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658. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre II : L’intelligence »

Percevoir une maison, c’est associer en un groupe unique des idées de forme, hauteur, solidité, couleur, position, distance, etc. ; par la répétition et l’habitude, ces notions se sont fondues en un tout qui est perçu presque instantanément. […] Ce mode de reproduction mentale peut s’établir de la façon suivante : « Des actions, sensations, sentiments qui se produisent ensemble ou se succèdent immédiatement, tendent à naître ensemble, à adhérer de telle façon que quand plus tard l’un se présente à l’esprit, les autres sont aussi représentés. » Les états associés peuvent être ou bien de même nature (sons avec sons, mouvements avec mouvements, etc.), ou de nature différente (couleur avec résistance, mouvement avec distance, etc.).

659. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Raphaël, pages de la vingtième année, par M. de Lamartine. » pp. 63-78

Ainsi, lorsqu’au sortir d’une scène d’orage, où il a secouru et longtemps veillé Julie évanouie, Raphaël nous décrit, au matin, l’abbaye de Hautecombe, avec son architecture vivante de ronces, de lierres flottants, de giroflées suspendues, de plantes grimpantes, avec son luxe de soleil, de parfums, de murmures, de saintes psalmodies des vents, des eaux, des oiseaux, des échos sonores…, quand il s’écrie : « La Nature est le grand prêtre, le grand décorateur, le grand poète sacré et le grand musicien de Dieu » ; il se sent obligé presque aussitôt de nous avertir qu’il n’a songé à tout cela que depuis : « Je n’étais pas, en ce moment, assez maître de mes pensées, dit-il, pour me rendre compte à moi-même de ces vagues réflexions. » Pourquoi donc alors venir nous en rendre compte avec ce double faste de métaphysique et de couleurs ? […] Car la poésie est l’essence des choses, et il faut bien se garder d’étendre la goutte d’essence dans une masse d’eau ou dans des flots de couleur.

660. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Madame Récamier. » pp. 121-137

Dans ces deux époques si tranchées de couleur, elle fut la même au fond, mais elle dut paraître bien différente. […] « C’est une manière, disait-elle, de mettre du passé devant l’amitié. » Sa liaison avec Mme de Staël, avec Mme de Moreau, avec les blessés et les vaincus, la jeta de bonne heure dans l’opposition à l’Empire, mais il y eut un moment où elle n’avait pas pris encore de couleur.

661. (1876) Du patriotisme littéraire pp. 1-25

De toutes ces richesses mélodiques, je dois me borner à détacher deux strophes de Philippe Desportes et deux stances de Lamartine : Si je ne loge en ces maisons dorées Au front superbe, aux voûtes peinturées D’azur, d’émail et de mille couleurs, Mon œil se paît des trésors de la plaine Riche d’œillets, de lis, de marjolaine Et du beau teint des printanières fleurs. […] Au contraire, un seul excepté, tous les grands poètes de la France, je dirai même plus, tous les écrivains en vers de quelque valeur, ont compris que la Rime contenait en grande partie la musique et la couleur de notre poésie nationale.

662. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre XI. Seconde partie. Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère de la littérature et des arts » pp. 326-349

Les exploits et les aventures diffèrent, mais la couleur de ces exploits et de ces aventures, mais la physionomie des héros, sont les mêmes. […] Les peintres qui ont cru pouvoir adopter le nu se sont étrangement trompés ; car, dans les tableaux, les personnages n’ont plus ce voile de l’immobilité et de l’absence de la couleur.

663. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVI. »

Il peindra de vives couleurs la corruption romaine ; et, singulier hasard ! […] Mais il ne reste rien que d’exquis pour le goût et la vivacité des couleurs : il n’y manquerait pas même l’enthousiasme, le mens divinior, ce qu’Horace demandait au poëte, et ce qu’il a trouvé pour lui-même, parfois sans y prétendre.

664. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Baudelaire.] » pp. 528-529

Vous dire que vous n’avez reculé, en rassemblant vos Fleurs, devant aucune sorte d’image et de couleur, si effrayante et affligeante qu’elle fût, vous le savez mieux que moi ; c’est ce que vous avez voulu encore.

665. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « LES FLEURS, APOLOGUE » pp. 534-537

N’étant pas Mme Sand, je ne décrirai rien, et je ne les nommerai même pas, de peur de faire quelque grossière confusion : ce que je sais bien, c’est que c’étaient des fleurs rares, de qualité ; nobles de port, vives ou tendres de couleur, exquises de parfum.

666. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MARIA » pp. 538-542

Je pourrais bien ici faire le romanesque, Vous peindre Maria dans la couleur mauresque, Quelque gitana fière, à l’œil sombre, au front d’or ; Mais je sais peu décrire et moins mentir encor.

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