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479. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — III » pp. 476-491

La religion romancée de Mme de Genlis révoltait la religion positive et vraie de Mme de Créqui ; ses jugements littéraires, dictés par la prévention et arrangés selon le thème du moment, étonnaient le goût ferme et sain de la marquise, et ce système d’éducation tout échelonné en jeux et en plaisirs n’offensait pas moins sa solidité. […] Le salon de Mme de Lambert, la petite cour de Sceaux, un peu plus tard l’hôtel de Brancas, en tenaient école à des degrés différents, et l’on y voyait comme des jeux d’escrime.

480. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Tallemant et Bussy ou le médisant bourgeois et le médisant de qualité » pp. 172-188

Le roi passait les étés à la frontière, où l’on se battait rudement ; il revenait ensuite d’ordinaire passer les hivers à Paris, et tous les divertissements étaient alors de saison, jeu, billard, paume, chasse, comédie, mascarade, loterie, tout ce qu’engendre une entière oisiveté, mais surtout l’amour. […] Voilà le cadre de Tallemant et où il a tout son jeu.

481. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — II » pp. 231-245

À l’instant, toutes les énigmes qui l’avaient si fort inquiété s’éclaircirent à son esprit : le cours des cieux, la magnificence des astres, la parure de la terre, la succession des êtres, les rapports de convenance et d’utilité qu’il remarquait entre eux, le mystère de l’organisation, celui de la pensée, en un mot le jeu de la machine entière, tout devint pour lui possible à concevoir comme l’ouvrage d’un Être puissant directeur de toutes choses ; et s’il lui restait quelques difficultés qu’il ne pût résoudre, leur solution lui paraissant plutôt au-dessus de son entendement que contraire à sa raison, il s’en fiait au sentiment intérieur qui lui parlait avec tant d’énergie en faveur de sa découverte, préférablement à quelques sophismes embarrassante qui ne tiraient leur force que de la faiblesse de son esprit. […] Tout devient affaire avec lui ; avec Voltaire tout était plaisanterie et jeu.

482. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir a l’histoire de mon temps. Par M. Guizot »

Les intérêts, c’est-à-dire les finances, l’industrie, les branches diverses de la fortune publique, leurs rapports, leur jeu mobile, leurs crises, le mécanisme et le thermomètre du crédit, les signes et pronostics qui en résultent à chaque instant, il les sait peu, il ne les sait guère plus que M.  […] Même pour les plus honnêtes gens, la politique n’est pas une œuvre de saints ; elle a des nécessités, des obscurités que, bon gré, mal gré, on accepte en les subissant ; elle suscite des passions, elle amène des occasions de complaisance pour soi-même auxquelles nul, je crois, s’il sonde bien son âme après l’épreuve, n’est sûr d’avoir complètement échappé ; et quiconque n’est pas décidé à porter sans trouble le poids de ces complications et de ces imperfections inhérentes à la vie publique la plus droite fera bien de se renfermer dans la via privée et dans la spéculation pure. » Quoi qu’il en soit, on vit là un de ces beaux duels où l’appétit des ambitions et la passion du jeu firent taire la prudence.

483. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’Impératrice Catherine II. Écrits par elle-même. »

Quand il en a assez de ses jeux de soldats, il joue aux poupées. […] Ajoutez à sa beauté ce trait distinctif qu’elle ne dit pas, d’être une brune aux yeux bleus, ou si ses yeux étaient noirs comme ses sourcils étaient bruns, de les avoir bigarrés du moins et susceptibles de teintes bleues sous les reflets et le jeu de la lumière.

484. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Il n’était pas de ces génies qui acceptent la force des choses comme solution commode ; il n’était pas du tout persuadé qu’une bataille de plus ou de moins, gagnée ou perdue deux mois auparavant, un ennemi de plus ou de moins, repoussé, tout cela revenait à peu près au même, que sa situation en 1815 était de prime abord comme désespérée, que les plus heureux efforts et la plus belle entrée de jeu n’auraient pu en réparer le vice radical ; que Waterloo même gagné n’eût été qu’un répit. […] Et dans ce tome vingtième que nous avons sous les yeux, si c’était l’heure de citer, nous aurions beau jeu.

485. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Leonora, belle, éblouissante, avide de sensations, ardente dans ses fantaisies, froide de cœur, n’a pas de peine à enlever le jeune et fragile artiste : ce n’est rien de lui avoir jeté son bouquet sur la scène, et son mouchoir par mé-garde avec le bouquet, comme dans un vrai délire d’enthousiasme, il faut voir comme ensuite, dans la visite qu’il lui fait, elle le pique au jeu, lui bat froid, le mortifie, lui tient la dragée haute, le tourne et le retourne à plaisir, comme elle fait tout, en un mot, pour le chauffer, l’enflammer ; elle lui met au cœur un de ces amours furieux, dévorants, à la Musset, qui vous tuent sur place, ou qui vous laissent, pour le restant de vos jours, n’en valant guère mieux. […] Je sais qu’il y a en tout ceci bien du jeu, que l’art est une chose fort différente de la nature, que ce qui s’appelle roman en particulier est fait pour plaire et amuser à tout prix, et le plus souvent moyennant illusion : je ne voudrais pourtant pas qu’on y mentît par trop, qu’on y donnât des idées par trop fausses et chimériques. et j’ai présent à l’esprit en ce moment la boutade d’un moraliste un peu misanthrope, qui écrivait pour lui seul après la lecture de quelqu’un de ces romans à la Sibylle ou à la Scudéry : « Quand je me reporte en idée aux débuts de l’espèce humaine sur cette terre, à cette longue vie sauvage dans les forêts, à ces siècles de misère et de dureté de l’âge de pierre qui précéda l’âge de bronze et l’âge même de fer ; quand je vois, avant l’arrivée même des Celtes, les habitants des Gaules, nos ancêtres les plus anciens, rabougris, affamés et anthropophages à leurs jours de fête le long des fleuves, dans le creux des rochers ou dans les rares clairières ; — puis, quand je me transporte à l’autre extrémité de la civilisation raffinée, dans le salon de l’hôtel de Rambouillet ou des précieuses spiritualistes de nos jours, chez Mme de Longneville ou chez Mme de…, où l’on parle comme si l’on était descendu de la race des anges, je me dis : L’humanité n’est qu’une parvenue qui rougit de ses origines et qui les renie.

486. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

Il n’eut, dans toute sa vie littéraire, qu’une heure de vrai talent ; c’est le jour où, piqué au jeu et piqué jusqu’au sang, traduit en personne sur le théâtre par Voltaire, et gêné d’ailleurs ou du moins contenu dans ses représailles par M. de Malesherbes, alors directeur de la Librairie, il rendit compte, après maint essai infructueux et maint remaniement obligé, de la première représentation de l’Écossaise. […] C’est un vilain jeu, et même en le jouant avec le plus grand sang-froid, Fréron perdit bien vite la partie.

487. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite et fin.) »

Le ministre de l’Instruction publique, M. de Salvandy, lui écrivit, tout électrisé, au sortir de la séance : « Monsieur, je double le prix… Je regrette de ne pouvoir mieux vous prouver l’estime que m’ont inspirée vos patriotiques vers : eux aussi semblent sculptés en granit. » Sur des sujets moins ambitieux et moins solennels, Boulay-Paty avait pendant des années remporté toutes les formes et les variétés de prix que l’Académie des Jeux floraux peut décerner : ces fleurs artificielles (souci, églantine, amarante, etc.), étaient rangées chez lui et conservées sous verre, chacune dans son bocal. […] Poëme-Épître, par Jacques Jasmin, maître ès Jeux floraux : Lou poèto del puple à moussu Renan, Agen ; août 1864.

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