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313. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

S’il y a, en effet, des hommes historiques qui, à force de génie et d’héroïsme, de science religieuse et de science mondaine, semblent allumer le roman dans l’histoire, ce sont les Jésuites, à coup sûr. […] Les ennemis du catholicisme n’avaient pas manqué de voir le parti qu’ils pouvaient tirer, dans l’intérêt de leurs passions et de leurs idées, de ces hommes si romanesquement, si surnaturellement historiques, et dont la gloire trempait, par en bas, dans des calomnies qu’il s’agissait de faire monter toujours plus haut. […] Ce petit livre, gros comme rien et comme tout, atteindra plus sûrement que la vaste et inexorable histoire de Crétineau le but généreux que tous les deux se sont proposé : la réhabilitation historique de ces hommes, l’honneur de l’Église et du genre humain, qu’on traîne sur la claie depuis plus d’un siècle. […] Qui sait si cette mâle histoire sera plus qu’un roman religieux et historique pour ceux qui aimèrent et lurent longtemps Paul Féval, et qui regrettent le brillant et fécond romancier d’autrefois ? […] (historique aussi sous sa forme militante et enflammée) aurait pu d’ailleurs faire pressentir ; mais il n’y a vraiment que ceux qui liront ces Merveilles du Mont Saint-Michel, lesquelles forment une merveille de livre, qui la trouveront justifiée.

314. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Comme tous les Germains, les Francs avaient une poésie narrative, tantôt mythique, et tantôt historique, célébrant les dieux ou les anciens rois de la race : le Siegfrid des Nibelungen n’est autre que Sigofred, héros national des Francs, qui primitivement fut peut-être un dieu. […] Maîtres de la Gaule, et devenus chrétiens, les Francs oublièrent ou réduisirent en faits humains leurs mythes religieux : ils gardèrent leurs poèmes historiques et leur goût pour les récits épiques qui exaltent le courage et enchantent l’imagination. […] Une grande conception légendaire s’est condensée autour du mince noyau historique, autour de ce combat d’arrière-garde où périrent trois hommes de marque seulement, Roland, Anselme et Eggihard, le 15 août 778. […] Une fois surtout que l’histoire, la chronique en vers, puis en prose, s’est détachée du tronc de l’épopée, les chansons de geste se vident en quelque sorte de leur solide substance historique ; elles perdent de plus en plus leur caractère de commémoration héroïque du passé pour devenir l’expression vulgaire du présent. […] Geste (du latin gesta, pluriel neutre qui devint un substantif féminin) prit le sens d’Histoire : une Chanson de Geste est donc proprement une chanson qui a pour sujet des faits historiques (ou donnés pour tels).

315. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Première partie. De la parole et de la société » pp. 194-242

Nous n’avons pas besoin d’hypothèse là où il y a un fait constant et historique, là où la nature et la force des choses s’expliqueraient encore au défaut des faits, si les faits n’existaient pas. […] L’homme n’étant point un individu isolé et solitaire, et devant toujours vivre au sein de la société, il en résulte que sa puissance et ses développements possibles sont dans la société ; il en résulte encore que la société est souvent un supplément à l’imperfection de ses organes ; il en résulte enfin que la plupart des instincts mêmes de l’homme, si une telle expression est permise, sont placés hors de lui, se trouvent dans la société, ce qui nous ramène encore une fois à cette doctrine de la solidarité, doctrine qui serait ici susceptible de sortir de l’ordre des vérités spéculatives pour entrer dans l’ordre des vérités d’expérience, pour prendre rang parmi les faits historiques. […] La confusion des langues à la tour de Babel est un événement historique, ou, dans tous les cas, pour ceux qui repoussent l’autorité des livres saints, l’allégorie d’un événement historique. […] Si les métaphysiciens qui ont attribué à l’homme l’invention du langage avaient, je ne dis pas étudié, mais seulement jeté les yeux sur le peu de renseignements historiques qui existent, sur le très petit nombre de faits qui ont été rassemblés, ils auraient appris que leurs théories étaient contraires à tout ce que nous savons de certain ; ils auraient appris que toutes les doctrines de l’antiquité leur sont opposées ; ils auraient appris que plus l’on remonte haut, c’est-à-dire plus l’on s’approche du berceau au moins présumé de l’espèce humaine, plus l’on trouve les langues parfaites et fécondes.

316. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

J’insiste sur ce point parce que beaucoup de gens qui s’élèvent contre le système de la fatalité historique ont cru y voir la ruine de tout sentiment moral. […] Les résultats essentiels qui se tirent de ce mâle et simple récit sont passés dans le fond de leurs opinions et presque de leurs dogmes : cela fait partie de cet héritage commun sur lequel on vit et qu’on ne discute plus, et je doute fort qu’à mesure qu’on ira plus avant dans les voies modernes, et que par conséquent on trouvera plus simple et plus nécessaire ce qui s’est accompli, on en vienne jamais à remettre en cause les articles, même rigides, de ce jugement historique et à les casser. […] Les deux volumes de Notices et Mémoires historiques (1843) qui contiennent le tribut payé par M.Mignet à titre de membre et d’organe de deux académies, et particulièrement de celle des Sciences morales et politiques, demanderaient plus d’espace pour l’examen que nous ne pouvons leur en donner ici. […] Dans la collection des Documents historiques ; il y a jusqu’ici quatre volumes in-4° publiés (1835-1842) : l’ouvrage entier en aura probablement huit.

317. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre III. L’histoire réelle — Chacun remis à sa place »

Un nez retroussé est historique. […] L’effigie historique, ce ne sera plus l’homme roi, ce sera l’homme peuple. […] Ces renversements de rôles mettront dans leur jour vrai les personnages ; l’optique historique, renouvelée, rajustera l’ensemble de la civilisation, chaos encore aujourd’hui ; la perspective, cette justice faite par la géométrie, s’emparera du passé, faisant avancer tel plan, faisant reculer tel autre ; chacun reprendra sa stature réelle ; les coiffures de tiares et de couronnes n’ajouteront aux nains qu’un ridicule ; les agenouillements stupides s’évanouiront. […] De là un nouveau ciel historique au-dessus de nos têtes.

318. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — I. » pp. 180-197

Écrivain consciencieux, accoutumé aux travaux historiques, à ceux qui touchent à l’histoire de la religion en particulier, M.  […] Discussion peut-être est beaucoup dire ; il ne faut pas l’entendre du moins dans un sens historique ou philosophique ; il est évident, sur une foule de points qui y prêteraient, que M.  […] Mais ce qui pour moi n’est pas moins sûr, c’est que l’illustre biographe traite ici l’histoire littéraire absolument comme on traite l’histoire dans un roman historique : on invente légèrement le personnage là où le renseignement fait défaut et où l’intérêt dramatique l’exige.

319. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, — Antiquité et Moyen Âge — Par M. J. Zeller. »

Une princesse qui aime l’histoire, comme il sied à qui appartient de si près à la race historique la plus glorieuse, a désiré avoir chez elle un cours instructif, agréable, sérieux et familier, auquel une dizaine d’auditeurs seraient admis, et M.  […] On n’a jamais établi entre des notions historiques un enchaînement plus étroit et plus naturel. […] Cette seconde partie va être toute une explication historique, théorique, théologique et morale, du Christianisme : c’est le point de vue chrétien élevé sous lequel Bossuet concevait et ordonnait l’histoire.

320. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Gisors (1732-1758) : Étude historique, par M. Camille Rousset. »

Le comte de Gisors (1732-1758) : Étude historique, par M.  […] Camille Rousset, conservateur des archives historiques au Dépôt de la Guerre, a sous la main des trésors dont il sent le prix et dont le Gouvernement lui permet de n’être point avare. […] Lui aussi, Gisors comme Pallas, s’il avait un vieux père que sa mort navrait, du moins il n’avait plus de mère : …….Tuque, o sanctissima conjux, Felix morte tua, neque in hunc servata dolorem, s’écriait le vieil Évandre. — Malgré le caractère tout historique du livre de M. 

321. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre 2. La littérature militante »

Aux fantaisies historiques d’Hotman sur la royauté élective et la souveraineté des Etats, il opposa la théorie de la monarchie française, héréditaire, absolue, responsable envers Dieu du bonheur public ; avec une nette vue de l’état réel des choses, il vit dans l’Etat la famille agrandie, et dans l’absolutisme royal l’image amplifiée de la puissance paternelle. […] Recherches historiques sur la vie et les œuvres du chancelier de l’Hospital, in-8, Didot, 1861 ; M.  […] Revue historique, nov.

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