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43. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pécontal. Volberg, poème. — Légendes et Ballades. »

Dans ce poème dont il est facile de constater la faiblesse d’invention et de drame, et où l’homme seulement se promet, il y a un chant intitulé « L’Église », entièrement lyrique de mouvement et de rythme, et dont la simplicité est divine. […] Ce sont là des vers pris aussi avec la main, comme les fleurs auxquelles ils ressemblent, tant ils sont faciles, d’une couleur exquise, d’un tour heureux et naturel. […] Cela n’est pas facile à rencontrer, cet assemblage, surtout dans un homme qui dit ses vers le soir, entre deux tasses de thé, aux plus jolies femmes de Paris.

44. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Œuvres de Louis XIV. (6 vol. in-8º. — 1808.) » pp. 313-333

Il était aimable de sa personne, honnête et de facile accès à tout le monde, mais avec un air grand et sérieux qui imprimait le respect et la crainte dans le public, et empêchait ceux qu’il considérait le plus de s’émanciper, même dans le particulier, quoiqu’il fût familier et enjoué avec les dames. […] La page que je viens de citer me permet de croire que, si (par impossible) une conversation politique s’était engagée entre eux deux, Louis XIV, d’un ton simple et d’un bon sens facile, aurait gardé encore sur les points essentiels sa supériorité souveraine. […] « Car enfin ce n’est pas une chose facile que de se transformer à toute heure en la manière que l’on doit », et « la face du monde où nous vivons est sujette à des révolutions si différentes, qu’il n’est pas en notre pouvoir d’y garder longtemps les mêmes mesures ». […] Boileau conseillait de remettre vingt fois sur le métier son ouvrage, et il apprenait à Racine à faire difficilement des vers faciles. Louis XIV donne en politique à son fils des préceptes tout pareils et analogues : il lui conseille de retourner un plan vingt fois dans son esprit avant de l’exécuter ; il veut lui apprendre à trouver avec lenteur dans chaque affaire l’expédient facile.

45. (1868) Curiosités esthétiques « VI. De l’essence du rire » pp. 359-387

J’ai fait, du reste, tous mes efforts pour y mettre un certain ordre et en rendre ainsi la digestion plus facile. […] Il est facile de deviner que je veux parler du rire causé par le grotesque. […] Le comique significatif est un langage plus clair, plus facile à comprendre pour le vulgaire, et surtout plus facile à analyser, son élément étant visiblement double : l’art et l’idée morale ; mais le comique absolu, se rapprochant beaucoup plus de la nature, se présente sous une espèce une, et qui veut être saisie par intuition. […] Ils sont d’autant plus adroits et il leur est d’autant plus facile de retomber sur la tête, qu’elle est plus grosse et plus lourde que le reste du corps, comme les soldats en moelle de sureau qui ont un peu de plomb dans leur shako.

46. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Appendice » pp. 453-463

La pièce qui a mérité le premier prix se distingue par je ne sais quoi de prompt, de svelte, de facile, qui marche de soi-même, et qui, chemin faisant, se rencontre avec l’élévation ou l’ingénuité du sentiment. […] Cet excès de plaisanterie ou de familiarité a nui à la pièce, d’ailleurs aussi élégante que facile. […] La nouvelle qui a obtenu le second prix, et qui a pour titre Le Chant des Hellènes, est une confession, ou du moins une confidence, celle d’une femme à une jeune amie qu’elle veut prémunir contre un travers dont elle n’a pas pu se garder elle-même. « Préserver son imagination de tout écart n’est qu’un simple calcul de bonheur pour une femme vertueuse » : cette épigraphe, empruntée à Mme Necker de Saussure, se trouve justifiée par le récit ; mais ce récit est facile, naturel, coulant, et n’a rien d’une prédication. […] Nous avons tous, si nous n’y prenons garde, un premier jugement prompt, facile, involontaire, par lequel nous approuvons chez les autres ce qui nous ressemble, ou nous rejetons ce que nous n’aurions pas fait.

47. (1875) Premiers lundis. Tome III « Maurice de Guérin. Lettre d’un vieux ami de province »

Pourtant, il faut le dire, toute cette renaissance grecque du xvie  siècle, en France, fut érudite, pédantesque, pénible ; le seul Amyot, par l’élégance facile de sa traduction de Plutarque, semble préluder à La Fontaine et à Fénelon. […] Surtout Fénelon l’est par le goût, le délicat, le fin le négligent d’un tour simple et divin ; il l’est dans son Télémaque, dans ses essais de traduction d’Homère, ses Aventures d’Aristonoüs ; il l’est partout par une sorte de subtilité facile et insinuante qui pénètre et charme : c’est comme une brise de ces belles contrées qui court sur ses pages.

48. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 189-194

Elles offrent en effet une tournure d’esprit agréable, de la finesse, des détails piquans, des comparaisons ingénieuses, des images riantes, un coloris brillant, une touche délicate & facile, & une peinture assez vraie des travers aimables qui caractérisent notre Nation. […] Entraînée par son naturel, elle ne se porte que vers les plaisirs faciles, & les goûte sans que le cœur soit de la partie.

49. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 139-145

Doué d’une intelligence prompte, d’une imagination vive & féconde, d’une mémoire facile & solide, ses premiers pas, dans la carriere littéraire, ont annoncé un athlete singuliérement favorisé de la Nature, & destiné à surpasser les rivaux les plus renommés. […] Mais comme les plus heureuses qualités ont des excès toujours voisins des défauts, s’ils ne sont pas eux-mêmes des défauts, & qu’il est facile aux grands talens de se corriger, nous userons des droits de la franchise que nous nous sommes imposée.

50. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

… Sans réflexion, sans calcul, poussé par sa nature et par l’esprit du temps, il s’est livré à ses séductions, dont il n’a pas vu le danger : c’est si facile, si doux, si distingué, de jouer avec les idées, de s’en caresser l’intelligence, d’en extraire l’essence, et, comme un riche répand sur ses mouchoirs un parfum dont le prix nourrirait des familles, d’en saupoudrer élégamment sa vie… Cependant, ces plaisirs s’émoussent comme toutes les ivresses : le Pharisien se fatigue à la fin des arcs-en-ciel qu’allument sur toutes choses les prismes de son esprit. […] Ce n’est point que ce credo des âges nouveaux soit facile à rédiger. […] Je crois aussi qu’on est bon et juste (quand on l’est) naturellement, par un sentiment qui commande et rend le plus souvent facile le sacrifice à autre chose que soi et, comme on l’a dit, par une « duperie » profitable à l’ordre universel et qui dès lors n’est plus duperie : mais pour croire que ce n’en est pas une, il faut faire effort, et sans doute la morale doit commencer par un acte de foi, formulé ou non.

51. (1759) Réflexions sur l’élocution oratoire, et sur le style en général

La prononciation seule lui fera aisément distinguer les mots doux et sonores, de ceux qui sont rudes et sourds, et par la même raison les mots dont la liaison est harmonieuse et facile, de ceux dont l’union est dure et raboteuse. […] Il ne suffit point au style de l’orateur d’être clair, correct, noble, harmonieux, vif et serré ; il faut encore qu’il soit facile, c’est-à-dire que le travail ne s’y fasse point sentir. […] Rien n’est donc plus opposé au style facile, et par conséquent au bon goût, que ce langage figuré, poétique, chargé de métaphores et d’antithèses, qu’on appelle, je ne sais par quelle raison, style académique, quoique les plus illustres membres de l’Académie Française l’aient évité avec soin et proscrit hautement dans leurs ouvrages. […] Mais l’élocution n’a pour tous qu’une même règle ; c’est d’être claire, précise, harmonieuse, et surtout facile et naturelle. […] J’ai dit que nous scandions les vers à contresens ; la démonstration en est facile.

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