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617. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poëme des champs par M. Calemard de Lafayette. »

M. de Lisle (j’abrège ainsi son nom, il n’a pas à craindre qu’on le confonde avec l’ancien Delille), est de nos jours un talent à part, une nature très-particulière de poëte. […] Lerambert, et je crains de manquer mon effet auprès du public habitué à plus de ton, à plus de couleur, à un relief plus saisissant.

618. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier (suite et fin.) »

Déjà l’année dernière les Alliés craignaient fort le paysan et les partisans ; cette année, ce sera bien autre chose ; ce sera comme nous étions en Espagne, où le soldat aimait mieux mourir de faim que de s’éloigner de dix pas de leurs troupes. […] Ces deux souverains, je ne crains pas de les nommer, Charles X et Louis-Philippe, sont-ils donc restés si fidèles à l’esprit de la Constitution qu’ils avaient solennellement jurée et acceptée ?

619. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Renan, dans ses diversions vers l’Art, n’a rien écrit de plus fin, de plus pénétrant, de plus touchant, que ce qu’il a donné sur la Tentation du Christ, d’Ary Scheffer ; c’est dans ce morceau d’une parfaite élégance et d’un exquis raffinement moral qu’il nous a peut-être livré le plus à nu le secret de son procédé, la nature et la qualité de son âme, et la visée de son aspiration dernière : « Toute philosophie, dit-il, est nécessairement imparfaite, puisqu’elle aspire à renfermer l’infini dans un cadre limité… L’Art seul est infini… C’est ainsi que l’Art nous apparaît comme le plus haut degré de la critique ; on y arrive le jour où, convaincu de l’insuffisance de tous les systèmes, on arrive à la sagesse… » Ceux qui craignaient d’abord que, malgré les précautions sincères de M.  […] J’aurais aimé, du moins, au sujet des Essais, là où je me sens un peu plus sur mon terrain, à indiquer ceux qui me paraissent dans leur genre des morceaux accomplis ou charmants (le Lamennais, les Souvenirs d’un vieux professeur allemand, sur l’Art italien catholique, sur l’auteur de l’Imitation de Jésus-Christ, etc.) ; mais je me hâte et ne crains pas d’aborder un seul et dernier point, celui qui intéresse le plus vivement, à l’heure qu’il est, le public et la jeunesse.

620. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

Mais l’humanité enfin est émancipée, je le sais ; elle n’a plus de déluge à craindre, à la bonne heure ! […] Guéroult n’a pas craint d’aller de l’avant dans le sens de ses convictions, au risque de recevoir quelque froissement d’amour-propre, et alors il ne s’irrite pas, il ne s’aliène pas.

621. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français, et de la question des anciens et des modernes, (suite et fin.) »

  Mais j’en viens, il en est temps, à la seconde partie de mon dire, et j’ai à expliquer, sans trop vouloir le défendre, le mot qui m’a été amicalement reproché : « Les Anciens, je le crains, perdront tôt ou tard une partie de la bataille. » I. […] Il ne craint pas même d’y découvrir et d’y voir une sorte de perfection morale naturelle qui ne s’est plus rencontrée depuis ; il y admire une morale primitive et populaire « qui ne se traduisait pas par des préceptes et des sentences, mais qui produisait de si grandes actions et de si grands peuples », — petits en nombre, grands par le cœur.

622. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid. »

Fournier pousse l’explication plus loin, et comme il serait singulier en effet qu’une simple femme d’esprit âgée, voulant remettre à sa place une jeunesse impertinente qui l’offense, lui parlât de charmes qui ne craignent pas les ravages du temps, et la menaçât de tenir en main l’idée qu’on pourra se faire un jour de sa beauté, de ses attraits si insolents à l’heure qu’il est et si superbes, l’interprète habile, qui n’est jamais en reste, a raconté, sur la foi de je ne sais quelle tradition, toute une historiette dont il n’indique pas la source. […] Encore une fois il y a malentendu, et du côté de l’Allemagne je crains que ce ne soit presque sans remède.

623. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Cabarrus ; à huit heures sonnantes, je sortirai seul avec lui. » On insista ; on craignait un malheur qui aurait souillé la Révolution, pure jusque-là de toute effusion de sang. […] Quand il a trouvé une forme heureuse, il ne craint pas d’en user, d’en abuser même, jusqu’à satiété et extinction.

624. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Observations sur l’orthographe française, par M. Ambroise »

Je prends vite un exemple, et je ne crains pas de le prendre parmi les mots les plus suspects, les plus compromis d’avance. […] Je faisais tout ce que je pouvais, on le voit, pour enhardir et pour émoustiller l’Académie ; mais je crains bien d’en avoir été pour mes frais : on m’assure que, depuis, elle est retombée il sa timidité naturelle et qu’elle concédera bien peu des réformes désirées.

625. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Je relève dans ce Mémoire un heureux coup de crayon donné en passant, et qui caractérise en beau M. de Choiseul : « M. le duc de Choiseul, un des hommes de notre siècle qui a eu le plus d’avenir dans l’esprit ; qui déjà, en 1769, prévoyait la séparation de l’Amérique d’avec l’Angleterre et craignait le partage de la Pologne, cherchait dès cette époque à préparer par des négociations la cession de l’Égypte à la France, pour se trouver prêt à remplacer, par les mêmes productions et par un commerce plus étendu, les colonies américaines le jour où elles nous échapperaient… » Voilà un éloge relevé par un joli mot : un joli mot, en France, a toujours chance de l’emporter sur un jugement. […] Mais un nouvel intérêt commun fait passer aisément l’éponge sur d’anciens griefs et rapproche vite les politiques ; on ferma les yeux des deux côtés : « Talleyrand craignait d’être mal reçu de Napoléon.

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