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397. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVII. »

Il n’est pas sans intérêt cependant de le voir jeter encore quelque éclat poétique, quand il se reprend aux grands souvenirs qui avaient autrefois fait battre de nobles cœurs. […] À peine était-il né, et, rampant sur terre, avait-il jeté un faible cri, que dans son sein Calliope le reçut, et dépouilla pour la première fois le long deuil d’Orphée : Enfant, dit-elle, consacré désormais aux Muses, et bientôt supérieur aux poëtes antiques, ce ne sont ni les fleuves, ni les bêtes féroces, ni les forêts gétiques, que tu remueras de ta lyre ; mais les Sept Collines, le Tibre du dieu Mars, les chevaliers et le sénat vêtu de la pourpre, tu les entraîneras par l’éloquence de ton chant. » Le poëte alors rappelait ces premiers essais de Lucain qui lui valurent la jalousie de Néron, et ce poëme inachevé qui lui mérita la mort.

398. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

J’ai pris le deuil pour elle, quoiqu’à l’étranger ; distinction que j’ai toujours accordée aux dignes créatures qui sont mortes en couches de moi1055. » Il faut dire qu’en ce pays, les viveurs de ce temps jettent la chair humaine à la voirie. […] Il y a huit carrosses au mariage, chacun de quatre chevaux ; sir Charles est attentif pour les personnes âgées ; à table, les messieurs, une serviette sous le bras, servent chacun une dame ; la fiancée est toujours prête à s’évanouir ; il se jette à ses pieds dans toutes les formes. « Eh bien ! […] Dès l’abord, le surcroît de santé et d’impétuosité physique le jette dans la grosse débauche joviale, et la séve intempérante de la jeunesse bouillonne en lui jusque dans le mariage et dans l’âge mûr. […] Adam, donnent et reçoivent une infinité de horions ; les coups de bâton trottent ; on leur jette à la tête des poêlons pleins de sang de porc ; les chiens mettent leurs habits en pièces ; ils perdent leur cheval. […] La douleur, jointe au désappointement et au désespoir, me priva de ma raison et me jeta dans un délire de fureur pendant lequel j’arrachai la chair de mes os avec mes dents et je me lançai la tête contre le pavé. » En vain vous vous retournez du côté du héros pour vous reposer d’un tel spectacle.

399. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Mais, s’il n’avait pas jeté sa tête à la face de la révolution, bien certainement il y aurait jeté sa perruque ! […] Croirait-on que, dans ces Pensées, Diderot s’amuse à jeter l’oignon des Égyptiens à la tête de la religion chrétienne, comme un voyou jette une pomme cuite à la tête d’un saltimbanque ? […] Il se jeta dans cette mer de matérialisme comme Sapho dans une mer plus pure, et, comme elle, il y perdit sa lyre et s’y noya. […] Seulement, ce n’est pas la pitié qui l’y jette, mais c’est la justice qui l’y met. […] Son matérialisme, poétisé par une imagination qui jetait un réseau d’or sur sa fange, ne suffit plus aux besoins abjects des générations qui se sont appelées positives.

400. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

Un murmure d’indignation s’est élevé : Jeter du fromage ! […] Les commentateurs jettent en note en bas de la page : Essuyer la cervelle, locution forcée et vicieuse. […] Il l’a jetée tout d’une haleine avec une rapidité et un nerf de débit, qu’on ne saurait trop admirer. […] Ils ne sont fâcheux que parce que le hasard les jette à la traverse d’un rendez-vous d’amour. […] » Mme Arnould-Plessy, jette la phrase avec un ton de sécurité triomphante qui est vraiment admirable.

401. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome I pp. 5-537

Suivez cette fourmi tombée dans une rivière, et que sauve une colombe qui lui jette par charité un brin d’herbe dans l’eau : que dit le narrateur ? […] Les images locales, et l’imitation fidèle des mœurs leur servent d’ornements qui les ennoblissent, et qui jettent l’esprit des spectateurs dans une complète illusion. […] Un regard jeté sur les différences de ses productions ne sera pas tout à fait inutile. […] La majesté de cette fiction jette une lugubre tristesse sur le récit du malheur des nations vaincues par la liberté grecque. […] Corneille paraît : cet homme jette les yeux de son génie sur le théâtre de son siècle.

402. (1891) Esquisses contemporaines

C’est poser la question sur son véritable terrain et jeter un jour révélateur sur les mystères de cette destinée. […] Secrétan s’est jeté au-devant d’une aventure dont il n’avait pas suffisamment balancé les chances. […] Ce n’est là pourtant qu’un voile jeté sur une plaie et l’ordonnance convenue d’un grand désordre spirituel. […] Quoi d’étonnant à ce que, jetés aux idées comme les anciens martyrs étaient jetés aux bêtes, notre jeunesse en soit déchirée et que nous demeurions, pour le reste de nos jours, hésitants, sceptiques et raisonneurs ? […] Quand mon cœur palpitera, inquiet ou éperdu, je me jetterai sur le tien.

403. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Le maître les jette en pleine lumière. […] Jetez un coup d’œil sur ses travaux. […] Voici, par exemple, un trait bien jeté : Notre avare est amoureux. […] Mais son livre est jeté tout entier dans le moule du roman nouveau. […] Il se jeta au galop de leur côté et s’écria : — Français, vous fuyez !

404. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Nos manufactures ont été créées par enchantement ; elles ont jeté, un grand éclat, et puis elles se sont éteintes. […] Que de douleurs dans ce seul regard jeté sur la face des mers, et que le flentes qui en est l’effet, est triste ! […] Je ne sais si jamais homme a jeté des regards plus profonds sur la nature humaine. […] Il suffit de jeter les yeux sur les anciennes cartes des jésuites, pour se convaincre que je n’avance ici que la vérité. […] Mackenzie sortit de la rivière du Saumon, pour entrer dans le bras de mer où cette rivière se jette par plusieurs embouchures.

405. (1846) Études de littérature ancienne et étrangère

Il ne raconte rien ; il jette tout en dehors, et sur la scène : c’était la pratique de ses contemporains. […] Blâmé par les presbytériens, dont il avait jusque-là suivi d’assez près les maximes, il se jeta dans le parti des indépendants, et redoubla de haine contre tous les pouvoirs religieux et civils. […] Milton fut jeté, plus que jamais, dans les passions des indépendants ; et, en partageant leur fanatisme, il s’égara jusqu’à justifier leurs attentats. […] Il est certain que Milton, dont l’imagination était nourrie par une immense lecture, a jeté dans son poème une foule d’imitations et de souvenirs. […] L’inspiration s’élève et monte à son plus haut degré, en approchant d’Éden, où le beau feu du poète s’épure sans s’affaiblir, et jette une si douce lumière.

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