. — Enfants bretons. […] Camille Doucet Ce recueil (Enfants bretons) est presque un poème.
Votre enfant qui pleurait, vous l’avez entendu ! […] Vous ne maudirez pas votre enfant infidèle, Non d’avoir rien vendu, mais d’avoir tout donné. […] La seconde fille de Mme Desbordes-Valmore, poète également si l’on peut appeler de ce nom la sensibilité elle-même, avait plutôt en elle la faculté de souffrir de sa mère, cette faculté isolée, développée encore et aiguisée à un degré effrayant ; pauvre enfant inquiet, irritable, malade sans cause visible, elle se consumait, elle se mourait lentement, et par cela seul qu’elle se croyait moins regardée et favorisée, moins aimée ; devenue l’objet d’une sollicitude continuelle et sans partage (car elle était restée seule au nid maternel), rien ne pouvait la rassurer ni apprivoiser sa crainte, et la plus tendre chanson de sa mère ne faisait que bercer son tourment sans jamais réussir à l’apaiser ni à l’endormir : Inès Je ne dis rien de toi, toi la plus enfermée. […] Cette mère qui avait tant souffert du silence de sa charmante et sauvage enfant et de la voir ainsi mourir sans épanchement et sans plainte, arrivée elle-même aux dernières années et aux derniers mois qui précédèrent sa fin, s’enveloppa dans un silence résigné et profond, admettant à peine la lueur du jour, les soins du médecin ami, et les soulagements passagers par lesquels s’entretient l’illusion des mourants : elle s’éteignit elle-même, lentement, muette et sans illusion.
Pour notre compte, nous attendions avec impatience cette occasion de parler du chef de l’école éclectique, — mort depuis longtemps comme expression d’idées, après s’être tiré dans la tête ce coup de pistolet d’enfant, chargé à bonbons, qu’on appelle l’Histoire de madame de Longueville. […] L’éclectisme, cette combinaison qui vivra dans l’histoire des vacuités humaines, l’éclectisme n’est pas un enfant vrai. C’est un enfant dérobé… et adopté pour les besoins de l’impuissance aux abois ! […] Dans ce temps-là, Victor Cousin était un jeune homme dont tout retentissait dans l’Université ; il était l’enfant gâté de Royer-Collard, cet homme populaire dans la bourgeoisie, qui avait été élu député dans sept collèges !
Ainsi elle n’était pas que poète, cette enfant, elle était aussi la poésie, et tout ce qui aimait la poésie en fut enivré. […] Il reste l’amour des enfants qui peut chanter encore, qui peut chanter toujours : n’a-t-il pas chanté ainsi dans Mme Desbordes-Valmore ? […] Mme de Girardin, qui n’eut point d’enfants et qui le regrette dans des vers qui disent comme elle les eût chantés si elle en avait eu, Mme de Girardin ne put pas être une Valmore, et quand elle cessa d’être Delphine Gay, la poésie qui était en elle, la seule poésie qu’elle pouvait avoir, le cri du cœur ou sa rêverie, l’émotion de vingt ans disparut… et pour faire place à l’industrie des vers, à l’application volontaire, au technique de la chose, enfin au métier ! […] La patrie elle-même n’existe qu’à travers l’époux et les enfants pour les femmes.
Tu pouvais cependant, au gré de ton envie, Puiser pour tes enfants le bonheur et la vie Dans ton éternité ! […] Les enfants héritant l’iniquité des pères ! […] et bientôt, sans doute aussi, le chien, cette incarnation de l’amitié, qui donnerait mille fois son sang de lui-même si on le lui demandait ; le chien, qui se réjouirait de mourir pour nourrir les enfants de son maître, comme il n’hésite jamais à mourir pour le défendre. […] Demandez-le au mineur qui renonce même au soleil des cieux et à l’air des vivants pour creuser éternellement, comme la taupe, ses galeries souterraines dans les flancs de fer, de cuivre ou de houille des montagnes, et pour extraire chaque soir une poignée de métal monnayé convertie en pain sur la table de sa femme et de ses enfants ! […] … Ainsi de nos pères, de nos mères, ainsi de nos enfants, ainsi de nos amis, ainsi de nos contemporains, ces parents de temps auxquels nous nous attachons par contiguïté de berceau, par voisinage de sépulcre ; êtres aimés que nous espérions devoir nous survivre, et dont nous voyons les rangs s’éclaircir prématurément autour de nous, et nous laisser seuls de nos dates comme des traîneurs de la vie, dépaysés dans des générations inconnues !
Il est enfant du peuple, fils d’honnêtes gens, de gens de peine et de travail. […] On eut bientôt besoin de plumes et de défenseurs ; on en prit jusque parmi les enfants. […] On a vu, depuis, la République prendre ses défenseurs, à son tour, jusque parmi les enfants et organiser les mobiles. […] Veuillot, qui fut d’abord un des mobiles du gouvernement de Juillet, un des enfants terribles qu’il enrôla : « Sans aucune préparation, dit-il, je devins journaliste. […] Ce sont des pasteurs qui promènent leurs épouses, leurs enfants ou leurs fiancées : ils n’ont guère autre chose à faire. » Notez qu’ici ce ne sont pas les nécessités de la polémique qui commandent, c’est pur zèle et train habituel d’esprit.
Elles traversent, comme Aréthuse, l’onde amère ; elles résistent au feu, comme ces enfants de l’Écriture que leur bon ange sauva, et qu’il rafraîchit même d’une douce rosée dans la fournaise. […] Lucien, le frère du consul, est le premier personnage historique qui l’aime (car je ne puis compter Barère, qui l’avait connue enfant autrefois). […] Cette jeune femme, en face de ces passions qu’elle excitait et qu’elle ignorait, avait des imprudences, des confiances, des curiosités presque d’une enfant ou d’une pensionnaire. […] Elle a conservé presque jusqu’à la fin ce rire enfant, ce geste jeune qui lui faisait porter son mouchoir à la bouche comme pour ne pas éclater. […] Elle était sensible en effet à tout regard et à toute louange, à l’exclamation d’un enfant ou d’une femme du peuple tout comme à la déclaration d’un prince.
Nous ne sommes pas ici des puristes constitutionnels : ce qu’elle voulait, ce n’était pas la Constitution de 91 assurément, c’était le salut du trône, celui de la France comme elle l’entendait, l’honneur du roi et le sien, et celui de sa noblesse, l’intégrité de l’héritage à léguer à ses enfants ; ne lui demandez pas autre chose. […] Aux journées fatales, aux journées d’insurrection et d’émeute, quand sa demeure tout entière est envahie, elle est à son poste ; elle essuie l’outrage avec fierté, avec noblesse, avec clémence, en même temps qu’elle couvre de son corps ses enfants. […] Une fois enfermée au Temple, elle fait de la tapisserie ; s’occupe de l’éducation de sa fille et de son fils, compose pour ses enfants une prière, et s’accoutume à boire le calice en silence. […] Je suis calme comme on l’est quand la conscience ne reproche rien ; j’ai un profond regret d’abandonner mes pauvres enfants. […] Le lendemain, elle écrivit qu’elle ne pouvait s’y décider, puisqu’il fallait, en fuyant, se séparer de son fils : « Quelque bonheur que j’eusse éprouvé à être hors d’ici, écrivait-elle, je ne peux pas consentir à me séparer de lui… Je ne pourrais jouir de rien en laissant mes enfants, et cette idée ne me laisse pas même de regrets ».
Dans l’enfant nouveau-né, le cerveau ne manifeste aucune fibrille nerveuse : c’est une sorte de pulpe, de gélatine molle, noyée dans les vaisseaux sanguins. […] Au bout de quelques mois au contraire, les parties antérieures et supérieures se développent avec plus d’énergie que les autres parties, et alors commencent pour l’enfant l’attention, la réflexion, le langage, en un mot les facultés vraiment rationnelles. […] Il faudrait, par exemple, choisir chez ces races sauvages et infirmes un enfant à la mamelle, et, le transportant en Europe, l’instruire à la manière des nôtres et voir s’il pourrait s’élever au niveau de nos propres enfants. Je n’hésite pas à penser que dans ces conditions un enfant de n’importe quelle race (à moins qu’il n’appartint à une variété maladive28, ce dont il faudrait tenir compte), ne fût susceptible d’un développement intellectuel peu différent de celui des autres races29 ; mais, sans faire de telles hypothèses, on peut déjà conclure des faits mêmes que nous connaissons, que dans toute race il peut y avoir tel individu capable de s’élever au niveau moyen de l’espèce humaine.