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257. (1929) Amiel ou la part du rêve

Même celui qui a goûté de la liberté n’est libre que par intervalles et par élans. […] On songe aux propos de la Libre Parole sur M.  […] Philine est veuve, elle est libre, elle voyage. […] Esprits mutinés, ils se prennent pour des esprits libres. […] Panneton, par la Libre Parole !

258. (1896) Essai sur le naturisme pp. 13-150

Le vers libre ou polymorphe apparaissait. […] Dans ses commentaires, les misérables questions de linguistique ne le préoccupèrent guère pour la justification du vers libre. […] À un Homme libre convient un rythme libre, voilà ce que proclame M.  […] Et puis, est-ce bien le vers libre que défend si magnifiquement ce jeune poète ? […] Pourtant le vers est-il libre ou non ?

259. (1894) Textes critiques

L’être qui naît donne à son corps germe sa forme parfaite, baudruche de son âme, la sphère : puis le voilà parti en différenciations rameuses et compliquées, jusqu’à ce que, le beau ressouvenu, il libre derechef en sa primordiale (ou une pareille) sphéricité. […] — La plus prostituée est la plus libre et la plus belle, dit le septième monstre. — Il y a deux sortes d’hommes, les hommes libres et les autres, interjeta le onzième. […] Mais il y a mieux. — Il y a les gens qui se remuent depuis dix ans en faveur du vers libre et qui admettent pour champion Catulle Mendès parnassien cinquantenaire. […]   TRIBUNE LIBRE Nous recevons la lettre ci-dessous : Monsieur, Je viens d’avoir seulement connaissance d’une petite note de votre revue et qui serait amusante si elle était juste. […] Fargue rend compte en quelques lignes de son travail dans : Essais d’art libre de janvier 1894 pp. 286 — 287 (NdE) 2.

260. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. Joubert »

Au lieu d’avoir affaire à des esprits libres, dégagés, attentifs, qui s’intéressent, qui inspirent, qui contiennent, que rencontre-t-on ? […] La classe libre d’intelligences actives et vacantes qui se sont succédé dans la société française à côté de la littérature qu’elles soutenaient, qu’elles encadraient, et que, jusqu’à un certain point, elles formaient ; cette dynastie flottante d’esprits délicats et vifs aujourd’hui perdus, qui à leur manière ont régné, mais dont le propre est de ne pas laisser de nom, se résume très-bien pour nous dans un homme et peut s’appeler M.  […] Après avoir, de là, redoublé et professé même quelque temps aux Doctrinaires de Toulouse, il vint jeune et libre à Paris, y connut presque d’abord Fontanes dès les années 1779, 1780 ; une pièce de vers qu’il avait lue, un article de journal qu’il avait écrit, amenèrent entre eux la première rencontre qui fut aussitôt l’intimité : il avait alors vingt-cinq ans, à peu près trois ans de plus que son ami. […] « L’ordre littéraire et poétique tient à la succession naturelle et libre des mouvements ; il faut qu’il y ait entre les parties d’un ouvrage de l’harmonie et des rapports, que tout s’y tienne et que rien ne soit cloué. » Maintenant, dans la plupart des ouvrages, les parties ne se tiennent guère ; en revanche (je parle des meilleurs), ce ne sont que clous martelés et rivés, à tête d’or.

261. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

Humanisme, hellénisme : libres études et raison indépendante. […] Ce Béda était un enragé Picard, que Bayle appelle « le plus grand clabaudeur » de son temps : préchant, écrivant, dénonçant, calomniant, injuriant, déchaîné aujourd’hui contre Érasme, demain contre Le Fèvre d’Étaples, un autre jour contre Louis de Berquin, qu’il fit enfin brûler, il ne laissa point de répit aux libres esprits, jusqu’à ce que ses fureurs, atteignant la propre sœur du roi, le firent enfermer au Mont-Saint-Michel, où il mourut. […] De là son mysticisme : elle aime Dieu passionnément, d’une libre et vive tendresse qui déborde hors de tous les cadres artificiels des idées. […] Elle n’échappe pas au galimatias mystique : mais, avec un ferme jugement pratique et moral, elle fixe la limite au libre développement de l’individu.

262. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

L’héroïsme cornélien n’est pas autre chose que l’exaltation de la volonté, donnée comme souverainement libre, et souverainement puissante. Il n’est rien que les héros cornéliens affirment plus fréquemment, ni plus fortement que leur volonté, claire, immuable, libre, toute-puissante. […] Le Cid tuant le père de Chimène, Chimène demandant la tête du Cid, Pauline aimant Sévère, le lui disant et lui montrant en même temps qu’il n’a rien à espérer, Sévère s’efforçant de sauver Polyeucte dont la mort rendrait libre la femme qu’il aime : autant d’exemples et de triomphes de la volonté. […] Il ne crée pas, avec les mots, les images, les harmonies de son vers, une sorte d’atmosphère poétique où vivront ses héros ; au contraire, il dessine la courbe de leur effort sur un fond neutre, qui laisse la pensée libre, et ne dérobe aucune partie de l’attention.

263. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre douzième. »

Philosophe plus libre que La Rochefoucauld et Pascal, il n’est pas enchaîné à son passé comme le premier, ni, comme le second, tiraillé entre le doute et la foi. […] On résiste aux Maximes et aux Pensées comme à l’autorité d’une raison individuelle, aigrie par des circonstances personnelles à l’auteur ; mais on reçoit volontiers les leçons de la Bruyère, parce que sa raison est libre de ressentiments et de souffrances, et que, comme il le dit si délicatement, il ne fait que rendre au public ce que le public lui a prêté. […] Philosophe, écrivain satirique, moraliste chrétien, esprit mordant, libre, d’une indépendance qui ne fléchit que sous le devoir il est tour à tour sévère jusqu’à une certaine amertume et enjoué jusqu’au caprice, indifférent aujourd’hui pour ce qui l’irritait hier ; ici tranchant et dogmatique, là laissant voir ses propres doutes et s’y reposant. […] La Bruyère les a traités fort mal. « Ce sont, dit-il, de vieux corbeaux qui croassent autour de ceux qui, d’un vol libre et d’une plume légère, se sont élevés à quelque gloire par leurs écrits111. » Ils n’en ont pas moins touché le point faible, et ils n’ont fait que dire par malignité ce que Boileau disait avec la réserve de l’estime.

264. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

Tel est ce poème d’amour libre et charmant, personnel, réaliste, plein de délicats détails visibles et perçus, libre de la rhétorique déclamation de Musset, de la trop pâle mélancolie de Lamartine, mais vif, tendre, amer, violent, sardonique et emporté, le plus bel effort de la lyre allemande. […] Tous les hommes sont juifs ou hellènes ont des âmes ascétiques, spiritualistes, iconoclastes ou joyeuses, réalistes et aimant fièrement la vie. » Le paganisme grec lui apparaissait comme une religion gaie de gens sains et libres. […] L’impertinence de sa jeunesse, l’aptitude à jouir, la liberté de toute souffrance, cette vie heureuse et libre dont son paganisme était le symbole, lui échappaient.

265. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre II : De la méthode expérimentale en physiologie »

Nous parlons de l’homme libre ; mais la liberté, j’entends la liberté morale, peut-elle subsister, si l’on représente la vie, ainsi que le fait M.  […] Or, on conviendra aisément que, si les actions de l’âme sont gouvernées par les mêmes lois que la chute des pierres, on ne voit guère par où elles mériteraient d’être appelées libres. […] Claude Bernard, au domaine des causes occultes et des causes premières, peut s’entendre sans doute dans un bon sens ; mais je fais observer que les causes efficientes des phénomènes physiques sont aussi des causes occultes, dont le mode d’action interne nous est inconnu, et cependant nous ne supposons pas que ces causes soient libres. Il est vrai que, si l’on remonte jusqu’à la cause créatrice, jusqu’à la cause suprême, on doit croire que tous les phénomènes de la nature sont les produits d’une cause libre ; mais ce n’est pas de celle-là que nous parlons, ce n’est pas de la liberté de Dieu qu’il s’agit, c’est de la mienne, de la vôtre, de celle des autres hommes : il s’agit en un mot de la liberté d’une cause seconde appelée l’homme, et si cette cause seconde est assimilée aux autres causes qui agissent dans la nature, on ne voit plus à quels signes et à quelles conditions se manifesterait sa liberté.

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