qui vous la changera en dictature militaire au premier tocsin ; c’est vous-mêmes qui vous la donnerez selon vos mœurs et vos lumières, et qui ne la mesurerez qu’à vos vertus publiques !