Gaston Paris et la poésie française au moyen âge58 I Depuis qu’on nous a fait entendre que c’étaient les privat-docenten qui avaient gagné la bataille de Sedan, beaucoup de bons esprits se sont figurés chez nous qu’un moyen indirect, mais sûr, de préparer la revanche était d’établir des textes grecs, latins ou romans ; et l’érudition a envahi la France. […] Mais surmontons cette première impression, prêtons une oreille attentive et sympathique, et nous reconnaîtrons que cet enfant robuste et sain, plein de vigueur, de bonté et de courage, que cet enfant qui est déjà le grand peuple français parle aussi la grande langue française. […] Gaston Paris n’expose que des idées générales, de celle qu’il consacre, par exemple, aux Origines de la littérature française ? […] Or rien de tout cela, ou presque rien, entre la prise de Constantinople et la Révolution française… Mais ces réflexions sont d’une généralité tellement démesurée qu’elles s’évanouissent à mesure que je les exprime.
Ils obtinrent d’alterner de nouveau avec la troupe de Molière ; ils prirent à leur tour les jours extraordinaires, et, sur l’ordre du roi, ils restituèrent aux Français les quinze cents livres qu’ils avaient reçues de ceux-ci en 1658, contribuant ainsi pour leur part aux frais d’établissement de la salle du Palais-Royal. […] Ainsi, à la suite de l’article précédent, on trouve celui-ci : « Item, pour voiturer lesdits comédiens… 200 liv. » La troupe italienne était traitée, sous ce rapport, comme les troupes françaises de l’Hôtel de Bourgogne et du Palais-Royal. […] Dominique, qui était homme d’esprit et de savoir, connaissant le génie de la nation française, qui aime l’esprit partout où elle le trouve, s’avisa de faire usage des pointes et des saillies convenables à l’Arlequin. […] Je joue déjà assez bien le rôle de l’Ermite ; et d’ailleurs ce serait un vrai moyen de me délivrer de l’importunité de mes créanciers, qui ne cessent de me persécuter. » Les quelques lignes de la fameuse préface que nous venons de rappeler suffisent à nous avertir que les chefs-d’œuvre de la comédie française, L’École des femmes, Le Misanthrope, Le Tartuffe, L’Avare, se succédaient sur le même théâtre où Scaramouche et Dominique faisaient à qui mieux mieux leurs culbutes « et autres singeries agréables, comme dit Gherardi, qui sont du jeu italien ». […] Quand cette pièce de Scaramouche, pédant scrupuleux fut jouée en monologues, à la foire Saint-Laurent (en 1709) pour braver les défenses obtenues par les comédiens français, sept acteurs venaient l’un après l’autre réciter leur rôle.
Les Anglais ont assez bien traduit quelques tragédies de Racine ; je doute qu’ils traduisissent avec le même succès les fables de La Fontaine, l’ouvrage peut-être le plus original que la langue française ait produit ; l’Aminte, pastorale pleine de ces détails de galanterie, et de ces riens agréables que la langue italienne est si propre à rendre, et qu’il faut lui laisser ; enfin les Lettres de madame de Sévigné, si frivoles pour le fond, et si séduisantes par la négligence même du style. […] Peut-être est-il difficile de décider auquel des deux poètes on doit donner la préférence ; mais il est aisé de voir que les vers français ne sont nullement la traduction des vers latins. […] chacune a ses lois, qu’il n’est pas permis de changer ; parler latin en français, serait plutôt une entreprise bizarre qu’une hardiesse heureuse. […] « Les Français, disait-il, manquent de goût ; il n’y a que le goût ancien qui puisse former parmi nous des auteurs et des connaisseurs ; et de bonnes traductions donneraient ce goût précieux à ceux qui ne seraient pas en état de lire les originaux. » Si nous manquons de goût, j’ignore où il s’est réfugié ; ce n’est pas au moins faute de modèles dans notre propre langue, qui ne cèdent en rien aux anciens. […] Voyez l’Histoire de l’Académie Française, i, 2.
[Anthologie des poètes français du xixe siècle (1887-1888).] […] [Anthologie des poètes français du xixe siècle (1887-1888).]
Admirons par quel jeu sûr, par quel mécanisme ingénieux, l’Académie française communique a quelques-uns de ses membres l’importance qu’elle reçoit des autres. […] Car rien de tout cela n’est latin, n’est français, ne jaillit de notre sol, de notre inspiration nationale. […] Thiébault, né Français, de parents français, en 1769, à Berlin, a vu le grand Frédéric, et professe pour lui une vive admiration ; c’est avec enthousiasme que, devenu homme, il parle de ces grandes manœuvres militaires qu’il a suivies étant enfant. […] Il cite ce mot de Voltaire à propos de ses querelles avec Maupertuis : « Deux Français, dit-il en se levant de son fauteuil, deux Français ! […] Il est le général ; il est le premier, le plus grand et le plus résolu des soldats français.
La branche épistolaire de la littérature française commence à proprement parler au xviie siècle. […] La littérature française ne se dégage complètement dans le genre épistolaire qu’à dater de Malherbe et de Balzac. […] Si le jeune roi est malade, il faut voir comme Gui Patin s’intéresse aux moindres circonstances de sa santé : il aime le roi de toute la haine qu’il porte au Mazarin et à ses entours, et de quelque chose de plus encore, d’un vieux sentiment français héréditaire. […] Sur ce chapitre de Jules César, Gui Patin, après la Fronde, bien que si peu guéri, eût sans doute pensé différemment : On a imprimé en Hollande, écrivait-il en 1659, un livret intitulé : Traité politique, etc., que tuer un tyran n’est pas un meurtre ; on dit qu’il est traduit de l’anglais ; mais le livre a premièrement été fait en français par un gentilhomme de Nevers, nommé M. de Marigny, qui est un bel esprit. […] En littérature française, jeune il avait causé avec M. de Malherbe, et il le citait quelquefois ; mais il en avait gardé mémoire bien moins pour ses odes ou sa réforme de la langue que pour ses gaillardises.
De tous les écrits déjà nombreux de M. de Lescure, ceux qui sont le plus à mon gré et dont je louerais le plus volontiers la direction, sont ses articles sur la littérature française pendant l’émigration et sur quelques-uns des écrivains distingués de cette période, Rivarol, Sénac de Meilhan. […] C’est un esprit français, bourgeois, de bon aloi et de bonne trempe. […] On peut, avec probité et sans manquer à rien de ce qu’on doit, bien voir à Paris sur les auteurs et sur les livres nouveaux ce qu’on ne peut imprimer à Paris même à bout portant, et ce qui, à quinze jours de là, s’imprimera sans inconvénient, sans inconvenance, dans la Suisse française. […] Mais les savants à hébreu sont peu communicatifs. » Marais a raison, et il n’a manqué à Bayle, à « ce charmant auteur », comme il l’appelle, que la coupe française pour ainsi dire. […] Bayle réduit à un seul tome, selon la recette française et à la dernière mode de Paris, quel déchet !
— L’éditeur nous dit également qu’il a suivi la ponctuation de Wagner un peu malgré lui ; car les virgules lui semblent trop multipliées dans ce système, lequel est d’ailleurs beaucoup plus sobre que celui de nos éditions françaises. « S’il n’eût fallu prendre garde, dit-il, de trop heurter les habitudes des lecteurs auxquels est destiné le présent livre, j’aurais fait comme M. […] Benoist a mis en tête de son édition une Notice développée sur le poète, dans laquelle il concilie heureusement les qualités françaises avec les connaissances allemandes. […] Quoique je me sois interdit tout rapprochement avec les auteurs français, je ne puis m’empêcher de transcrire la description d’un paysage semblable, que j’ai lue il y a quelques mois : « L’endroit était charmant ; le pré, doucement incliné vers l’eau, était tout parsemé de spirée-reine-des-prés, de grandes salicaires pourpres qui dépassaient princièrement la foule pressée des vulgaires plantes fourragères. […] J’aimerais, ai-je dit, que nos éditions françaises des classiques anciens gardassent, tout en se perfectionnant, un caractère français. […] » Ce n’est certes pas un premier ministre français de ce temps-là, ni l’abbé Dubois, ni le cardinal Fleurv, ni plus tard M. de Choiseul, qui s’amuserait à ces bagatelles.
Dès 1821, on offrait au jeune écrivain de faire une Histoire de la Révolution française ; on lui proposait aussi de donner un cours à l’Athénée de Paris, et il y professa une année sur la Réformation et le xvie siècle, une autre année sur la Révolution et la Restauration d’Angleterre. […] Il n’avait pas publié à cette époque son tableau de la Révolution française ; il n’était connu que par son prix récent à l’Institut et par les témoignages enthousiastes de quelques amis. […] Au printemps de 1824 parut l’Histoire de la Révolution française : ce fut un immense succès et un événement. […] Ainsi déjà l’avait conçu De Maistre, lorsqu’au début de ses Considérations il disait : « Ce qu’il y a de plus frappant dans la Révolution française, c’est cette force entraînante qui courbe tous les obstacles. […] Cette excursion exceptée, les principaux événements de sa vie sont tout littéraires : nommé de l’Académie des Sciences morales lors de la fondation en 1832, élu de l’Académie française comme successeur de M.Raynouard en 1836, il fut de plus choisi pour secrétaire perpétuel de la première de ces académies, à la mort de M.Comte, en 1837.