La couleur ! […] La couleur, cette chose moderne qui est devenue une exigence, était rare dans la littérature historique d’autrefois, plus grave et plus nerveuse que colorée. […] Ici l’impression et la couleur sont si justes que l’écrivain n’a pas besoin de peser sur son récit. […] La couleur — la couleur espagnole aussi ! […] mourut d’avoir bu du sang de taureau, il ne meurt pas du sien ; il ne meurt pas de sa couleur ; mais recommence de la répandre et de la boire !
Après d’excellentes études littéraires, sa famille le dirigeait vers la magistrature ; il était avocat, et presque déjà docteur en droit, si je ne me trompe, quand le génie de la couleur l’a séduit. […] On eût dit un tapis de velours de trois couleurs et d’épaisseur inégale ; rasé court à l’endroit des champs, plus laineux à l’endroit des bois. […] Il ne faut pas abuser, sans doute, de cette fusion du moral dans le naturel ; il faudrait encore moins se l’interdire et s’en tenir systématiquement à la couleur toute pure. […] Le peintre, avec son pinceau, peut rendre bien des choses, en dehors même de la couleur pure ; il peut donner idée du mouvement, du bruit, du fracas ; mais le silence, comment l’exprimer ? […] Je n’ai plus que l’abri étroit de mon parasol, et je m’y rassemble ; mes pieds posent dans le sable ou sur des grès étincelants ; mon carton se tord à côté de moi sous le soleil ; ma boîte à couleurs craque, comme du bois qui brûle.
Glacer, c’est passer sur le tout une couche légère de la couleur et de la teinte qui convient à chaque partie. Cette couche peu chargée de couleur et très chargée d’huile, fait la fonction et a le défaut d’un vernis ; l’huile se sèche, et jaunit en se séchant ; et le tableau s’enfume plus ou moins, selon qu’il a été peint plus ou moins franchement. On dit qu’un peintre peint à pleines couleurs ou franchement, lorsque ses couleurs sont plus unes, moins tourmentées, moins mélangées. On conçoit que l’huile répandue sur les endroits où il y a beaucoup de différentes couleurs mêlées et fondues, occasionne une action des unes sur les autres et une décomposition d’où naissent des taches jaunes, grises, noires, et la perte de l’harmonie générale. […] L’art de donner à la peinture des couleurs durables est presque encore à trouver.
Voilà la vérité vraie, contre laquelle tous les livres de réfutation ne pourront rien. » Pour rendre cet enseignement clair et pratique, nous avons cru devoir distinguer d’abord deux sortes de style : le style d’idées, ou abstrait, et le style d’images, ou de couleur. […] Il est certain, par exemple, que l’Histoire des Variations, les Provinciales ou l’Esprit des lois sont écrits, chacun dans leur genre, dans un admirable style abstrait, et qu’Atala ou Paul et Virginie sont visiblement écrits en style de couleur ou d’image. Ces évidences sont trop claires pour certaines gens. « Il faut donc, nous fait-on conclure, que Flaubert, ayant de la couleur, manque d’idées, et que Taine, ayant des idées, manque de couleur. […] » Une autre personne aurait simplement remarqué que, s’il y a deux genres de style, rien n’empêche un auteur de les mêler ; qu’en exposant des théories philosophiques dans sa Tentation Flaubert a fait du style abstrait, et qu’en peignant Antioche ou les chrétiens aux lions il fait du style de couleur ; que Taine, parlant philosophie ou suffrage universel, faisait du style d’idées, et qu’en évoquant la campagne italienne ou les Pyrénées il fait du style de couleur. […] Rousseau qu’il faut chercher le commencement de la couleur descriptive, bien que le Contrat social soit encore un bel exemple de style abstrait.
Les instruments y sont disposés avec goût ; il y a dans ce désordre qui les entasse une sorte de verve ; les effets de l’art y sont préparés à ravir, tout y est pour la forme et pour la couleur de la plus grande vérité. […] Je suis sûr que lorsque le temps aura éteint l’éclat un peu dur et cru des couleurs fraîches, ceux qui pensent que Chardin faisait encore mieux autrefois changeront d’avis. […] Chardin et Vernet voient leurs ouvrages à douze ans du moment où ils peignent, et ceux qui les jugent ont aussi peu de raison que ces jeunes artistes qui s’en vont copier servilement à Rome des tableaux faits il y a cent cinquante ans ; ne soupçonnant pas l’altération que le temps a faite à la couleur, ils ne soupçonnent pas davantage qu’ils ne verraient pas les morceaux des Carraches tels qu’ils les ont sous les yeux, s’ils avaient été sur le chevalet des Carraches tels qu’ils les voient. […] Je n’ignore pas que les modèles de Chardin, les natures inanimées qu’il imite ne changent ni de place, ni de couleur, ni de formes ; et qu’à perfection égale, un portrait de La Tour a plus de mérite qu’un morceau de genre de Chardin. […] C’est une vigueur de couleur incroyable, une harmonie générale, un effet piquant et vrai, de belles masses, une magie de faire à désespérer, un ragoût dans l’assortiment et l’ordonnance. éloignez-vous, approchez-vous, même illusion, point de confusion, point de symmétrie non plus, point de papillotage ; l’œil est toujours recréé, parce qu’il y a calme et repos.
Mais la couleur ? Pour la couleur, ordonnez à votre chimiste de vous faire une détonation ou plutôt déflagration de cuivre par le nitre, et vous la verrez telle qu’elle est dans le tableau de Boucher. […] Si vous dites au peintre : Mais, Monsieur Boucher, où avez-vous pris ces tons de couleur ? […] Peignez le tout de la couleur la plus brillante, et vous aurez la Bergerie de Boucher. […] Il avait une couleur forte et vraie.
C’est l’élégance des formes, la grâce, l’ingénuité, l’innocence, la délicatesse, la simplicité, et tout cela joint à la pureté du dessin, à la belle couleur, à la mollesse et à la vérité des chairs. […] Rien n’est comparable aux fleurs pour la vérité de la couleur et des formes, et pour la légèreté de la touche. […] L’harmonie des couleurs, si importante dans toutes compositions, était essentielle dans celles-ci ; aussi y est-elle portée au plus haut degré. Ce sont comme autant de madrigaux de l’Anthologie mis en couleurs. […] C’est la couleur de chair la plus vraie ; peut-être y désirerait-on un peu plus de vigueur.
Nos yeux sont sensibles aux couleurs du spectre, mais ils ne saisissent pas l’ultraviolet, qui joue pourtant un grand rôle dans la végétation. […] Fermez les yeux, tout un monde de formes et de couleurs s’anéantit en un instant. Passez d’une couleur à l’autre, des sensations se succèdent entre lesquelles, sur certains points, les transitions échappent. […] La sensation de couleur est donc, selon nous, une sensation de lumière spécifiée, c’est-à-dire compliquée. […] On a invoqué l’expérience de Meyer sur le contraste des couleurs : ce qui paraît vert sur un fond rouge paraîtra orange sur un fond bleu ; s’ensuit-il que nous saisissions seulement des différences de couleurs, non des couleurs ?
Quoi de plus singulier que la relation qui existe chez les Chats blancs entre la couleur bleue des yeux et la surdité ; entre la couleur de l’écaillé des Tortues femelles et leur sexe ; entre les pieds emplumés des Pigeons et la membrane qui, en ce cas seulement, relie leurs doigts externes ; entre la quantité plus ou moins grande du duvet des Pigeonneaux nouvellement éclos et la couleur future de leur plumage ; et, encore, entre les poils et les dents du Chien glabre de Turquie, bien qu’ici probablement la loi d’homologie joue son rôle ? […] Ce qui nous aurait encore amené à cette induction, c’est que la couleur bleue et les marques distinctives qui l’accompagnent, apparaissent surtout quand des races distinctes de diverses couleurs sont croisées. […] L’une et l’autre sont quelquefois très peu visibles ou même complétement perdues chez les Ânes de couleur sombre. […] J’en ai recueilli, en Angleterre, de nombreux exemples chez des individus de toutes couleurs et appartenant aux races les plus diverses. […] Quand des races de diverses couleurs sont croisées, même parmi les plus anciennes et les plus pures, les métis ont une forte tendance à prendre la couleur bleue et les marques caractéristiques.