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465. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — II. Duclos historien » pp. 224-245

» Le portrait de la première Dauphine, de Marguerite d’Écosse, celle qui donna le baiser de sapience à Alain Chartier endormi, et qui mourut à la fleur de l’âge, victime de la calomnie et abreuvée de dégoûts, en disant pour dernière parole : « F. de la vie ! […] Il commence par un tableau circonstancié des dernières années de Louis XIV : ici, malgré les imitations et les emprunts que nous allons signaler, on sent dans le récit de Duclos une vive impression personnelle, qui y donne le mouvement. Enfant, né en 1704, il avait vu cette fin de Louis XIV, comme ceux qui sont nés au commencement de ce siècle, à la date correspondante, ont pu voir les dernières années de l’Empire. […] » Il y a une scène assez piquante dans les derniers temps de Louis XIV. […] Les dernières paroles de la Dauphine furent : « F. de la vie de ce monde, ne m’en parles plus ! 

466. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. (suite et fin) »

Cette doctrine particulière, qu’il étudia et analysa avec une fermeté ingénieuse, ne fut jamais chez lui que secondaire et subordonnée à des principes religieux et moraux supérieurs ; il ne poussa jamais l’examen à ses dernières limites, et les aventures, les constructions de système de ceux qui affectaient en toute occasion de se proclamer ses disciples, par un sentiment de reconnaissance et de déférence sans doute, mais aussi pour se couvrir au besoin de lui, lui restèrent choses extérieures et presque étrangères. […] Royer-Collard un fonds de vieux chrétien qui subsista toujours, qui se réveilla dans ses dernières années, mais qui, même dans la période la plus mondaine et la plus oublieuse, ne lui permit jamais de considérer la philosophie que comme la suivante et, tout au plus, comme la dame de compagnie de la religion. […] Elle n’avait fait jusqu’alors, par ses motions trop zélées et intempestives, qu’impatienter Louis XVIII : mais quand elle voulut lui forcer la main, non-seulement une première, mais une seconde fois, sur cet article capital, et empiéter trop à découvert, par voie d’amendement, sur l’initiative et la prérogative royale, elle le blessa : une légère rougeur lui monta à la joue en apprenant un dernier rejet opiniâtre et la substitution d’un nouveau projet à celui qu’on avait présenté derechef en son nom : « Eh bien ! […] M. de Serre, dès le début de son discours, attaquant de front cette singulière théorie des amendements qui allait à transformer tous les projets présentés et à transporter dans la Chambre l’initiative du pouvoir législatif souverain, força la majorité à entendre malgré elle la longue série de ses méfaits en pareil genre, et de ses continuelles tentatives d’usurpation sur la prérogative royale depuis le premier jour jusqu’au dernier. […] Pasquier se montrait là ce qu’on l’a vu plus tard soit au Luxembourg, soit dans sa vie dernière de retraite et de société, un lien entre les hommes ; mais c’était un lien actif, pénétrant, et il avait déjà doucement préparé les esprits quand il les mettait en présence.

467. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le Général Franceschi-Delonne : Souvenirs militaires, par le général baron de Saint-Joseph. »

Ils arrachèrent au général une dernière dépouille, sa giberne : il consentit à la livrer ; mais, montrant ses décorations : « Vous aurez ma vie, dit-il, avant que vos mains y aient touché. » Les prisonniers ne firent que traverser Séville pendant la nuit. […] Ce malheureux ami, mes camarades, tendaient leurs mains vers moi à travers la grille et m’adressaient leurs vœux pour le succès de mon voyage. » Après le départ du capitaine de Saint-Joseph, c’est l’aide de camp Bernard qui devient le narrateur et qui adresse à son camarade la relation des derniers mois de cette triste captivité. […] « Les Espagnols, qui se montraient de temps à autre dans notre prison, témoignèrent le désir de voir le général, à ses derniers moments, approcher des sacrements, et comme ils insistaient sur ce point, disant qu’en cas de refus les autres prisonniers pourraient en être plus maltraités, j’en parlai amicalement à notre malade. […] Voilà quel fut notre dernier entretien. Ses derniers moments furent, comme sa vie entière, dignes en tout d’admiration.

468. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

car il est tard, la toilette s’achève ; elle eu est aux dernières épingles ; il faut qu’on lui tienne un second miroir : « Je tins quelque temps un second miroir derrière elle, pour lui faire mieux juger de sa parure ; et, sa physionomie se répétant d’un miroir à l’autre, je vis alors une perspective de coquettes, dont aucune ne faisait attention à moi. […] nous faisions, ma rose et moi, une fort triste figure… Au moment où la parure commence, l’amant n’est plus qu’un mari, et le bal seul devient l’amant. » Dans ce charmant chapitre, je relèverai une des taches si rares du gracieux opuscule : redoublant sa dernière pensée, l’auteur ajoute que, si l’on vous voit au bal ce soir-là avec plaisir, c’est parce que vous faites partie du bal même, et que vous êtes par conséquent une fraction de la nouvelle conquête : vous êtes une décimale d’amant. […] Né au cœur d’un pays austère, il n’en eut visiblement aucun reflet nuageux ; on ne pourrait dire de lui ce que M. de Lamartine a dit de M. de Vignet dans une des pièces du dernier recueil, dans celle peut-être où l’on reconnaît encore le plus sûrement l’oiseau du ciel à bien des notes, et où l’on aime à retrouver l’écho le moins altéré des anciens jours : Il était né dans des jours sombres, Dans une vallée au couchant, Où la montagne aux grandes ombres Verse la nuit en se penchant. […] Quand on lui demandait s’il n’avait pas quelque dernier opuscule en portefeuille, il répondait en désignant le Presbytère, l’Héritage, la Bibliothèque de mon oncle, la Traversée, le Col d’Anterne, le Lac de Gers, un choix enfin des meilleurs écrits de M. […] On l’a peu affiché, on l’a peu vanté dans les journaux ; aucun des grands moyens en usage n’a été employé pour pousser à un succès ; eh bien, du 14 décembre dernier au 19 avril, c’est-à-dire en quatre mois (et quels mois de disette, de détresse, on le sait, pour la librairie !)

469. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

La réalité des choses, à chaque moment, me fait l’effet d’une grande mer plus ou moins agitée ; les événements qui surgissent et aboutissent sont les vagues dont se compose la surface mobile ; mais, sous ces vagues apparentes, combien d’autres mouvements plus profonds, plus essentiels, bien qu’avortés et sourds, de qui les derniers dépendent, et que pourtant il n’est donné à nul œil de sonder ! […] Clovis a été découronné dans ces derniers temps de l’espèce d’auréole et, pour tout dire, de perruque à la Louis XIV, dont avaient cru devoir le décorer les derniers historiens ou compilateurs de nos annales. […] Pour lui, cette belle reine venue d’Espagne est un type qui représente, dans sa dernière expression, l’ascendant et l’idée de la royauté barbare sur cette troupe encore nommée les fidèles, mais qui sera bientôt la féodalité armée. […] Les ancêtres de Pepin avaient été évêques de ces dernières villes. […] Cependant, si les vices qui ont déshonoré la Grèce s’y retrouvent dans toute leur laideur, ils ne s’y montrent plus dans leur audace ; ils ne sont plus attribués qu’à des êtres difformes ou ridicules, placés par l’esprit, le cœur et le sang, au dernier degré de l’échelle sociale.

470. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

Ses Mémoires nous le peignent à ravir durant les quinze dernières années de l’ancienne monarchie jusqu’à l’heure où éclata la Révolution de 89. […] Quelques contes, des fables, de jolies romances, de gais couplets, lui avaient déjà valu les encouragements du duc de Nivernais, du chevalier de Bouflers, et les conseils de Voltaire lui-même, au dernier voyage du grand poëte à Paris. […] Le temps depuis a fait un pas, et cette postérité dernière est à jamais éteinte aujourd’hui. […] Les Mémoires de M. de Ségur finissent là aussi, comme s’il avait voulu les clore sur les derniers souvenirs de sa belle et vive jeunesse. […] Decazes usait de sa faveur pour ramener du moins quelque conciliation entre tant de violences contradictoires, M. de Ségur passa les onze dernières années de sa vie dans un loisir occupé, dans les travaux ou les délassements littéraires, entremêlés aux devoirs politiques que les circonstances d’alors imposaient à tous les hommes d’un libéralisme éclairé.

471. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Le roman, chez lui, et la fantaisie à l’espagnole, dont il a gardé des traces, ont toujours pour dernière fin la manifestation des caractères. […] Les dernières pièces de Corneille se caractérisent par l’élimination de plus en plus complète de la passion, même de l’exaltation : il ne reste guère que des volontés plus ou moins fortes, désintéressées et droites. […] Dans les dernières pièces de Corneille, cela devient un système : il combine les atrocités historiques de l’antiquité avec les mœurs politiques du jour, plus rusées que cruelles, et ainsi l’ajustement de l’intrigue aux caractères est moins exact. […] Cette même année 1674, Corneille donna sa dernière pièce, Suréna. […] Il écrit 21 pièces en 8 ans (1628-36), et 14 seulement dans les quatorze dernières années de sa vie (1637-1650).

472. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Lesage et Rollin ne paraîtront plus dans cette histoire ; mais nous retrouverons tout à l’heure les trois grands écrivains qui développent et enrichissent la langue fidèlement continuée par ces deux génies aimables, derniers représentants de la pure tradition du dix-septième siècle. […] L’impression générale et dernière, après une lecture des œuvres lyriques de J. […] C’est moins de la critique que de la guerre, et je n’affirmerais pas que ces prophètes de malheur et ces éplucheurs de mots aient été purs du péché d’envie ; cependant, ne sont-ils pas plus près de la vérité dernière sur la Henriade que la Harpe, qui ne trouve à porter au compte des fautes qu’un seul exemple de « vérités communes exprimées en vers communs ? […] Que dire de la Jeune Captive, et des beautés vengeresses de ces ïambes, qu’il envoyait à son père, de la prison de Saint-Lazare, avec son linge, écrits sur de petites bandes de papier enroulées, d’une écriture si serrée et si fine, qu’il fallait les yeux paternels pour les lire ; que dire des dernières tendresses et des dernières colères de ce cœur si passionné et si haut, sinon que le poète charmant des Élégies et des Idylles prenait l’essor d’un grand poète, au moment où le geôlier de Saint-Lazare vint le chercher pour l’échafaud !

473. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IX. La littérature et le droit » pp. 231-249

A la fin du siècle dernier, Mercier faisait jouer le Déserteur, dont le héros était fusillé au dénouement ; c’était le seul homme que ce dramaturge débonnaire eût tué dans sa carrière ; encore le ressuscita-t-il à la prière de Marie-Antoinette ; le déserteur, dans une version nouvelle de la pièce, fut gracié au dernier moment. […] Si l’on essayait de déterminer dans quel ordre s’est opéré l’affranchissement des diverses matières qui peuvent faire l’objet des livres, on verrait que la littérature pure, celle qui borne ses visées à plaire et à divertir, qui par conséquent ne heurte aucun intérêt grave et ne peut guère commettre d’autre méfait que d’ennuyer, a la première, comme il est naturel, obtenu sa place au soleil ; que la science, grande redresseuse de préjugés et par là suspecte, mais protégée contre les défiances du pouvoir par sa sereine impassibilité comme par les formules mystérieuses dont elle est d’abord enveloppée, a eu déjà plus de peine à se dérober au contrôle des gouvernants excités contre elle par l’Eglise ; que les écrits philosophiques et religieux ou antireligieux, malgré de nombreux retours offensifs de la même Eglise, ont su ensuite se libérer de la surveillance officielle ; enfin que l’histoire, les mémoires, et surtout les ouvrages traitant de questions politiques et sociales, exprimant de la sorte des idées pouvant du jour au lendemain se transformer en actes et troubler l’ordre établi, ont été les derniers à conquérir la faculté de paraître sans encombre. […] Toujours est-il que, dans le cours des quatre derniers siècles, juges, plaideurs, huissiers, avocats ont été mainte et mainte fois maltraités en vers et en prose. […] Victor Hugo, tantôt flagelle le riche juré qui condamne un pauvre hère, coupable d’avoir volé un pain pour nourrir sa famille, et il en appelle au Christ pensif et pâle, Levant les bras au ciel dans le fond de la salle, tantôt il traîne dans la boue la robe rouge des hauts magistrats qu’il assimile à la casaque rouge des forçats, parce que ces punisseurs officiels de la trahison se sont faits complices d’un coup d’État qui a réussi Enfin il n’y aurait pas à chercher bien loin, si l’on voulait signaler une dernière révolte des « intellectuels  » contre les superstitieux adorateurs de la chose jugée.

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