Un tel Livre devoit être accueilli par les esprits éclairés & par les honnêtes gens ; aussi tous les Lecteurs sensés en ont-ils fait cas, & le nombre des Editions qu’il a eu en prouveroit le mérite, quand même la tournure, l’invention & le style ne le rendroient pas intéressant.
Pour y parvenir, il doit plaire, il doit prouver, il doit toucher ; car il ne peut rien obtenir de l’Auditeur ou du Lecteur, que par l’art de s’attirer sa bienveillance par la force des raisons, & par le trouble où il le jette : le dernier point, le plus difficile sans doute, mais le plus infaillible, & sans lequel il n’y a point de véritable éloquence évangélique, est précisément celui qui nous paroît manquer à M. l’Abbé Poule.
Cette affectation ôte au Lecteur le seul plaisir qui puisse le captiver, celui du naturel & de la variété.
L’Art de vérifier les dattes est d’un prix qui effraie les lecteurs peu accommodés des biens de la fortune.
Le lecteur moderne est un enfant : il faut lui couper ses romans par feuilletons, pour qu’il consente à prendre sa nourriture intellectuelle.
Comme amateur des vieux livres, on peut souffrir de cette divulgation des choses rares ; comme partie du public et comme lecteur du commun, on ne saurait s’en plaindre. […] Feugère et en y applaudissant volontiers dans son ensemble, il a laissé percer un regret : Pourtant, bibliographiquement parlant, dit-il, je suis un peu blessé de cette sorte de profanation qui consiste à jeter à profusion à la multitude ce qui, jusque-là, avait été le partage de quelques lecteurs d’élite. […] Payen est venu payer tribut, à son tour, à cette noble mémoire, et lui convier des lecteurs.
Se peut-il que nous, lecteurs et public, nous soyons si froids et si patients dans notre désir, et que nous trouvions qu’il n’est pas temps enfin de connaître, après cinquante ans d’attente, et d’écouter dans toute son ampleur et sa fécondité la conversation à cœur ouvert de deux grands poëtes, de deux grands esprits46 ? […] Aujourd’hui nous lui devons une traduction fort bonne des Entretiens de Gœthe et d’Eckermann mais cette traduction, qu’il avait faite au complet, a été abrégée, taillée, — mise en coupe comme une forêt trop épaisse, — par les éditeurs, gens d’esprit et avisés, qui ont dû se soucier avant tout du succès auprès des lecteurs, et du goût français si aisé à dégoûter. […] N’oublions pas sa belle-fille, Mme de Gœthe, Ottilie : elle lui sert volontiers de lectrice ; elle a fondé un Journal polyglotte à Weimar, le Chaos, où toute la société weimarienne écrit ; les jeunes gens anglais ou français qui y séjournent, surtout les dames, tout ce monde collabore et babille dans cette Babel, chacun dans sa langue.
pourquoi cette jeune fille enlevée par la mort à vingt ans, et qui est là pour simuler l’élégie, pour émouvoir et surprendre la sensibilité des lecteurs et surtout des lectrices ? […] Je donne l’interprétation qui me semble la plus probable, et j’épargne aux lecteurs en tout ceci les frais du commentaire.
Plusieurs écrivains, de ceux qui sont chaque jour sur la brèche, ont donc senti le besoin de varier et d’accroître leurs moyens, de perfectionner leurs instruments et, si j’osais dire, leur outillage, afin de pouvoir lutter avec les autres arts rivaux et pour satisfaire à cette exigence de plus en plus positive des lecteurs qui veulent en tout des résultats. […] Eugène Véron (par des articles récents de la Revue de l’Instruction publique)… ; j’y suis moi-même entré depuis bien des années, et en affichant si peu d’intention systématique que beaucoup de mes lecteurs ou de mes critiques ont supposé que j’allais purement au hasard et selon ma fantaisie. […] Deschanel est en grande partie la mienne : prétendre qu’un lecteur ne doit être, à l’égard des livres anciens ou nouveaux, que comme le convive pour le fruit qu’on lui offre et qu’il trouve bon ou mauvais, qu’il savoure ou qu’il rejette sans en connaître la nature ni la provenance, c’est trop nous traiter en gens paresseux et délicats.