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386. (1880) Goethe et Diderot « Note : entretiens de Goethe et d’Eckermann Traduits par M. J.-N. Charles »

Ce livre, dans lequel on a ramassé pieusement tout ce qui est sorti de la bouche sacrée du dieu Gœthe pendant les dernières années de son passage sur la terre, me fait, dès à présent, l’effet de ce fameux collier que les adorateurs du Grand Lama se roulaient autour du cou pour s’attester leur dieu, selon les histoires… Ils disaient que c’était là de l’ambre céleste ; et vous savez ce que c’était. […] Gœthe, en effet, cet habile, qui aurait le plus grand génie si le génie était jamais une résultante d’habileté ; Gœthe, ce savant metteur en œuvre, ce roué d’art, de moyens et de réussite, qui dans sa vie fut ce qu’il est toujours dans ses ouvrages : un homme d’effet calculé ; Gœthe, enfin, le puissant jeteur de poudre aux yeux, paraîtra, à ceux qu’il n’a pas tout à fait aveuglés, effroyablement diminué par les révélations d’Eckermann. […] Et cela, mis ainsi à côté de l’Auguste lilliputien de la cour de Weimar, fait l’effet d’être gigantesque.

387. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IV. M. Henri Martin. Histoire de France » pp. 97-110

Le nombre des volumes qu’un homme publie, les matières qu’ils renferment, les lectures qu’ils supposent, tout cela produit dans les têtes innocentes un effet qui commence le succès et qui l’a commencé pour M.  […] « et, c’est ainsi, dit l’historien dont la tête fait l’effet d’une table tournante, que la grande âme de la Gaule éclate partout, partout — dans le sanctuaire du chêne, — dans le libre arbitre de Lérins et du Paraclet, dans la souveraine indépendance de l’inspiration de Jeanne d’Arc et… dans le moi de Descartes ». […] Il en craint l’effet sur les bourgeois.

388. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Lamennais »

Forgues a donné, lui, tout ce qu’il a pu de cette correspondance qui, malheureusement, s’arrête de 1839 à 1840, c’est-à-dire au curieux moment où Lamennais, âgé de plus de cinquante ans et cessant d’être ce qu’il avait été jusque-là, venait de publier ces Paroles d’un croyant que, dans la cécité de son illusion, il croyait un livre exclusivement politique, et qui firent l’effet, quand elles parurent, d’une torche dans un champ de blé. […] De bonne foi sur le fond des choses, mais par cela seul qu’il veut les exprimer de manière à plaire à l’esprit ou à le convaincre davantage, l’écrivain calcule ses effets pour ses livres comme le comédien pour la scène, — et ceux-là, parmi les écrivains, qui passent pour les plus inspirés, sont ceux dont le calcul est le plus rapide mais n’en est pas moins du calcul. […] Il faut voir, au contraire, dans la Correspondance, le peu d’effet que produisit sur lui la note trouvée dans les papiers de Léon XII, qui le désignait pour la plus prochaine promotion au cardinalat.

389. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Alexandre de Humboldt »

l’essentiel, c’est « l’expression noble, qui ne manquera jamais, si elle l’est, l’effet grandiose de la nature », dit ce tulipier de la phrase, et pardonnez-nous de l’avoir appelé : un beau parleur scientifique, après cela ! […] Dans une époque qui pousse cet amour des faits jusqu’à préférer les plus petits aux plus gros, uniquement parce qu’ils sont les plus petits, — qui a mis je ne dis pas l’Histoire, mais l’historiette à la place de tout, qui dernièrement, en ses journaux, pour se dispenser d’avoir du talent, a inventé la Chronique, cette chose amusante, la chronique, chère au dilettantisme littéraire de messieurs les portiers, — n’est-il pas tout simple qu’Alexandre de Humboldt, le chroniqueur de la science du xixe  siècle, l’arpenteur du globe qui montre les mesures qu’il a prises, le voyageur qui a lu des voyages et qui en a fait, produise sur nous tous l’effet d’un Moïse, — d’un Moïse assez bon pour nous, qui ne descend pas de l’Horeb avec les Tables de la Loi, mais du Chimboraço avec un album dans sa poche ! […] Humboldt a oublié « l’expression noble qui ne manque pas l’effet grandiose de la nature », et avec laquelle ici, s’il ne l’avait pas oubliée, il n’eût pas manqué le ridicule, est adressée à M. de Varnhagen Von Ense, le mari de la fameuse Rachel Varnhagen, la Madame de Staël blonde de l’Allemagne.

390. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIV. Alexandre de Humboldt »

L’essentiel, selon lui, n’est point du tout le coup de râteau plus ou moins bien jeté sur les notions des sciences physiques contemporaines et qu’il n’a pas toutes ramassées ; non, l’essentiel, c’est « l’expression noble qui ne manquera jamais, si elle l’est, l’effet grandiose de la nature », dit ce tulipier de la phrase, et pardonnez-nous de l’avoir appelé « un beau parleur scientifique » après cela ! […] Dans une époque qui pousse cet amour des faits jusqu’à préférer les plus petits aux plus gros, uniquement parce qu’ils sont les plus petits, — qui a mis je ne dis pas l’histoire, mais l’historiette à la place de tout, — qui dernièrement, en ses journaux, pour se dispenser d’avoir du talent, a inventé la Chronique, cette chose amusante ; la chronique, chère au dilettantisme littéraire de messieurs les portiers, n’est-il pas tout simple qu’Alexandre de Humboldt, le chroniqueur de la science du dix-neuvième siècle, l’arpenteur du globe, qui montre les mesures qu’il a prises, le voyageur, qui a lu des voyages et qui en a fait, produise sur nous tous l’effet d’un Moïse, — d’un Moïse, assez bon pour nous, qui ne descend pas de l’Horeb avec les Tables de la Loi, mais du Chimboraço, avec un album dans sa poche ! […] Humboldt a oublié « l’expression noble qui ne manque pas l’effet grandiose de la nature », et avec laquelle ici, s’il ne l’avait pas oubliée, il n’eût pas manqué le ridicule, est adressée à M. de Varnhagen Von Ense, le mari de la fameuse Rachel Varnhagen, la Mme de Staël blonde de l’Allemagne.

391. (1902) La formation du style par l’assimilation des auteurs

Il ne cherche pas l’effet, il l’atteint sans qu’on y songe. […] La dernière pensée fait bien plus d’effet qu’un éloquent délayage. […] Plus de rhétorique, plus d’amplification, plus d’effet ostentatoire et voulu. […] On voit les beaux effets de style que peut engendrer l’antithèse. […] C’est un genre facile dont l’effet est sûr.

392. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

tant d’effets si beaux le ventre les opère ! […] — Vous vous trompez et sur l’objet de mes censures et sur l’effet qu’elles produisent. […] Les règles qu’il se sera faites, ou qu’on lui aura données sur cette matière, ne s’accorderont pas avec les qualités et l’effet des comédies. […] Le grand effet de cette sorte de pièces résulte de la justesse des deux combinaisons exactement en équilibre. […] Telle anecdote vous paraît piquante, et produit le même effet sur quelques personnes, qui ne le produira pas sur le public.

393. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

On l’a remarqué avec une grande justesse : on peut avoir plus d’une opinion, selon le point de vue où l’on se place, sur l’utilité, sur les effets plus ou moins fructueux et louables de l’entreprise saint-simonienne ; mais en la considérant dans sa visée et son acception la plus étendue, en la dégageant des singularités et des ridicules qui s’y sont finalement mêlés, on n’en saurait méconnaître la valeur et la portée. […] Le Saint-Simonisme, quand il n’aurait eu que cet effet d’obliger le libéralisme à se replier sur lui-même et à se fortifier, aurait rendu un service. […] Certes, je suis loin de méconnaître les progrès que l’art musical a faits depuis les couvents, j’ai admiré plus que tout autre le Requiem de Mozart et les messes de Cherubini, et, pour qui se tient au point de vue de l’art pur, nul doute que les vastes proportions, la richesse d’harmonie, les grands effets d’instrumentation des compositions modernes n’offusquent singulièrement la simplicité, la nudité du chant grégorien ; sous ce rapport, il n’y a pas de comparaison à établir : mais voulez-vous sentir où gît la supériorité réelle du simple chant d’église ? […] quelle entente des effets !

394. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre IV. Le roman »

S’il n’est pas psychologue profond et original, il est du moins observateur attentif des effets réels de la vie morale ; par là il est homme du xviie siècle plutôt que du xviiie . […] Ces vices, ces passions, ces travers, Lesage les habille curieusement, exactement ; habillés, il les fait mouvoir, agir ; il les explique par leurs effets. […] L’intérieur des demoiselles Habert, dans le Paysan parvenu, est un délicieux tableau, d’où se dégage une discrète ironie : il y a là des demi-teintes, un demi-jour assoupi, dont l’effet est exquis. […] Prévost a fait cette simple histoire avec quelques souvenirs de sa vie orageuse : il l’a contée rapidement, sans dissertations et sans gros effets, avec un naturel qui donne la sensation de la vie même.

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