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1055. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre dixième. »

Sans nous rudoyer jamais, il nous avertit ; s’il nous gourmande, c’est du ton de notre conscience, dont il connaît tous les ménagements pour nous. […] L’impartialité de cette morale lui ouvre toutes les consciences.

1056. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

Elle peut devenir vraiment morale quand la conscience de la discordance fondamentale et le petit plaisir qui provient de la réaction du moi se joignent au plaisir de la sympathie et au maximum de bienveillance compatible avec la circonstance et l’état social donné. […] Et pourtant si on l’analyse, on y peut trouver encore une conscience obscure de cette opposition et de cette hostilité qui en sont le fondement solide et lui donnent un sens philosophique.

1057. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1856 » pp. 121-159

Et toute grande et toute droite, osseuse et solide, les maigres et dures phalanges des mains nouées autour d’une jambe croisée par-dessus l’autre ; elle paraît rouler en elle une de ces consciences césariennes de vieille femme, qui repasse muettement, dans une mémoire de marbre, une vie fauve et des jours rouges. […] Ces désespérances, ces doutes, non de nous, ni de nos ambitions, mais du moment et des moyens, au lieu de nous abaisser vers les concessions, font en nous, plus entière, plus intraitable, plus hérissée, la conscience littéraire.

1058. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

Puis cette négation, ce doute de tout, choque les illusions de tous, ou du moins celles que tous affichent : le contentement de l’humanité qui suppose le contentement de soi, — cette paix de la conscience humaine, que le bourgeois affecte de donner comme la paix de sa conscience particulière.

1059. (1809) Quelques réflexions sur la tragédie de Wallstein et sur le théâtre allemand

Leurs écrivains ont une conscience littéraire qui leur donne presque autant le besoin de l’exactitude historique et de la vraisemblance morale que celui des applaudissements du public. […] La manière dont Schiller développe les motifs qu’on leur présente, et gradue l’effet que produisent sur eux ces motifs ; la lutte qui a lieu dans ces âmes farouches entre l’attachement et l’avidité ; l’adresse avec laquelle celui qui veut les séduire proportionne ses arguments à leur intelligence grossière, et leur fait du crime un devoir, et de la reconnaissance un crime ; leur empressement à saisir tout ce qui peut les excuser à leurs propres yeux, lorsqu’ils se sont déterminés à verser le sang de leur général ; le besoin qu’on aperçoit, même dans ces cœurs corrompus, de se faire illusion à eux-mêmes, et de tromper leur propre conscience en couvrant d’une apparence de justice l’attentat qu’ils vont exécuter ; enfin le raisonnement qui les décide, et qui décide, dans tant de situations différentes, tant d’hommes qui se croient honnêtes, à commettre des actions que leur sentiment intérieur condamne, parce qu’à leur défaut d’autres s’en rendraient les instruments, tout cela est d’un grand effet, tant moral que dramatique.

1060. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

La marquise de Talyas, furieuse de voir sa triste marionnette d’amant aller d’elle, qu’il aimait tout à l’heure, à la femme qu’il n’aimait pas, sans transition, sans hésitation, sans la conscience du plus petit reproche, — la marquise de Talyas, outrée d’une si odieuse, d’une si froide, d’une si infâme infidélité, est, par vengeance, sur le point d’avouer son coupable amour à son mari, et de lui livrer les lettres qui la déshonorent et qui lui feront tuer son amant, après qu’elle-même se sera tuée, — la marquise de Talyas, ce monstre athée, corrompu, silencieux, beau et énigmatique comme la Joconde, se métamorphose tout à coup, foudroyée par la vue du sang qu’elle a versé, et rend les lettres, qui devaient tout perdre, à la fiancée de son amant : « C’est mon cadeau de noces », lui dit-elle. […] Les Amours de Philippe en font foi… Son style sans éclat, mais non pas sans cliquetis, y est presque aussi sec que celui de Mérimée, de ce diable de la sécheresse, qui, par parenthèse, n’était pas diable que par ça, mais qui, ne croyant pas au diable, n’avait pas conscience de lui-même.

1061. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’avenir du naturalisme »

Il avait bien regardé l’univers, mais il avait oublié d’y voir une chose, la source même de la vie « matérielle », l’« âme » ; je ne veux pas dire assurément cet étrange feu follet de la conception spiritualiste, cette entité indépendante et immortelle opposée au « corps », mais bien cette vie profonde et harmonique, cette conscience infinie du cosmos dont nous ne sommes que des étincelles et des parcelles. […] Il a négligé par suite de voir l’homme dans sa totalité et dans son ensemble, dans sa conscience supérieure comme dans son instinct.

1062. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

En un mot, la diminution de l’homogénéité intrinsèque des sociétés entraînera celle de leur hétérogénéité extrinsèque, et contribuera par là à cet élargissement de la « conscience de l’espèce » qui est une des conditions du succès de l’égalitarisme. […] On ne met rien au-dessus de la liberté de conscience.

1063. (1874) Premiers lundis. Tome I « Victor Hugo : Odes et ballades — II »

Cette impuissance d’expression dont on a conscience est triste, mais souvent inévitable.

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