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11. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre V »

Les Effrontés Ce n’est pas tout que de frapper fort, il faut frapper juste. […] Des coups portés de si bas ne frappent pas si haut. […] Augier au cancan qui frappe la marquise, s’il l’avait fait sortir de l’organe bruyant d’un pamphlet célèbre ; mais c’est un article de modes qui lance ce trait meurtrier ! […] L’allusion est directe, et son premier tort est de frapper un journaliste désarmé. […] Les mots frappent juste, si l’action est fausse : le plan de la bataille est vicieux, mais le tir en est admirable.

12. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VIII : Hybridité »

— C’est une opinion généralement adoptée parmi les naturalistes que les croisements entre espèces distinctes sont frappés de stérilité en vertu d’une loi spéciale, afin d’empêcher le mélange et la confusion de toutes les formes vivantes. […] Or, il prétend que les hybrides sont parfaitement féconds, aussi féconds, dit-il, que les pures souches mères ; et il soutient ses conclusions avec autant d’assurance que Kœlreuter et Gærtner, qui considèrent au contraire que la loi universelle de la nature est que tout croisement entre espèces distinctes soit frappé d’un certain degré de stérilité. […] Notre principal objet sera de rechercher si ces lois indiquent que ces croisements et leurs produits ont été spécialement frappés d’infécondité, pour empêcher le mélange et la confusion des formes spécifiques. […] Il y a déjà longtemps que ces différences dans les résultats des croisements réciproques avaient frappé Kœlreuter. […] Ces lois si complexes et si singulières indiquent-elles que les croisements entre espèces ont été frappés de stérilité, afin d’empêcher que les formes organiques se confondent par leur mélange ?

13. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVe entretien. Ossian fils de Fingal »

Va, Moran, prends ma lance, et frappe sur le bouclier sonore de Caïrbar, il est suspendu à la porte bruyante de Tura. […] Swaran frappa son bouclier et appela le fils d’Arno. […] Le chef combat le chef ; le guerrier joint le guerrier ; l’acier frappe, est frappé. […] La plaine gémit comme le fer, rouge enfant de la fournaise, sous les coups de cent marteaux qui s’élèvent et le frappent tour à tour. […] Lève ton bouclier ; plonge et replonge ton épée ; frappe, détruis ! 

14. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Ayant joui, sous l’Empire, d’une position justement acquise et d’une faveur modérée, il reste un des plus fidèles après la chute, et il est frappé à ce titre d’un ostracisme qui l’honore. […] Arnault, et toute sa vie il eut de ces traits-là ; on n’avait qu’à frapper, et il rendait de ces étincelles. […] Dans cette position secondaire, mais essentielle, il se montra des plus serviables aux talents nouveaux et anciens, à Marie-Joseph Chénier disgracié et frappé, comme à Béranger inconnu et naissant. […] Comme cela est bien frappé et tout d’une venue ! […] L’orage a frappé le chêne Qui seul était mon soutien.

15. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLIXe Entretien. L’histoire, ou Hérodote »

Frappé de cette vision, il en demanda l’explication à ceux des mages qui sont versés dans la science d’interpréter les songes, et la réponse qu’il en reçut lui causa beaucoup d’effroi. […] J’ai trouvé la maison d’Harpagus en larmes et dans les gémissements ; frappé de ce spectacle, j’entre ; je vois un enfant couché, se débattant et jetant des cris douloureux. […] La réponse qu’il venait de faire, si ferme et si libre, son âge parfaitement d’accord avec le temps où le fils de Mandane avait dû périr, tant de rapports frappaient Astyage. […] « Darius, frappé du rapport de ses gardes, et de ce qui se passait sous ses yeux, ordonna qu’on amenât cette femme en sa présence. […] » L’écuyer répondit : « Seigneur, je suis prêt à frapper l’un et l’autre, ou l’un des deux seulement, à votre volonté, et enfin à faire tout ce que je crois le plus convenable à vos intérêts.

16. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  second article  » pp. 342-358

Cette précision singulière qui règne dans Homère a frappé Napoléon ; il ne la retrouvait pas à beaucoup près dans Virgile, ce qui lui a fait dire : « Si Homère eût traité la prise de Troie, il ne l’eût pas traitée comme la prise d’un fort, mais il y eût employé le temps nécessaire ; au moins huit jours et huit nuits. […] On en noterait, quoique ce soit l’exception, par lesquelles Homère a marqué son objet d’un seul trait, presque comme Dante : tantôt c’est un guerrier blessé qui tombe, précipité du haut d’une tour, la tête en avant, pareil à un plongeur ; tantôt c’est un autre qui, frappé au bas-ventre, tombe assis et reste gisant à terre comme un ver. […] Ce qui frappe aujourd’hui, c’est encore dans les traits généraux et dominants une grandeur terrible ; Jupiter, Neptune, Apollon, Minerve, ces dieux principaux, ne sont pas peints à faire sourire. […] En un endroit, lorsqu’elle apprend brusquement à Mars la mort de son fils chéri Ascalaphus, le dieu terrible dans l’accès de sa douleur se met à frapper violemment ses deux florissantes cuisses de la paume de ses mains : le traducteur met simplement qu’il se frappe le corps de ses mains divines ; il oublie que cette forme expressive de désespoir s’est conservée fidèlement jusque chez les Grecs modernes.

17. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « De Stendhal »

Il n’a jamais frappé qu’un petit nombre d’hommes, mais il les a frappés, de sorte qu’ils sont restés timbrés à l’effigie de ses sensations et de ses idées, tandis que la masse lui a toujours échappé. […] Stendhal, un jour, aux environs de la Bérésina, se présenta devant son chef, Daru, l’intendant général, rasé et habillé avec la recherche qu’il aurait eue à Paris : « Vous êtes un homme de cœur », lui dit Daru, frappé d’un détail qui aurait frappé aussi Napoléon, car il révélait l’homme tout entier qu’était Stendhal, et, en effet, à part la petite terreur d’être dupe, rapportée des salons et que lui a reprochée si spirituellement Sainte-Beuve, il garda toujours inaltérables, dans toutes les positions et dans tous les dangers, sa bonne humeur et son sang-froid. […] En les lisant, on est surtout frappé de la sécheresse d’expression d’une âme pourtant passionnée, et on sent presque douloureusement dans ces pages le tort immense que fait même à la sensibilité d’un homme le malheur d’avoir, sur les grands problèmes de la vie morale, pensé faux.

18. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Stendhal » pp. 43-59

Il n’a jamais frappé qu’un petit nombre d’hommes, mais il les a frappés, de sorte qu’ils sont restés timbrés à l’effigie de ses sensations ou de ses idées, tandis que la masse lui a toujours échappé. […] Daru, frappé d’un détail qui aurait frappé aussi Napoléon, car il révélait l’homme tout entier qu’était Stendhal ; et, en effet, à part la petite terreur d’être dupe, rapportée des salons, et que lui a reprochée si spirituellement M.  […] En les lisant, on est surtout frappé de la sécheresse d’expression d’une âme pourtant passionnée, et on sent presque douloureusement dans ces pages le tort immense que fait même à la sensibilité d’un homme le malheur d’avoir, sur les grands problèmes de la vie morale, pensé faux !

19. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XII, les sept chefs devant Thèbes. »

Et Poséidon, « roi équestre qui frappe les poissons de son trident redouté ». […] Les bombes pleuvent sur lui comme des météores, les éclairs de l’artillerie partent d’un nuage aussi obscur que ceux des tempêtes ; on tombe sans voir la main qui vous frappe. […] Déjà il franchissait le rempart, quand Zeus le frappa de sa foudre, et la terre retentit au loin. […] diras-tu : Une place au tombeau de leurs pères. » La Bible a de cruels jeux de mots ; Hamlet, au cimetière d’Elseneur, lorsqu’il frappe du doigt sur les crânes vides de leurs convoitises et de leurs passions, a des sarcasmes qui font frissonner : — aucun plus terrible que ce dernier trait : « Leur haine a cessé, leurs vies se sont mêlées sur la terre. […] « Frappe, tu as frappé ! 

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