Je ne nomme point les phénomènes littéraires, en vue desquels nous devons étudier tous les autres ; cependant il y aura lieu de réserver une place à certaines institutions ou à certains groupements ayant un caractère spécialement littéraire.
Quand la peste est répandue dans un pays, on forme un cordon de troupes, afin que rien ne sorte des lieux infectés, & ne vienne corrompre ceux qui n’ont pas encore senti la contagion.
Il y a aussi la vapeur, mais la vapeur claire des lieux frais, renfermés et blancs.
S’ils quittent la seigneurie, il peut les poursuivre en tout lieu et les ramener de force. […] Adolescents, ils sont pendant plusieurs années domestiques dans son manoir ; cultivateurs, ils lui doivent des corvées, en certains lieux trois par semaine. […] Çà et là, dans les Mémoires, on voit passer quelques-unes de ces étranges figures surannées, par exemple, en Bourgogne, « des gentilshommes chasseurs, en guêtres, en souliers ferrés, portant sous le bras une vieille épée rouillée, mourant de faim et refusant de travailler64 » ; ailleurs, « M. de Pérignan, en habit, perruque et figure rousses, faisant travailler à des murs de pierre sèche dans sa terre, et s’enivrant avec le maréchal-ferrant du lieu » ; parent du cardinal Fleury, on fit de lui le premier duc de Fleury Tout contribue à cette décadence, la loi, les mœurs, et d’abord le droit d’aînesse. […] Il n’est pas rare d’en trouver jusqu’à dix dans un arrondissement qui pourrait à peine en faire vivre deux, s’ils se renfermaient dans les limites de leurs charges. » Aussi « sont-ils en même temps juges, procureurs, procureurs fiscaux, greffiers, notaires », chacun dans un lieu différent, chacun exerçant dans plusieurs seigneuries et sous divers titres, tous ambulants, tous s’entendant comme fripons en foire, et se réunissant au cabaret pour y instrumenter, plaider et juger. […] Un jour, le cardinal, montrant à des hôtes son palais qu’il venait d’achever, les conduisit au fond d’un corridor où il avait installé des lieux à l’anglaise, chose nouvelle alors.
Il fallait quatorze siècles pour que le génie latin, après avoir changé de lieu, de religion et de langue, se retrouvât à Rome, à Florence et à Ferrare, sous les Médicis, dans le Dante, dans Pétrarque, dans le Tasse, dans l’Arioste, ces quatre grands ressusciteurs de l’Italie. […] L’ Aufide mugissant et perfide était un torrent qui écumait au fond de la vallée de Venouse ; Horace lui a donné la célébrité d’un fleuve : les grands hommes sont la bonne fortune des lieux où ils jouent dans leur berceau, les poètes surtout sont l’illustration de leur paysage. […] On fit des pèlerinages d’amitié et de poésie aux lieux que son séjour avait pour ainsi dire consacrés. […] Sa maison d’Ustica dans la Sabine, sa chère fontaine de Blandusie, près de la petite villa napolitaine de Venouse, le lieu de sa naissance, aujourd’hui Palazzo, restèrent éternellement l’objet du même pèlerinage et du même culte de la mémoire. L’homme illustre, surtout l’homme aimé, laisse comme le cygne une plume de ses ailes et une harmonie de son chant suprême aux lieux où il s’est abattu.
Cette scène d’évanouissement, qui se renouvelait presque tous les soirs de grande réunion à Clichy, à une heure avancée de la soirée, n’était pas une coquetterie de la jeune maîtresse de ce beau lieu, c’était un prétexte suscité par la mère et par le mari de madame Récamier pour dérober la jeune femme à l’empressement insatiable de la foule importune de ses admirateurs ; elle était trop naïve pour jouer d’elle-même ces agaceries, mais il fallait l’emporter sur les bras des familiers de la maison pour laisser le voile de ses rideaux entre elle et un monde insatiable de tant d’attraits. […] On voulait être sûr qu’aucun profane ou qu’aucun incrédule au génie du lieu ne se glisserait dans le cénacle pour en troubler ou pour en divulguer les mystères. […] C’était un lieu d’asile inviolable à la colère des opinions au milieu de Paris. […] C’est l’heure et le lieu des confidences, des silences ou des soupirs échappés du cœur ; ce n’est pas l’heure des vaniteuses improvisations de l’esprit. […] XXXII Jusqu’à son mariage elle n’avait été qu’entrevue ; devenue femme quoique encore enfant, maîtresse adorée de la maison alors la plus opulente de Paris, elle commença à éblouir, non pas les salons d’une capitale (la Terreur et la Mort les avaient tous fermés jusqu’au 9 thermidor), mais la foule, qui se pressait sur ses pas dans les lieux publics.
cette dernière prière d’un homme qui avait joué un si grand rôle en France, demandant pour toute grâce le retour de ses enfants dans le lieu de leur naissance et l’oubli des imprudences qu’une fille, jeune encore alors, avait pu commettre, tout me semblait irrésistible ; et, bien que je connusse le caractère de l’homme, il m’arriva ce qui, je crois, est dans la nature de ceux qui désirent ardemment la cessation d’une grande peine : j’espérai contre toute espérance. […] « Déchirée la veille par l’incertitude, je parcourus, dit-elle, le parc de Coppet ; je m’assis dans tous les lieux où mon père avait coutume de se reposer pour contempler la nature ; je revis ces mêmes beautés des ondes et de la verdure que nous avions souvent admirées ensemble ; je leur dis adieu en me recommandant à leur douce influence. Le monument qui renferme les cendres de mon père et de ma mère, et dans lequel, si le bon Dieu le permet, les miennes doivent être déposées, était une des principales causes de mes regrets en m’éloignant des lieux que j’habitais ; mais je trouvais presque toujours, en m’en approchant, une sorte de force qui me semblait venir d’en haut. […] La poésie lyrique ne raconte rien, ne s’astreint en rien à la succession des temps, ni aux limites des lieux ; elle plane sur les pays et sur les siècles ; elle donne de la durée à ce moment sublime pendant lequel l’homme s’élève au-dessus des peines et des plaisirs de la vie. […] Mon âme était aussi remplie de pressentiments lorsque, le jour de mes noces, j’amenai dans ces lieux ma timide compagne ; content, mais sérieux, je lui montrai de loin la borne de nos champs, la tour de l’église et l’habitation du pasteur où nous avons éprouvé tant de biens et de maux.
Il affecte pour vous une fausse douceur, Et par là, de son fiel colorant la noirceur, Tantôt à cette peine il vous peint redoutable, Tantôt, voyant pour l’or sa soif insatiable, Il lui feint qu’en un lieu, que vous seul connaissez, Vous cachez des trésors par David amassés. […] Je l’observais hier, et je voyais ses yeux Lancer sur le lieu saint des regards furieux ; Comme si dans le fond de ce vaste édifice Dieu cachait un vengeur armé pour son supplice. […] « Reine, sors, a-t-il dit, de ce lieu redoutable, D’où te bannit ton sexe et ton impiété. […] Mais tout ce peuple enfermé dans ce lieu, À quoi s’occupe-t-il ? […] Quel est dans le lieu saint ce pontife égorgé ?
» C’est une question, qu’il y aurait lieu de discuter, et, dans cette sorte de stupeur admirative que nos dilettantes éprouvent ou feignent d’éprouver en présence d’un César Borgia, — lequel peut-être, en sa qualité de fils de son père, était espagnol autant qu’italien, — on trouverait qu’il entre bien de l’ingénuité. […] Il en résulte qu’au lieu que les Italiens s’égarent déjà, pour achever bientôt de s’y perdre, dans les subtilités de l’alexandrinisme, et, — selon l’expression de l’un des meilleurs historiens de leur littérature [Cf. […] Et comme l’homme enfin, en tout temps, à tout âge, en tous lieux, est ce qu’il y a de plus intéressant, de plus instructif et de plus utile à connaître pour l’homme, l’œuvre littéraire nous apparaît désormais fondée sur l’Observation psychologique et morale. […] Étant sociale, elle sera générale, ce qui signifie qu’elle ne sera pas, ou rarement, l’expression de la personnalité de l’écrivain, mais plutôt celle des rapports de l’individu avec les exigences d’une humanité idéale, analogue ou identique à elle-même en tout temps, en tous lieux, éternellement subsistante, pour ainsi parler, et à ce titre, définie par des caractères immuables. […] Et enfin cette littérature ne pourra manquer d’attacher une grande importance aux agréments de la forme, en premier lieu parce qu’il faudra qu’elle plaise pour persuader ; en second lieu, parce que la forme seule est capable de sauver les généralités du « lieu commun », qui en est l’écueil ; et en troisième lieu, parce qu’elle a déjà refait sa « Poétique » et sa « Rhétorique » sur le modèle du latin.