Il charmerait Rabelais, — il charmerait Shakespeare, Walter Scott, Richardson, Cervantes, La Fontaine, qui ne reviendront pas (malheureusement) pour lire ses livres, mais qui les liraient en se pourléchant, s’ils étaient revenus. […] En lisant son Étude historique, littéraire et morale, sur les proverbes, qui est un véritable traité ex professo sur la matière, et cet amusant Dictionnaire, que le duc de Richelieu n’aurait pas fait lire à son fils comme celui de l’Académie quand il le mettait en pénitence, on regrette vivement que le tempérament — sinon les connaissances — ait manqué.
Quoi qu’il en soit, du reste, du goût que je suppose en Mérimée pour la netteté d’acier du talent de Daly, nous croyons, nous, après avoir lu son mémoire, la question assez pénétrée de lumière pour n’en être plus une désormais. […] Lisez, dans la très curieuse dédicace à Mérimée de la brochure sur les Concours, le peu qu’il rappelle de son courageux voyage dans les parties de l’Amérique les moins explorées, et vous me direz s’il n’y a pas de l’héroïsme césarien en ce savant, qui a eu, pour le danger, sa Gaule au Mexique. […] On ne sait, en effet, que quand on a lu les nombreux écrits de César Daly, à quel point ce penseur hardi est historien, et cela nous charme, nous qui croyons que l’histoire est le seul garde-fou de la pensée du côté où elle peut se noyer, — du côté de la philosophie.
Si on lit son livre d’aujourd’hui comme nous venons de le lire, après celui d’un autre que nous allons nommer, on reconnaît en son ouvrage bien moins présente la Correspondance qu’il affirme que la vieille biographie de Southey dont il ne parle pas. […] Et cependant tout le temps qu’elle dura, cette incarnation, elle fut rongée par une passion, — une passion honteuse ; et ce lis d’honneur, pour la pureté, porta cette tache au fond de son calice, jusqu’au moment où il tomba dans le sang, versé pour le devoir, mais qui ne l’a pas effacée, car, lorsqu’on est si grand, rien ne s’efface. […] Nous ne les avons pas lus, mais entre tous, en voilà toujours deux que nous connaissons qui l’ont furieusement manqué, et c’est Robert Southey, l’historien galonné poète par le gouvernement d’Angleterre, et en France c’est M.
Une des reines du xviiie siècle, douée de tous les dons aimables par lesquels on était reine alors, une Titus femelle, les délices du genre humain, comme disait d’elle une de ses amies, une des plus éblouissantes soupeuses de cette époque où le souper était « une des quatre fins de l’homme et où l’on oubliait les trois autres », un des esprits les plus teintés de ce rouge audacieux que les femmes mettaient sur leurs joues pour qu’on vint l’essuyer, se plaint, à travers les rires de tout le monde et même des siens, d’un ennui que ne connaît personne, de cet inexorable ennui dont parle quelque part Bossuet, que certainement elle ne lisait pas ! […] Elle n’aime tant les lettres (« Je lirais la malle des courriers », disait-elle,) et elle n’y a si bien réussi que parce que les lettres sont des conversations fixées. […] » Il faut lire cela.
, impossible à jouer, Charles de Rémusat — à ce qu’il paraît — le lisait parfois, de son vivant, aux personnes dévouées d’esprit et d’oreille à ses œuvres. […] Et, puisqu’il lisait trissotinement son drame dans les salons de son faubourg, un bas-bleu qui n’y a fait très certainement rougir personne ! […] Pour celui-ci, en effet, il lui suffira de l’abandonner à l’ennui qu’il inspire et qui doit accabler ceux qui liront son triste drame.
Gustave D’Alaux20 I L’Histoire a quelquefois l’air de mystifier ceux qui la lisent. […] Qui croirait, en lisant cette préface, que l’homme qui l’a écrite pût peindre Soulouque et sa race avec cette énergie de ressemblance, ou, ayant lu le livre, que l’auteur de ce livre en eût pu penser la préface ? […] l’histoire du nègre, pour qui sait la lire, a un sens plus profond que toutes ces imitations dont la civilisation ne sortira jamais, parce qu’elle n’en est jamais sortie !
Seront-ils lus ? […] IV Mais tous ceux-là, en petit nombre maintenant, qui auront gardé un peu d’âme dans leur poitrine et un peu de Dieu dans leur âme, liront avec une saveur profonde la simple histoire du plus rare des poètes, qui, dans tout le cours de son livre, n’a pas l’apparence de se douter qu’il en est un. […] Avait-il lu complètement Rabelais et La Fontaine, si antipathiques à l’idéalité de son génie ?
Catulle Mendès a tant lu Victor Hugo ; il l’a évidemment tant aimé ; il s’est tellement imprégné, imbibé, pénétré de sa substance, qu’il est devenu presque un avec lui, et qu’il a fini par lui ressembler comme les Ménechmes se ressemblent. […] Mendès, et quand il les lut, il dut se tâter comme Sosie pour savoir si réellement elles n’étaient pas de lui, et s’il ne les avait pas composées dans quelque somnambulisme intellectuel ? […] Il serait curieux de savoir quelles furent les sensations de Victor Hugo quand il lut, pour la première fois, ces Contes épiques, que La Légende des siècles avait inspirés.
Eugène Sue lu de tous les cochers et de tous les ouvriers de son temps avec ivresse, et dans l’ivresse, et pour des raisons qui n’ont rien de littéraire, à coup sûr. […] Lisez ses romans de cette époque ! […] Au bout seulement de quelques années, les livres mal écrits ne se lisent plus et sont oubliés.