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998. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid. »

Desjardins n’a pas prétendu, dit-il, faire un ouvrage, mais un essai ; il a pris un sujet de thèse historique, comme il était naturel de le concevoir à un homme qui s’est particulièrement occupé de cet immense et incommensurable champ de l’histoire. […] Il s’est donc attaché à notre grand tragique, et il s’est complu à démontrer en lui une âme et une intelligence essentiellement historique, pleine de prévisions et de divinations : non qu’il ait jamais supposé que le vieux poète, en s’attaquant successivement aux divers points de l’histoire romaine pendant une si longue série de siècles, depuis Horace et la fondation de la République jusqu’à l’Empire d’Orient et aux invasions d’Attila, ait eu l’idée préconçue d’écrire un cours régulier d’histoire ; mais le critique était dans son droit et dans le vrai en faisant remarquer toutefois le singulier enchaînement qu’offre en ce sens l’œuvre dramatique de Corneille, et en relevant dans chacune de ses pièces historiques, même dans celles qu’on relit le moins et qu’on est dans l’habitude de dédaigner le plus, des passages étonnants, des pensées et des tirades dignes d’un esprit politique, véritablement romain. […] L’histoire de la Vie et des Ouvrages de Corneille, publiée de nouveau en 1855 par M.  […] Il en est du champ de l’humanité comme de celui de Sempach : « L’œuvre qu’un seul commence, un grand peuple l’achève. » Chacun des successeurs de Colomb a pu dire : « J’ai fait le même voyage. » C’est ce qui arriva à Rotrou après Corneille. » Pour apprécier ici la vérité et la beauté de l’image, il faut savoir son histoire suisse de l’époque héroïque et se rappeler ce qu’était et ce que fit ce Winkelried, lequel, à la journée de Sempach, s’avançant le premier contre le bataillon hérissé de fer des Autrichiens qu’on ne pouvait entamer, étendit les bras pour ramasser le plus de piques ennemies qu’il put contre sa poitrine, et qui, tombant transpercé, ménagea ainsi dans la redoutable phalange une trouée par où les Suisses vainqueurs pénétrèrent. […] Thiénot, professeur d’histoire au lycée Charlemagne.

999. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

Nous avons épuisé la liste des écrivains qui, dans cette période de l’histoire de l’esprit français et de notre langue, ont laissé des noms durables. […] A une première ébauche de l’esprit français ; à quelques poésies satiriques, inspirées par nos mœurs nationales ; à quelques récits clairs et intéressants des événements de notre histoire. […] l’histoire des sociétés humaines nous offre-t-elle donc des époques déshéritées où l’on vit sans idées générales, où celle qui les comprend toutes, l’idée de l’humanité, n’y est pas tout au moins une notion d’instinct ? […] Or l’histoire des sociétés humaines nous présente ce spectacle, dans la même nation, de générations qu’éclaire à peine la lueur de ce faible instinct, et de générations qui sont comme inondées de cette connaissance. […] Leroux de Lincy, dans la Collection des documents inédits relatifs à l’histoire de France.

1000. (1890) L’avenir de la science « V »

Appliquée à l’histoire de l’esprit humain, elle a détruit ces poétiques superstitions des individus privilégiés où se complaisait si fort l’admiration de la demi-science. […] L’histoire ancienne de l’Orient, dans ce qu’elle a de certain, pourrait se réduire à quelques pages ; si l’on ajoutait foi aux histoires hébraïques, arabes, persanes, grecques, etc., on aurait une bibliothèque. […] La critique mesquine et absolue vient toujours de ce qu’on envisage chaque développement de l’histoire philosophique en lui-même, et non au point de vue de l’humanité. […] Mais, du moment où des esprits moins sérieux y prennent le dessus, les scories de la superstition apparaissent, l’école tourne à la religion, n’excite plus que le rire et va mourir à Ménilmontant, au milieu des extravagances qui ferment l’histoire de toutes les sectes. […] Si vous élevez autel contre autel, on vous dira : « Nous aimons mieux les anciens ; ce n’est pas que nous y croyions davantage, mais enfin nos pères ont ainsi adoré. » On nous chargerait de l’éducation religieuse du peuple, que nous devrions commencer par son éducation dite profane, lui apprendre l’histoire, les sciences, les langues.

1001. (1890) L’avenir de la science « XVI »

Là est sa poésie ; là sont ses souvenirs héroïques ; là est sa législation, sa politique, sa morale ; là est son histoire ; là est sa philosophie, et sa science ; là, en un mot, est sa religion. […] S’il avait su l’histoire aussi bien que nous, il ne se fût pas permis cette belle fantaisie. […] L’histoire de l’être ne sera complète qu’au moment où la multiplicité sera toute convertie en unité et où, de tout ce qui est, sortira une résultante unique qui sera Dieu, comme dans l’homme l’âme est la résultante de tous les éléments qui le composent. […] À chacun son œuvre, telle est la loi de l’histoire. […] Voilà ce qui a succédé au développement littéraire le plus idéaliste que présente l’histoire de l’esprit humain, et cela non par une déduction logique ou une conséquence nécessaire, mais par contradiction réfléchie et en vertu de cette vue prédécidée : la grande école a été idéaliste ; nous allons réagir vers le réel.

1002. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le surintendant Fouquet. (Article Fouquet, dans l’Histoire de Colbert, par M. P. Clément.) 1846. » pp. 294-312

(Article Fouquet, dans l’Histoire de Colbert, par M.  […] Clément sur L’Administration de Colbert, ont parfaitement éclairci ce point d’histoire ; il n’est plus permis aujourd’hui d’être aveuglément du parti de Fouquet, à la suite de Mme de Sévigné, de Pellisson et de La Fontaine. […] Pellisson demande ce qu’on dirait si on lisait un jour dans une histoire, dans une de ces relations où l’on se plaît à faire remarquer combien les grands événements tiennent souvent à de petites causes : Cette année nous manquâmes deux grands succès, non pas tant faute d’argent que par quelques formalités des finances. […] Il paya cruellement cette erreur, il paya pour tous ; on put le plaindre d’avoir été si complètement immolé ; mais, au point de vue et au tribunal de l’histoire, il a mérité sa perte. […] Chéruel, qui a publié d’intéressantes études d’histoire d’après les Mémoires inédits de d’Ormesson (1850), et qui prépare un nouveau travail sur cette partie du règne de Louis XIV, a bien voulu me communiquer des analyses et des extraits qu’il en a faits pour lui-même.

1003. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Ils n’en composent pas cependant, mais la société dont ils écrivent l’histoire en est un quelquefois, et pour la peindre, il faut la respirer. […] Fervaques n’écrit pas les mémoires de son temps comme les ont écrits tant de faiseurs de mémoires et de conteurs d’anecdotes, que nous sommes bien heureux d’avoir pour nous faire comprendre la grande histoire, qui n’est pas toujours ce qu’elle paraît être dans les historiens solennels. La grande histoire s’éclaire par en dessous avec ces lampions que l’on appelle les historiettes. […] De toutes les poussières de l’histoire, cette faiseuse de poussières, il recueille celles qui se volatilisent le plus vite et le plus complètement s’évaporent. […] Conte ou chronique, histoire ou roman (et le roman, c’est de l’histoire encore), ont, l’un et l’autre, pour visée d’exprimer la réalité, et ici c’est la réalité contemporaine.

1004. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIV : De la méthode (Suite) »

Il a publié l’histoire d’une célèbre école philosophique ; c’est son seul ouvrage : le reste dort en lui, enseveli par les exigences du métier et par la volonté de trop bien faire. […] Cette hiérarchie de causes est le système d’une histoire. Toute histoire a le sien, et vous voyez comme on l’obtient. […] Supposez que ce travail soit fait pour tous les peuples et pour toute l’histoire, pour la psychologie, pour toutes les sciences morales, pour la zoologie, pour la physique, pour la chimie, pour l’astronomie. […] Elle vient d’un fait général semblable aux autres, loi génératrice d’où les autres se déduisent, de même que de la loi de l’attraction dérivent tous les phénomènes de la pesanteur, de même que de la loi des ondulations dérivent tous les phénomènes de la lumière, de même que de l’existence du type dérivent toutes les fonctions de l’animal, de même que de la faculté maîtresse d’un peuple dérivent toutes les parties de ses institutions et tous les événements de son histoire.

1005. (1714) Discours sur Homère pp. 1-137

On sçait la diverse oeconomie de l’histoire et du poëme, dans la peinture des hommes. […] Il commençoit à conter la chose en gros ; mais ce n’eût pas été satisfaction pour lui ; il reprend l’histoire dès son origine, la pare des ornemens du poëme, et la charge de digressions. […] Voilà l’histoire de la réputation des ouvrages d’Homere chez les grecs. […] On vient d’en voir l’histoire, et les différentes sortes de plaisir que les ouvrages d’Homere ont dû faire. […] Manque-t-elle de clarté dans les ouvrages dogmatiques et dans les histoires ?

1006. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 201

L’Explication historique des Fables, la Mythologie expliquée par l’Histoire, sont deux Ouvrages pleins d’érudition, de recherches, d’idées neuves, & écrits d’ailleurs avec autant d’élégance & de netteté, que ces sortes de dissertations en peuvent admettre. Il y a quelques erreurs, mais on doit les pardonner à un Auteur, le premier parmi nous qui ait eu le courage de défricher les champs les plus inconnus & les plus ingrats de l’Histoire mythologique.

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