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461. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Parodi, D.-Alexandre (1842-1902) »

Ce n’est pas un sentiment : c’est un poids réel, une douleur causée par un je ne sais quoi de caché, d’invisible, mais que l’on doit pouvoir arracher de la plaie comme un trait de la blessure… Aussi le remords pour Caïn prend-il la forme d’un œil qui brille au fond des cieux, et qui demeure fixé sur le meurtrier.

462. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

Comment résister à tant de douleur ? […] Herman n’a pas le caractère léger ou variable ; si vous repoussez sa demande, j’ai peur que ses plus belles années ne se consument dans la douleur. » Le pharmacien disserte longuement, en homme qui veut masquer sa sensibilité sous un certain pédantisme de diplomatie bourgeoise. […] « Cependant elle cache la douleur qu’elle éprouve au pied et lui dit en riant : “S’il faut en croire les gens bien avisés, quand notre pied craque non loin du seuil de la maison où l’on se dispose à entrer, c’est un signe de malheur. […] Herman, soutenu par sa mère et par les voisins, s’avance vers Dorothée et lui dit d’une voix tremblante d’émotion et d’amour : « “Ne regrette pas ces larmes et cette douleur passagère, car elles ont assuré mon bonheur et le tien aussi.

463. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

IV Je ne voulus pas prendre la plume et analyser la perte que la littérature classique venait de faire en lui, dans le premier moment de ma douleur : je craignais que le cœur en moi ne faussât le jugement ou n’exagérât l’éloge ; je voulais rester vrai pour être juste. J’attendis que les quelques jours de liberté que tout homme trop affairé se donne en automne me renfermassent dans le solitaire manoir de Saint-Point, déshabité maintenant en attendant qu’on m’en dépouille, et me rapprochassent de ce château d’Audour, ouvert il y a moins d’un an à l’hospitalité littéraire, et maintenant fermé par le deuil d’une veuve muette de douleur, qui n’accepte que les consolations de l’amitié. […] « — Vous renouvelez, reprit-elle, toute ma douleur : pauvre Ali ! […] En 1825, dans un accès de fièvre chaude, qu’on attribue à sa douleur de la perte de sa femme, il s’est pendu dans le bois de Caen Wood, maison de campagne de son beau-père lord Mansfield, à dix milles de Londres.

464. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

On peint d’ordinaire les folles, comme si la folie s’arrangeait avec les convenances et donnait seulement le droit de ne pas finir les phrases commencées, et de briser à propos le fil des idées ; mais cela n’est pas ainsi : le véritable désordre de l’esprit se montre presque toujours sous des formes étrangères à la cause même de la folie, et la gaieté des malheureux est bien plus déchirante que leur douleur. […] Comment supporter sa douleur ? […] On avait devant les yeux non pas l’historien, mais la victime de dix années d’exil, la personne qui avait soutenu au prix de tant de douleurs, un long défi contre le pouvoir absolu, avait compté en désespérant chacun de ses victorieux progrès, avait souffert ses rigueurs croissantes, les avait pressenties plus dures encore, et s’était enfin délivrée du mal par une fuite hardie, semant sur sa route de Genève à Londres, en passant par la Russie et la Suisse, la protestation contre la conquête universelle et le serment d’une résistance à vie. […] « En ce moment le tourment d’angoisse et de douleur de madame de Staël paraissait extrême, mais sans incertitude, et sa résolution était invariablement prise pour être exécutée sur l’heure, soit qu’elle sût déjà l’événement de Lons-le-Saulnier et toutes ses conséquences, soit quelle eût conclu de l’état intérieur des Tuileries, d’où elle venait, la perte absolue de toute espérance.

465. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Si j’ai plus souvent relu les Contemplations, c’est que, pendant les heures longues d’une veillée de mars au chevet d’une enfant adorée, les fenêtres ouvrant sur une nuit étoilée, j’ai reçu des Contemplations le soulagement à la plus déchirante parmi les douleurs humaines. […] Pour toute joie, toute douleur, tout sacrifice, tout événement, elle a un chant qui exalte, console, explique ou fortifie. […] Elle est le Beffroi de cette Cité mouvante et multiple, de toute forme et de tout âge, pleine de contrastes : où la Mosquée des Orientales s’arrondit, au milieu des flèches lyriques des Feuilles d’automne et des Voix intérieures, des Rayons et des Ombres, et des Contemplations ; où le Paris des Misérables s’agite autour de la cathédrale de Notre-Dame de Paris, où le drame est représenté par tout un groupe tragique d’édifices, qui relient Aranjuez à la Tour de Londres, le Burg germanique au Louvre, la Renaissance italienne à la Décadence espagnole ; où le prétoire des Châtiments donne sur les camps et sur les tranchées de l’Année terrible, cette cité fantastique que la mer baigne, que les astres sans cesse interrogés illuminent, que les champs et les forêts envahissent ; où la nature, enfin, projette ses splendeurs et ses ténèbres, ses floraisons et ses éruptions, sur les luttes et les douleurs de l’humanité. […] Dans aucun temps, dans aucun pays, aucun poète n’a écouté de plus près, n’a reproduit avec plus de force ce cri de la douleur humaine.

466. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « III »

Ce qu’il voit immédiatement ce sont les mouvements extérieurs, inconscients, causés par une douleur ou une joie. […] Après être entré dans la salle du Gral, il se tient immobile, inerte en face de cette vision de douleur ; les gestes27 des chevaliers qui l’invitent à venir, il ne les comprend pas. […] Une sorte de douleur source l’a envahi, la souffrance de son ignorance, et il secoue la tête tristement pour répondre aux questions de Gurnemanz. […] Nous avons montré dans le premier acte cette émotion intérieure que l’innocent éprouvait devant la passion du Gral, cette douleur compatissante qui le frappait au cœur.

467. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Petit glossaire »

Finies… les douleurs d’entrailles géhennantes. […] De nerveuses douleurs ondèrent dans la poitrine de la jeune femme. […] Qu’importe ta douleur à ma douleur ……………………………………………… Et ta seconde trépidante à ma mort essentielle.

468. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « UNE RUELLE POÉTIQUE SOUS LOUIS XIV » pp. 358-381

Toutes les deux paraissent avoir senti l’infidélité avec une douleur qui n’éteignit pas l’amour : Amour, redonnez-lui le dessein de me plaire ; Mais, quoi que l’ingrat puisse faire, Ne sortez jamais de mon cœur. […] Il semble que cette inspiration d’un amour sans bonheur, la douleur passionnée, ait fait aussi le premier génie de Mme Valmore. […] Sous les grands bois la douleur endormie, En y rêvant, souvent calma ses maux.

469. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

C’est l’inconsolable douleur de cette perte qui lui fait dire avec un accent de conviction naïve bien aussi pénétrant que nos obscurités fastueuses : « Si les pleurs et les soupirs ne peuvent porter le nom de plaisir, il est vrai néanmoins qu’ils ont une douceur infinie pour une personne mortellement affligée97. » Jeté par ce désespoir au sein de la religion, dans l’abbaye de…., où il séjourne trois ans, le marquis en est tiré, à force de violences obligeantes, par M. le duc de…, qui le conjure de servir de guide à son fils dans divers voyages. […] En général, ces personnages sont oublieux, mobiles, adonnés à leurs impressions et d’un laisser-aller qui par instants fait sourire ; l’amour leur naît subitement d’un clin d’œil comme chez des oisifs et des âmes inoccupées ; ils ont des songes merveilleux ; ils donnent ou reçoivent des coups d’épée avec une incroyable promptitude ; ils guérissent par des poudres et des huiles secrètes ; ils s’évanouissent et renaissent rapidement à chaque accès de douleur ou de joie. […] Prévost, réveillé par le scalpel, ne recouvra le sentiment que pour expirer dans d’affreuses douleurs.

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