. — Les Libres Paroles (1847). — Les Chroniques rimées (1850). — Cartes sur table, nouvelles (1855). — La Païenne, roman (1857). — La Sibylle, roman (1859). — Gaston, roman (1860). — Les Poètes (1862). — Le Secret de Polichinelle, roman (1862). […] Laurent Pichat s’est fait remarquer par ses Libres Paroles (1847), où il a trouvé, pour l’expression de ses sentiments, de ses doutes, de ses interrogations généreuses, plus d’une action et d’un cri où l’on surprend comme un écho de Byron. […] Poète de combat, il l’est dans la poésie mâle et sobre, élégante et lamartinienne des Libres Paroles, des Chroniques rimées, d’Avant le jour.
Saint-René Taillandier ne cesse pas de nous répéter sur un ton qu’on voudrait plus varié : « Soyons religieux, mais surtout soyons libres, libres même de n’être pas religieux du tout, si cela nous plaît. » Car avec la liberté telle que la conçoit ce libéral immense, la religion ne peut plus être que la liberté de n’avoir pas de religion. […] Taillandier, c’est son christianisme libre, lequel ne lui a pas coûté grand’peine, puisqu’il n’est, dans une tête ouverte à toutes les choses vagues, que la notion confuse d’une liberté sans limites. […] Taillandier, ce tendre Fénelon de la religion libre de l’infini, M. […] Quinet, le révolutionnaire, n’est pas seulement religieux, lui, il est patricien et sacerdotal, ce qui, par parenthèse, n’est pas une injure, comme vous pourriez le croire, sous la plume du dévot libre au christianisme de l’infini !
Ils rendirent cependant service en réhabilitant le vers libre et en achevant de rompre une tradition trop rigidement asservie à la rhétorique. […] D’ailleurs, le vers libre de La Fontaine, par exemple, est aussi classique que toutes les autres formes de vers. […] Ils n’ont pas discerné assez clairement que le vers libre n’existe pas en réalité en lui-même, en tant que vers libre, mais que les vers ne peuvent être des vers libres que par rapport à un ensemble. […] Si on lit une belle page en vers libres de Verhaeren par exemple, qui est un vrai poète, ou de M. […] D’autres mouvements de l’âme plus spontanés, moins réfléchis, garderont leur spontanéité et leur naturel en s’énonçant en vers libres.
Il passe ici pour un libre penseur, et ce qui est pis, à mon sens, pour un homme dont le cœur ne sent pas ce qu’il dit dans ses poëmes à la louange de la vertu et de la gloire. […] Malgré l’élégance habile et l’harmonie de sa diction, le client du prince Eugène, le commensal de l’aventureux comte de Bonneval, libre penseur à Vienne et dévot correspondant de Rollin, n’avait pas dans ses vers la flamme durable du génie plus que celle de la foi. […] C’est là le titre de gloire de Voltaire dans sa prose, et dans cette partie de ses poésies que le sujet, le temps, la libre humeur du peintre, pouvaient rendre quelque peu prosaïques, sans les laisser moins originales. […] Bientôt, disais-je, la sagesse fera pénétrer ses leçons dans les humbles cabanes de ceux qui travaillent et gémissent ; et, conquérante par l’exemple de son bonheur, la France forcera les nations d’être libres, jusqu’à ce que l’amour et la joie paraissent à l’entour et nomment la terre leur domaine. […] Est-ce de te mêler aux rois dans l’abjecte convoitise du pouvoir, d’aboyer à la même chasse et de partager la proie, de profaner le sanctuaire de la liberté en y recélant les dépouilles arrachées à des hommes libres, et ces hommes, de les tenter, puis de les trahir ?
Examinons donc quel style doit convenir à des écrivains philosophes, et chez une nation libre. […] Le talent d’écrire peut devenir l’une des puissances d’un état libre. […] Ce style de l’âme, si je puis m’exprimer ainsi, est un des premiers moyens de l’autorité dans un gouvernement libre. […] Que de vertus, en effet, l’amour d’une nation libre pour son premier magistrat ne suppose-t-il pas ! […] Les gouvernements libres sont appelés sans cesse, par la forme même de leurs institutions, à développer et à commenter les motifs de leurs résolutions.
Sans le voltairianisme et la libre pensée, peut-être même les plus badauds parmi les admirateurs à fond de train du Roi Voltaire ne s’abuseraient pas complètement sur le compte de ce caméléon moral, âme desséchée, jalouse de gloire, qui cracha sur la figure de quiconque le suivit ou le précéda, et qui se serait pris en exécration s’il se fût rencontré sur son propre chemin lui-même ; lâche pour tout braver, brave au milieu des lâches, grand dans les petites questions, petit dans les grandes ; qui réduisit tout à rien pour être quelque chose, et qui grimpa, comme un écureuil, jusqu’à la gloire, en passant par tous les degrés du mépris ! […] il a créé la libre pensée, et voilà encore un troupeau. Ce joujou bruyant et dont on ne fait rien qu’un indécent usage, la libre pensée, qu’on nous donne pour une philosophie et qui n’est le plus souvent qu’une lassitude anticipée d’une réflexion éteinte, la libre pensée, cette ennemie de la pensée vraie, qu’elle repousse parce que la pensée vraie oblige, comme la noblesse, et dont elle se débarrasse dans le sérail des sept péchés capitaux, voilà surtout l’œuvre de Voltaire : Hæc facit otia Voltarius !
Dans ce cas le peuple est libre, mais l’homme ne l’est pas. C’est un peuple libre composé d’esclaves. […] Ceci est la pierre angulaire même de la constitution d’un peuple libre. […] La liberté c’est pour lui un peuple libre, et il est convaincu que dans un peuple libre le citoyen ne peut pas n’être pas libre absolument. […] Ainsi, par exemple, le peuple anglais se croit libre.
C’est l’indépendance de l’individu dans sa vie privée ; c’est la libre disposition de sa personne et de ses biens ; c’est la liberté des relations, des faits et gestes de chaque jour : c’est le pouvoir de vivre et d’agir à sa guise sans être en butte à une inquisition perpétuelle, à une police minutieuse et tyrannique de la part de l’autorité publique. […] Un régime libre, d’après cette conception dont Stuart Mill donne assez bien la formule, est un régime qui permet à chaque citoyen de s’occuper des questions politiques et sociales qui l’intéressent et sur lesquelles il est suffisamment compétent. Cet individualisme admet l’État ; mais il compte surtout sur les associations libres. […] Ils ont confondu les droits de l’homme et le droit du peuple ; les droits de l’homme, de l’individu, et le droit du peuple, de la nation, de la communauté des citoyens libres… Mais les droits de l’homme et le droit du peuple ne sont point la même chose, à tel point même que le droit du peuple peut être en conflit avec les droits de l’homme. […] Parlant d’un récent « Congrès de la libre pensée », un publiciste écrivait récemment : « Ces mots hurlent de se trouver ensemble.
. — Premiers poèmes, avec une préface sur le vers libre (1897). — Le Cirque solaire (1898). — Le Conte de l’Or et du Silence (1898). — Les Petites Âmes pressées (1898). — Les Fleurs de la Passion (1900) […] Gustave Kahn innova une strophe ondoyante et libre dont les vers appuyés sur des syllabes toniques créaient presque en sa perfection la reforme attendue ; il ne leur manquait qu’un peu de force rythmique à telles places et une harmonie sonore plus ferme et plus continue que remplaçait d’ailleurs une heureuse harmonie de tons lumineux. […] Gustave Kahn est, avant qui que ce soit, le premier initiateur du vers libre. […] D’ailleurs, une page consacrée à des recueils tels que Chansons d’amant, Domaine de fée, la Pluie et le Beau Temps, le Livre d’images, ne nous dispenserait pas d’une étude sur le prosodiste, celui qui, après Jules Laforgue, tenta de régénérer, en faveur du vers libre, notre poétique si affaiblie aux mains des suprêmes parnassiens.