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363. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Préface »

— Il s’était pourtant expliqué et prononcé dès longtemps sur son refus d’y entrer ; il n’avait pas même attendu qu’on lui en fît la proposition, car il écrivait dès le 28 juin 1868 : « … On est en train de faire pour Le Moniteur une grosse sottise, et on la fera. […] …   « Tout à vous, « Sainte-Beuve. » Et le lendemain (31 décembre), il expliquait plus au long les motifs de sa retraite, dans une nouvelle lettre à M.  […] Je me réserve d’expliquer au public ce qui m’importe, comment et pourquoi, ayant refusé d’être du nouveau Moniteur officiel, je me retire forcément dès le premier jour du nouveau Moniteur universel.

364. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre II. Rapports des fonctions des centres nerveux et des événements moraux » pp. 317-336

. — Ainsi l’opposition foncière des deux procédés de formation suffit à expliquer l’irréductibilité mutuelle des deux représentations. […] Car, les deux événements étant irréductibles entre eux par nature, ils forment deux mondes à part, isolés ; nous excluons par hypothèse tout événement plus général dont ils seraient des formes distinctes et des cas particuliers ; nous déclarons d’avance que leur nature ne fournit rien qui puisse fonder leur dépendance réciproque ; nous sommes donc obligés, pour expliquer cette dépendance, de chercher au-delà de leur nature, partant au-delà de toute la nature, puisqu’ils font à eux deux toute la nature, par conséquent enfin dans le surnaturel ; ainsi nous devrons appeler à notre aide un miracle, l’intervention d’un être supérieur. Les philosophes du xviie  siècle, Leibniz et Malebranche en tête, avaient nettement aperçu cette conséquence et concluaient hardiment qu’il y a là une harmonie préétablie, l’accord artificiel de deux horloges indépendantes, un ajustement extrinsèque et venu d’en haut, un décret spécial de Dieu. — Rien de moins conforme aux méthodes de l’induction scientifique, car elles excluent toute hypothèse qui n’explique pas, et, comme on le montrera, le principe de raison explicative est un axiome qui ne souffre aucune exception157.

365. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

On s’explique ainsi la gloire de cet homme, devant qui s’inclinaient et Descartes et Corneille, et dont les moindres pages faisaient événement dans l’Hôtel de Rambouillet. […] Mais il est comme la conscience de son siècle : j’aperçois chez lui nettement ce qu’il faudrait beaucoup de peine et de temps pour analyser dans la société et dans la littérature du temps ; il révèle certains dessous, qui expliquent les caractères apparents. […] La raison cartésienne se met à la place de Dieu, et compose la machine du monde : mieux encore, elle n’explique pas seulement, elle agit, car de la science dépend la puissance ; par son progrès, elle vaincra la maladie et la mort même.

366. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

Plus on est amusé par ces échappées de verve, et moins on se sent capable de résumer, d’expliquer, de ramener à un semblant d’unité les sentiments littéraires de M.  […] Weiss se soucie de nous l’expliquer   Au reste, ce fervent de Parny est ravi, transporté par la Tour de Nesle, non seulement par le drame, mais par le style. « Le récit de Buridan : En 1293, la Bourgogne était heureuse, est comme le récit de Théramène du grand Dumas. […] Voici quelques passages qui nous l’expliqueront tant bien que mal : Il y avait alors (au temps de Louis-Philippe) une délicatesse et une générosité qui donnaient le ton à la littérature et le recevaient d’elle.

367. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre III. Le Bovarysme des individus »

La croyance chez Sganarelle qu’il peut inspirer l’amour et la certitude où on le voit d’être aimé pour lui-même expliquent seules qu’il soit aveugle à la grossièreté des ruses où il se laisse prendre. […] La part d’inconscience qui entre dans l’exercice de son activité la plus haute explique d’autre part comment l’homme de génie risque de prendre le change sur son destin. […] Car le snob ne se risque pas à discourir ; son grand art, où quelques-uns vraiment excellent, est de composer et parer son silence ; toute la science de son jeu est de ne point s’expliquer, de s’en tenir à une attitude, à une expression, à un geste, tout au plus à quelque adjectif.

368. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre I : De la méthode en général »

Par elle, l’esprit découvre une planète que les sens n’ont jamais vue ; par elle, il explique une langue qu’aucun homme ne comprenait plus ; il déchiffre des caractères mystérieux dont le secret était perdu ; il pénètre bien au-delà des époques historiques, et, en l’absence de tout témoignage direct, jusqu’aux origines de la civilisation indo-européenne ; il calcule enfin ce qui paraît échapper à toute prise, le hasard et l’infini. […] Ainsi l’on voit tous les grands savants, à toutes les époques, se plaire à recueillir leurs idées sur les opérations de leur esprit, à expliquer les procédés qui leur ont réussi, à en donner les exemples et les règles. […] « Une théorie établie sur vingt faits, dit-il, doit servir à en expliquer trente, et conduit à découvrir les dix autres ; mais presque toujours elle se modifie ou succombe devant dix faits nouveaux ajoutés à ces derniers25. » De là la nécessité du doute scientifique, qu’il ne faut pas confondre avec le scepticisme ; celui-ci doute de la science elle-même, le premier ne doute que des conceptions arbitraires de notre esprit.

369. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Préface de la seconde édition »

Que la matière de la vie sociale ne puisse pas s’expliquer par des facteurs purement psychologiques, c’est-à-dire par des états de la conscience individuelle, c’est ce qui nous paraît être l’évidence même. […] On a dit que nous expliquions les phénomènes sociaux par la contrainte, de même que M. Tarde les explique par l’imitation.

370. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Hippolyte Babou »

Puisque Babou sait tout cela, puisqu’il a l’expérience de la vie littéraire, — la plus cruelle des expériences, — il reste donc, pour expliquer la publication de son volume, cette fierté d’artiste qui se prend où est sa tendance et là où est aussi la difficulté, et qui a écrit laborieusement de courtes nouvelles où d’autres auraient écrit facilement de très gros romans. […] Ce n’est pas tout, enfin, que d’avoir expliqué Balzac par une faculté unique, l’imagination, — comme on pourrait expliquer Shakespeare, — et montré avec une ingéniosité profonde que le monde qu’il a créé n’a été le vrai qu’après coup ; que quand le monde réel a été frappé et façonné par cette invention toute-puissante !

371. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre V : M. Cousin historien et biographe »

Cousin, si ce n’est dans la possession de cette raison, dans l’art de bien développer, dans la bonne composition, dans la faculté d’expliquer en style élevé et clair les vérités moyennes ? […] Les romans de Mlle Scudéri sont d’une longueur infinie et d’une fadeur étonnante ; elle met une page à expliquer ce que nous dirions en un mot. […] Il nomme toutes les prieures, il expose en style ecclésiastique leurs caractères tous divers, mais tous également saints ; il marque leur famille, il donne des détails sur la généalogie, il explique les circonstances qui les ont retirées du monde.

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