Cependant, comme aux deux siècles précédents, les agitations parlementaires font parfois appel ou donnent issue aux facultés oratoires des magistrats : dans les querelles religieuses de la première moitié du siècle, on distingue l’âpre fermeté du janséniste abbé Pucelle, dans les luttes du Parlement contre la cour et les ministres qui précèdent la Révolution, les fougueux emportements de Duval d’Epréménil. […] Il guida admirablement le Tiers dans sa lutte contre les deux autres ordres, contre la cour et le roi. […] Sa correspondance avec le comte de la Mark le justifie en partie : il reçut en effet une pension de la cour ; écrasé de dettes, ayant d’immenses besoins d’argent, il trouva le salut dans cette combinaison : c’était une indélicatesse, qu’avec son immoralité radicale il ne sentit pas. […] Mais ceux qui le payaient ne croyaient pas en lui ; ceux qui l’écoutaient n’y croyaient plus : la cour perdit son argent. […] Il était égalitaire, contre la cour et la noblesse ; absolument indifférent et irréligieux, sans hostilité contre les prêtres ; aristocrate, en face du peuple, moins par conviction politique que par répugnance d’homme bien élevé.
Ainsi, en rendant à l’Abbé Chiron (plus connu sous le nom de Boismorand) les Anecdotes de la Cour de Philippe-Auguste, qu’on lui attribue ; à M. Baudot de Juilly, l’Histoire de Louis IX, celle de Charles VI, & celle de la Révolution de Naples ; il ne resteroit à Mademoiselle de Lussan que la Vie du brave Crillon, Ouvrage prolixe & assez mal écrit, ainsi que toutes les autres Histoires qu’elle a adoptées, si on en excepte les Anecdotes de la Cour de Philippe Auguste.
Dans un ballet-intermède, il dansa, ainsi que tous les jeunes seigneurs de la cour. […] La quatrième, celle qui se croit adorée de tous les hommes, est une autre grande dame de la cour. […] On la joua à la Cour, un mois après son apparition au théâtre. […] La Cour avait toujours conservé pour elle une prédilection marquée. […] Trois fois cette admirable tragédie fut jouée à la Cour par ces grands personnages.
Catherine de Médicis en avait introduit l’usage à la cour de France et inspiré le goût à ses enfants. […] La cour défendit aux Italiens de continuer leurs représentations. […] La cour refusa de recevoir ces lettres et défendit aux Italiens de se prévaloir jamais de lettres pareilles sous peine de dix mille livres parisis d’amende, applicables à la boite des pauvres. […] En France elle allait exciter l’enthousiasme de la cour et de la ville, et jouir de la faveur particulière de Marie de Médicis et de Henri IV. […] Callot l’a dessiné en face d’un autre mime plus célèbre encore, Pietro Maria Cecchini, connu sous le nom de Gian-Fritello ou Fritellino, qui eut un succès extraordinaire à la cour de Mathias, empereur d’Allemagne, et qui fut anobli par cet empereur.
C’étaient mêmes idées, mêmes principes, mêmes habitudes ; dans toutes une vie régulière et décente, des mœurs chastes, un esprit orné, une raison cultivée, également opposée aux mœurs de la cour, à la pédanterie des précieuses outrées, et à la dévotion feinte ou réelle qui était le refuge de la galanterie repentante ou répudiée. […] Se donner un directeur, était, pour les femmes du monde de la capitale, un usage, une mode ; pour madame Scarron, c’était quelque chose de plus, du moment qu’elle devait avoir des relations avec la cour, c’était une convenance de signaler son esprit de religion par le choix d’un directeur. […] Voulant être distinguée du roi, lui être agréable, parce qu’elle l’aimait, mais voulant son estime et conserver le respect d’elle-même, pouvait-elle employer des moyens à l’usage des femmes ordinaires, mettre en pratique cet art de plaire, cet art de la cour, qui comprend l’art de nuire à tout ce qui n’est pas soi ; à intriguer contre une favorite a qui et le doit sa place ; à lui tendre des pièges, à lui opposer d’autres femmes dont elle pourra avoir bon marché, à rechercher les occasions de s’introduire près du maître, de surprendre ses regards, de les attirer par des soins et des parures qui déguisent son âge ; à se faire vanter, célébrer par des prôneurs ; à se distinguer tantôt par la finesse de la louange, tantôt par son enthousiasme, toujours par l’à-propos ; à rappeler d’une dis tract ion, à faire revenir d’un caprice par des bouderies, par des querelles, par des minauderies ; en un mot, à pratiquer le manège d’une coquetterie subalterne ? […] Elle se faisait ordonner, au nom de la religion, de demeurer à la cour, ou d’annoncer qu’elle avait intention de la quitter, suivant qu’elle avait à se plaindre ou à se louer du roi ou de madame de Montespan. […] Madame de Maintenon, dans son 3e entretien, répondant à une amie qui la plaignait de ne pouvoir consulter personne à la cour dans les occasions délicates, répondit : « J’ai un fort honnête homme, de très bon esprit, qui me décide de gros en gros ce que je puis faire en sûreté de conscience et ce que je dois éviter pour ne point passer les bornes de mon état.
« On se moquait à la cour, dit madame de Caylus, de ces sociétés de gens oisifs, uniquement occupés à développer un sentiment et à juger d’un ouvrage d’esprit. Madame de Montespan elle-même, malgré le plaisir qu’elle avait trouvé autrefois dans ces conversations, les tourna après en ridicule pour divertir le roi63. » Il était fort naturel sans doute qu’à la cour, où tant d’intrigues étaient toujours en action, soit pour la galanterie ou pour la fortune, on regardât comme oisifs les gens qui faisaient les plaisir de la conversation, et que le roi et madame de Montespan, dans les ébats d’un double adultère, eussent besoin de donner un nom ridicule aux personnes spirituelles de mœurs régulières et décentes. […] On lit dans les mémoires de mademoiselle de Montpensier, qu’en 1658, pendant le séjour que fit la cour à Bordeaux, les beaux esprits ne bougeaient de chez la comtesse de Maure. […] Elle avait de l’esprit infiniment, un esprit capable, instruit, extraordinaire en toute chose, il fallait une grande politesse pour être de sa cour ; car tout ce qu’il y avait d’honnêtes gens de tout sexe s’y rendait de tous côtés.
Babylone, à elle seule, enfreignait pour le service de la cour un haras de seize mille cavales et de huit cents étalons. […] Sa cour était un monde de dignitaires, de gardes, de veneurs, de pages, d’eunuques et d’esclaves. […] Une autre fois il fit enterrer vifs douze jeunes nobles, la tête en dehors du sol, sans prétexte aucun, sans colère, parce que telle était sa fantaisie du moment. — Un jour, il ordonne de faire mourir Crésus qui, depuis la conquête de son royaume par Cyrus, vieillissait honorablement à la cour de Perse. […] Des intrigues de cour compliquaient et envenimaient ces griefs.
Le comte de Fersen et la cour de France Le Comte de Fersen et la Cour de France. […] Ce livre est moins, malgré son titre, le comte de Fersen et la Cour de France 27, que l’Europe et la vieille société européenne, mourant de ce xviiie siècle qui l’avait corrompue. […] Les rois européens ne s’entendaient pas plus entre eux que le Roi de France avec les princes, que les princes avec la cour, et la grande noblesse avec la petite.
La Rue fut l’orateur de la cour, dans cette époque qui succéda à quarante ans de gloire, lorsque Louis XIV, malheureux et frappé dans ses sujets comme dans sa famille, ne comptait plus au-dehors que des batailles perdues, et voyait successivement dans son palais périr tous ses enfants. […] Simple, modéré, sans faste à la cour et dans celle de Louis XIV, si l’on en croit nos aïeux, il eût gouverné comme Lycurgue, il eût été adoré comme Trajan : Que pense-t-on de moi dans Paris , demandait-il souvent ? […] Tel est le fond du tableau que nous présente l’orateur ; il peint en même temps la jeune duchesse de Bourgogne, adorée de la cour, et dont les vertus aimables mêlaient quelque chose de plus tendre aux vertus austères et fortes de son époux ; il la peint frappée comme lui, expirante avec lui, sentant et le trône et la vie, et le monde qui lui échappaient, et répondant à ceux qui l’appelaient princesse : Oui, princesse aujourd’hui, demain rien, et dans deux jours oubliée. […] Cet orateur, si connu par son éloquence, tantôt persuasive et douce, tantôt forte et imposante, qui développait si bien les faiblesses de l’homme et les devoirs des rois, et qui, à la cour d’un jeune prince, parlant au nom des peuples comme au nom de Dieu, fut digne également de servir à tous d’interprète ; cet orateur, qui sut peindre les vertus avec tant de charmes, et traça de la manière la plus touchante le code de la bienfaisance et de l’humanité pour les grands, n’a pas, à beaucoup près, le même caractère dans ses éloges funèbres.