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366. (1890) L’avenir de la science « XIX » p. 421

Les barbares renversèrent l’Empire ; mais, au fond, quand ils essayèrent de reconstruire, ils revinrent au plan de la société romaine, qui les avait frappés dès le premier moment par sa beauté, et le seul d’ailleurs qu’ils connussent. […] La Grèce ignorait nos préjugés aristocratiques, qui frappent d’ignominie quiconque exerce une profession manuelle et l’excluent de ce qu’on peut appeler le monde distingué. […] L’humanité réalise la perfection en la désirant et en l’espérant, comme la femme imprime, dit-on, à l’enfant qu’elle porte, la ressem-blance des objets qui frappent ses sens.

367. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Broglie. » pp. 376-398

Dans les diverses occasions qu’il eut d’approcher du maître d’alors et de l’entendre, soit au Conseil d’État, soit ailleurs, il fut frappé des défauts plus que des qualités ; il vit et nota surtout, de cette grandeur déclinante, les éclats, les écarts, les brusqueries, sans apercevoir assez les éclairs de génie et de haut bon sens qui jaillissaient et se faisaient jour : c’était là de sa part une prévention que lui-même reconnaît aujourd’hui. […] Autant qu’un autre, je sais que, surtout à l’issue des grandes commotions politiques, la prudence conseille de n’en pas frapper incessamment l’oreille des peuples, et de le laisser enseveli sous un voile que la nécessité seule ait le droit de soulever. […] Un grand malheur qui le frappa en 1838, la mort de Mme la duchesse de Broglie, augmenta en lui cette disposition sérieuse et réservée, cette faculté de s’abstenir, dans laquelle la pensée religieuse a pris plus de part et tenu plus de place chaque jour.

368. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La duchesse du Maine. » pp. 206-228

Il y eut des règlements dressés, des statuts ; une médaille fut frappée à cette occasion : tous ceux de l’ordre devaient la porter avec un ruban citron, quand ils seraient à Sceaux. […] Frappé vivement des objets, il les rend comme la glace d’un miroir les réfléchit, sans ajouter, sans omettre, sans rien changer. […] Le côté par lequel cette petite cour me frappe le plus et me paraît le seul mémorable, est encore le côté moral, celui qui touche à l’observation humaine des préjugés, des travers et des ridicules.

369. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Lambert et madame Necker. » pp. 217-239

Fontenelle nous dit que, dès ce temps-là, elle se dérobait souvent aux plaisirs de son âge, pour aller lire en son particulier, et qu’elle s’accoutuma de son propre mouvement à faire de petits extraits de ce qui la frappait le plus. […] Droz, jugeant les écrits de Mme de Lambert24, était frappé de ce qu’une telle morale, qui prêche ouvertement l’ambition, renferme de dangereux et même d’absurde : je lui en demande bien pardon, Mme de Lambert savait qu’à la date où elle écrivait, le, danger pour cette jeunesse guerrière était bien plutôt dans le trop de dissolution et de mollesse. […] (Ailleurs, il dit : Il lui prit une tranchée de bel esprit… C’est un mal qui la frappa tout d’un coup et dont elle est morte incurable.

370. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Rivarol. » pp. 62-84

Lui-même, dans des pages excellentes, en définissant l’esprit et le goût, il n’a pu s’empêcher de définir son propre goût, son propre esprit ; on ne prend jamais, après tout, son idéal bien loin de soi : L’esprit, dit-il, est en général cette faculté qui voit vite, brille et frappe. […] Il nous prouve très bien, par l’exemple des langues, que la métaphore et l’image sont si naturelles à l’esprit humain, que l’esprit même le plus sec et le plus frugal ne peut parler longtemps sans y recourir ; et, si l’on croit pouvoir s’en garder en écrivant, c’est qu’on revient alors à des images qui, étant vieilles et usées, ne frappent plus ni l’auteur ni les lecteurs. […] » Et il conclut en disant : « Les belles images ne blessent que l’envie. » Il n’a manqué à plus d’une de ces pages de Rivarol, pour frapper davantage, que de naître quelques années plus tôt, en présence de juges moins dispersés et sous le soleil même de la patrie.

371. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. Anecdotes. » pp. 123-144

Je veux qu’un trait plus doux, léger, inattendu, Frappe l’orgueil d’un fat plaisamment confondu. […] On se relève du Dorat et des traits que peuvent lancer des adversaires de ce calibre ; mais on reste abîmé sous des coups comme ceux que Le Brun vient de frapper. […] Je n’examine pas le raisonnement, qui est hardi et qui tend à introduire le surnaturel parce qu’il y a eu de l’extraordinaire : la seule remarque que je veuille faire en ce moment, c’est que, le jour où La Harpe a écrit d’inspiration cette scène de verve et de vigueur, son talent pour la première fois s’est trouvé monté au ton de sa sensibilité émue et de son imagination frappée.

372. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre II. Shakespeare — Son œuvre. Les points culminants »

il frappe gravement à la porte de l’infini, et dit : Ouvre, je suis Dante. […] Cette comparaison facile, plutôt de surface que de fond, nous frappe moins que la confrontation mystérieuse de ces deux enchaînés : Prométhée et Hamlet. […] » et quand elle meurt, Hamlet, sans la plaindre, frappe Claudius avec ce cri tragique : Suis ma mère !

373. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vien » pp. 74-89

La religion est moins peinte que lui ; il est moins peint que les figures inférieures ; et cette dégradation est si juste qu’on n’en est pas frappé. […] Le mouvement frappe plus, que le repos. […] Ce ne sont pas les morceaux de passion violente qui marquent dans l’acteur qui déclame le talent supérieur, ni le goût exquis dans le spectateur qui frappe des mains.

374. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Loutherbourg » pp. 258-274

L’étude, le goût acquis, la réflexion saisiront fort bien la place d’un vers spondaïque, l’habitude dictera le choix d’une expression, elle séchera des pleurs, elle laissera couler les larmes ; mais frapper mes yeux et mon oreille, porter à mon imagination, par le seul prestige des sons, le fracas d’un torrent qui se précipite, ses eaux gonflées, la plaine submergée, son mouvement majestueux et sa chûte dans un gouffre profond, cela ne se peut. […] On y discerne, on est frappé par un cavalier vu par le dos et par la croupe de son cheval blanc et vigoureux ; il porte un étendart qu’un fantassin, qui est à sa gauche, cherche à lui enlever avec la vie ; mais ce cavalier a saisi la garde de l’épée du fantassin, et va lui plonger la sienne dans la gorge. […] Imaginez à gauche une grande arcade ; sous cette arcade, des eaux ; entre des nuages, le disque de la lune dont la lumière faible et pâle frappe la partie supérieure de la voûte ou arcade, et éclaire la scène.

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