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487. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ch. de Barthélémy » pp. 359-372

Ces hommes qui se sont vantés d’avoir mis la liberté dans le monde, ces charlatans et ces menteurs, ces Tartufes de philosophie, agirent hideusement contre l’homme qui les jugea, toute sa vie, avec une indépendance lumineuse… Ils l’insultèrent ; ils le jetèrent au donjon de Vincennes ; ils finirent par faire supprimer son Année littéraire, et ils tuèrent, par là, l’œuvre et l’homme, car il en mourut… Et quand leur révolution triomphante eut passé sur cet assassinat, le xixe  siècle, qui n’avait dans ses grandes oreilles d’âne que le bruit des choses de la Révolution, Pavait oublié, et il fallut… quoi ? […] Après vingt-trois ans de luttes, on finit par supprimer à Fréron son journal, son Année littéraire, l’illustration de toute sa vie, son mérite devant Dieu !

488. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La révocation de l’Édit de Nantes »

Ne prouvent-ils pas que le rationalisme individuel a achevé de faire, en lui, depuis longtemps, cette petite main-basse qu’il finit toujours par faire sur les croyances collectives du protestant ? […] Aussi, nous le disons en finissant, et c’est par là que nous voulons terminer, quoique nous appréciions très bien ce qu’il y eut de cruel et de vraiment digne de regret dans nos pertes, à cette époque de notre histoire, une si fastidieuse exactitude finit par manquer entièrement l’effet qu’un récit moins traîné dans le terre-à-terre des détails devait produire, même sur les esprits les moins enclins à s’attrister.

489. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Gustave III »

Eh bien, c’est dans ce ton qu’il va, qu’il va droit devant lui, comme s’il revenait de… Stockholm ou de Pontoise, ne faisant jaillir sur sa route ni aperçu nouveau, ni opinion nette dont l’esprit du lecteur puisse être reconnaissant au sien, sur ce règne brillant et délabré qui commença si bien et finit si mal, plus semblable à un carrousel ou à une représentation théâtrale qu’au règne d’un roi sérieux qui sent sa fonction jusque dans le plus profond de sa conscience ! […] J’ai dit qu’il avait bien commencé et mal fini, et ce n’est pas le mot ; bien avant la fin, la grandeur de vingt-quatre heures qu’avait eue Gustave, quand il fit son célèbre coup d’État qui émerveilla l’Europe, fut vite fanée.

490. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le comte de Fersen et la cour de France »

Et quand tout est fini, quand l’œuvre à laquelle il a consacré sa vie et à laquelle il eût voulu la sacrifier est interrompue par cette mort du Roi et de la Reine de France, que les misérables souverains du temps ne surent empêcher, il n’a pas une récrimination ! […] Mais ces ignominies de rois qui n’avaient plus le sentiment de leur fonction, de leur devoir, de leur intérêt de souverains, — qui avaient brouillé et dissous tout cela dans leurs âmes ramollies, cessèrent bientôt d’être de grandes ignominies et finirent par tomber dans un ridicule qui les rapetissa.

491. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Maintenon » pp. 27-40

D’abord la grande société monarchique du temps de Louis XIV est finie, et par le fait fatal et triste de cette âpre curiosité qu’on a pour les choses qu’il est impossible de revoir, et aussi par le fait du contraste de nos mœurs avec ces mœurs évanouies, nous nous attacherons pendant longtemps encore à remuer cette poussière et à lui demander ce qu’elle fut du temps qu’elle vivait. […] Voyez comme La Bruyère lui-même, un grand esprit pourtant, bien au-dessus des apparences, a traité cette profonde figure de Guillaume d’Orange, qui finit par devenir poétique à force de soucis et d’ombres redoublées sur son front souffrant !

492. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Sophie Arnould »

Je n’y retrouve qu’épuisée, ramollie, finie, cette formidable Sophie Arnould qui faisait tout trembler devant son esprit, devant cette furie de mots coupants et vibrants que personne n’eut au même degré qu’elle, dans un temps où l’esprit dominait le génie et où les hommes de génie étaient encore plus des hommes d’esprit, comme Voltaire et Montesquieu… Allez ! […] II Jamais chute plus profonde après une montée plus rapide… Une autre coquine de ces temps de coquines heureuses qui ont cependant fini par tomber, la Dubarry, eut l’honneur d’être guillotinée avec le même couperet que Marie Antoinette, mais la fin, dans la destinée de Sophie Arnould, rien n’en a diminué ou n’en a relevé la bassesse.

493. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Valmiki »

Malheureusement le temps est un peu passé où l’imagination occidentale voyait en Orient les splendeurs amoncelées de je ne sais combien de civilisations finies, mais qui avaient laissé derrière elles aux chercheurs de trésors trois ou quatre terrains d’alluvions de poudre de perles et de fragments d’escarboucles. […] » Cependant, tel que le voilà traduit, ce livre bizarre, c’est un événement, et non pas seulement pour l’Académie des inscriptions et belles-lettres ; car il atteste, ce que l’on commençait bien d’entrevoir, il est vrai, et ce qu’il faudra bien finir par proclamer tout haut, que les païens de toute espèce, battus par les doctrines chrétiennes, qui voulaient faire sortir de l’Inde une poésie et une philosophie pour les opposer à tout ce que le Christianisme a créé dans l’ordre du beau et du vrai parmi nous, n’ont trouvé, en somme, ni l’une ni l’autre.

494. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Auguste Vacquerie  »

Tant mieux pour Auguste Vacquerie, après avoir pendant trente ou quarante ans hugotisé ou vacquerisé, — car on ne sait plus où l’on en est, où commence Vacquerie et où finit Hugo ! […] Tout s’éclate et se répand par terre de la magnifique porcelaine, — et c’est ainsi, pour finir par un mot emprunté à la sagesse vulgaire, « qu’on n’est jamais trahi que par les siens » !

495. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Charles Baudelaire. Les Fleurs du mal. »

C’est un de ces matérialistes raffinés et ambitieux qui ne conçoivent guère qu’une perfection matérielle, — et qui savent parfois la réaliser ; mais par l’inspiration il est bien plus profond que son école, et il est descendu si avant dans la sensation, dont cette école ne sort jamais, qu’il a fini par s’y trouver seul, comme un lion d’originalité. […] Le caractère de la poésie des Fleurs du mal, à l’exception de quelques rares morceaux que le désespoir a fini par glacer, c’est le trouble, c’est la furie, c’est le regard convulsé et non pas le regard, sombrement clair et limpide, du Visionnaire de Florence.

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