Depuis un demi-siècle, il s’est fait parmi nous une espèce de révolution ; on apprécie mieux la gloire ; on juge mieux les hommes ; on distingue les talents des succès ; on sépare ce qui est utile de ce qui est éclatant et dangereux ; on ne pardonne pas le génie sans la vertu ; on respecte quelquefois la vertu sans la grandeur ; on perce enfin à travers les dignités pour aller jusqu’à l’homme. […] C’est aux vivants qu’il faut parler ; c’est dans leur âme qu’il faut aller remuer le germe de l’honneur et de la gloire : ils veulent être aimables, faites-les grands ; présentez-leur sans cesse l’image des héros et des hommes utiles ; que cette idée les réveille. […] Juger de tout, apprécier la vie, peser la crainte et l’espérance, voir et l’intérêt des hommes, et l’intérêt des sociétés, s’instruire par les siècles et instruire le sien, distribuer sur la terre et la gloire et la honte, et faire ce partage comme Dieu et la conscience le feraient, voilà sa fonction. […] Un conquérant qui aimait la gloire, mais plus avide de renommée que juste, s’étonnait de ce qu’un homme vertueux, et que tout le peuple respectait, ne parlait jamais de lui : il le manda. « Pourquoi, dit-il, les hommes les plus sages se taisent-ils sur mes conquêtes ?
Comme le spectateur y semble ballotté par ce même lutin qui, si l’on en croit Mascarille, le persécute et s’oppose à sa gloire ! […] Mais Molière lui fit dire par Boileau qu’il avait conservé sa véritable scène, et le menaça de la rendre publique, s’il continuait à vouloir usurper la gloire d’autrui. […] La Gloire du Val-de-Grâce, poème. […] Jusqu’à quand leurs protecteurs voudront-ils se dissimuler qu’on ne sert pas un art en permettant que sa gloire soit journellement sacrifiée à de futiles et de vils intérêts ? […] quand la gloire les attendait peut-être au premier rôle propre à leur âge, pour couronner leurs vieux jours d’une palme méritée.
Ces quatre hommes n’ont jamais été considérés que sous leurs rapports avec la gloire littéraire de la France, et avec celle des branches de l’art que chacun d’eux a le plus particulièrement cultivée. à mes yeux, ils ne sont pas moins remarquables que Louis XIV dans l’histoire des mœurs, et n’ont pas moins ajouté à son influence par leur concours, qu’il n’a ajoute à leur gloire par sa protection.
« Ce fut après le déluge que parurent ces ravageurs de provinces que l’on a nommés conquérants, qui, poussés par la seule gloire du commandement, ont exterminé tant d’innocents… Depuis ce temps, l’ambition s’est jouée, sans aucune borne, de la vie des hommes ; ils en sont venus à ce point de s’entretuer sans se haïr : le comble de la gloire, et le plus beau de tous les arts a été de se tuer les uns les autres179. » Il est difficile de s’empêcher d’adorer une religion qui met une telle différence entre la morale d’un Bossuet et d’un Tacite.
XXIII Je visitais un jour ce palais transformé en Musée, sur le front duquel une pensée de large éclectisme a fait écrire : À toutes les gloires de la France. […] Serait-ce que Rousseau et Montesquieu auraient moins fait pour la gloire de la France et le progrès de l’humanité que tel général obscur ou tel courtisan oublié ? […] Entrez, et dites-moi si aucune gloire vaut la gloire de celui qui siège là-bas. […] Aux yeux du philosophe, la gloire de l’esprit est la seule véritable, et il est permis de croire qu’un jour les philosophes et les savants hériteront de la gloire que, durant sa période d’antagonisme et de brutalité, l’humanité aura dû décerner aux exploits militaires. […] Le roi, suivi par son ministre et son grand prêtre, s’avança vers l’ermitage, animé du désir de voir le saint homme, trésor inépuisable de science religieuse ; il regardait le solitaire asile, pareil à la région de Brahma ; il entendit les sentences mystérieuses, extraites des Védas, prononcées sur un rythme cadencé… Ce lieu rayonnait de gloire par la présence d’un certain nombre de brahmanes… dont les uns chantaient le Samavéda, pendant qu’une autre troupe chantait le Bharoundasama… Tous étaient des hommes d’un esprit cultivé et d’un extérieur imposant… Ces lieux ressemblaient à la demeure de Brahma.
La gloire des hommes, s’élevât-elle jusqu’au ciel, tombe flétrie contre terre à ma noire approche, et je l’écrase sous mes trépignements. […] Sa naissance avait eu la gloire d’une apothéose : Le tonnerre l’avait acclamée, et une pluie d’or rayonnante avait annoncé à la terre que le Verbe de Zeus s’était révélé. […] C’était prédire à Athènes sa gloire guerrière et sa vocation maritime. […] Elle comble de louanges ses alliées nouvelles ; en place des armes sanglantes qu’elles lui rendent, elle met entre leurs mains un sceptre de gloire. […] Ce n’est que de ce temps qu’Eschyle est rentré dans la gloire.
… » « René ne fait autre chose que tracer ici (et c’est sa gloire d’avoir été le premier à le concevoir et à le remplir) l’itinéraire poétique que tous les talents de notre âge suivront ; car tous, à commencer par Chateaubriand lui-même, qui n’exécuta que plus tard ce qu’il avait supposé dans René, ils parcourront avec des variantes d’impressions le même cercle, et recommenceront le même pèlerinage : l’Italie, la Grèce, l’Orient. […] Un véritable grand homme qui eût paru alors, le glaive dans une main, la modération dans l’autre, pouvait lui apporter la raison, la force et la paix ; c’était une de ces époques où la dictature des soldats et la dictature des législateurs peuvent s’unir pour reconstituer un grand peuple ; mais, il faut le reconnaître, la France, qui est le pays des armes, du génie et de la gloire, n’est pas le pays de la raison. […] Chateaubriand n’avait rien fait encore pour le salut de son pays, mais il avait immensément fait pour sa gloire ; la France fut ingrate : c’est son habitude ; il ne s’adressait pas à un parti, comme les amis de Foy en 1829, ou de Laffitte en 1830. […] Il rallia par là l’armée française à la maison des Bourbons, et fit rentrer la gloire sous ses drapeaux. […] Il les emportait dans sa valise comme des certificats de gloire et des augures d’immortalité.
Mais nous ne voulons aujourd’hui que dégager, en passant, un point de cet horizon étendu ; que signaler, comme un détail entre les mille autres qui viendront plus tard, les changements dont l’Angleterre est le théâtre depuis plusieurs années, et surtout appeler l’attention sur un homme qui aura toujours la gloire — si une meilleure ne le tente pas — d’avoir nommé de son nom ces changements précurseurs du changement définitif et radical qu’il nous est permis d’espérer. […] L’animal de gloire de Tertullien ( animal gloriæ ) redressait parfois le front égaré de Luther, mais l’animal de volupté (animal voluptatis) abaissait éternellement la lourde face de Henri vers de bestiales jouissances. […] Homme de conscience plus que de passion impétueuse ou tenace, il devait sa gloire au mérite de sa pensée ; mais il s’effrayait de cette gloire allumée par son talent, comme un enfant s’épouvanterait de l’incendie projeté par le flambeau qu’il porte dans ses mains confiantes. […] C’est la seule gloire et la seule idée juste qui soit restée au protestantisme anglican que de poser une autorité et une règle, et de vouloir que cette autorité soit obéie, que cette règle soit respectée. […] Elle qui aime la force et qui tient à sa gloire, entrevoit-elle les conséquences terrestres, les conséquences politiques qu’entraînerait, dans ce moment et plus tard, sa triomphante rentrée au sein de l’unité catholique ?
Qui net et de partager son nom et sa gloire ! […] Auriez-vous jamais cru que Paris bombardé, fumant, dévasté, aurait abrité, pendant son effroyable siège, une palombe de ce roucoulement éternel, une femme que l’amour pour son mari rend tour à tour soucieuse de son action, de sa gloire, de son portrait, de ses intérêts littéraires, de ses intérêts même de boutique, quand la patrie tombe par morceaux ! […] Elle les aurait couronnés de roses et de lauriers ; les roses pour la tendresse, et les lauriers pour la gloire !