Des auteurs chrétiens, sensés et religieux d’ailleurs, ont voulu réhabiliter la mémoire de ces dieux, qui n’ont pas toujours trouvé grace devant leurs propres adorateurs.
Dans l’état normal que ce mouvement doit préparer, toutes, sans aucune exception ni distinction, éprouveront toujours le même besoin fondamental de cette philosophie première, résultée de l’ensemble des notions réelles, et qui doit alors devenir la base systématique de la sagesse humaine, aussi bien active que spéculative, de manière à remplir plus convenablement l’indispensable office social qui se rattachait jadis à l’universelle instruction chrétienne.
Oui, l’union de Sibylle et de Raoul serait possible, si Raoul, quelles que fussent ses opinions particulières, était chrétien d’esprit et de cœur. […] Si Raoul était de substance chrétienne, Sibylle pourrait lui pardonner aisément toutes ses hérésies, car ces hérésies ne seraient plus qu’un stimulant pour leur intelligence et un aliment pour le feu dont ils brûlent également ; leurs âmes auraient des ailes de couleurs différentes, mais elles auraient le même vol et seraient soulevées des mêmes souffles.
[Épigraphe] On commenta les mots, je commenterai l’art. [Avant-propos] Depuis longtemps mes amis me demandent des Commentaires sur Molière ; voici ma dernière conversation avec le plus pressant. Les Commentaires que vous désirez ne se trouvent-ils pas dans mon Art de la Comédie ? « Oui, mais épars, mais confondus avec ce que vous avez dit sur les comiques de toutes les nations ; et c’est du Ménandre, du Plaute, du Térence français que je vous invite à vous occuper uniquement. « Détachez par extrait de votre Art de la Comédie, tout ce qui concerne l’homme immortel que le faux goût, que la satiété du beau poursuivent jusque sur la scène dont il fit la gloire ; joignez à de nouvelles observations sur l’Art du poète dramatique, des remarques sur l’Art du comédien ; décomposez celui-là pour prouver à celui-ci qu’il ne peut le bien rendre s’il ne le connaît parfaitement ; consacrez par ce moyen la bonne tradition ; dénoncez par ce moyen la mauvaise ; resserrez ces observations et ces remarques dans un volume qui devienne nécessaire à chaque possesseur d’un exemplaire de notre excellent comique ; et si vous épargnez des recherches au lecteur paresseux, si vous procurez au plus futile l’avantage de raisonner insensiblement ses plaisirs, si vous ménagez l’amour-propre des uns et des autres, en les amenant au point de s’initier comme d’eux-mêmes aux mystères de Thalie, je vous garantis qu’ils voudront juger à leur tour votre Art de la Comédie, et que vous n’aurez peut-être pas des critiques plus sévères. » Cruel ami !
Ce que je dirai quand je verrai de votre façon un ouvrage en faveur de la religion chrétienne ? Je dirai que vous avez fait le plus grand abus de l’esprit qu’il était possible de faire ; cette religion étant à mon sens la plus absurde et la plus atroce dans ses dogmes ; la plus inintelligible, la plus métaphysique, la plus entortillée et par conséquent la plus sujette à divisions, sectes, schismes, hérésies, la plus funeste à la tranquillité publique, la plus dangereuse pour les souverains par son ordre hiérarchique, ses persécutions et sa discipline, la plus plate, la plus maussade, la plus gothique et la plus triste dans ses cérémonies, la plus puérile et la plus insociable dans sa morale considérée non dans ce qui lui est commun avec la morale universelle, mais dans ce qui lui est propre et ce qui la constitue morale évangélique, apostolique et chrétienne, la plus intolérante de toutes ; je dirai que vous avez oublié que le luthéranisme débarrassé de quelques absurdités est préférable au catholicisme, le protestantisme au luthéranisme, le socinianisme au protestantisme, le déisme, avec des temples, des cérémonies, au socinianisme : je dirai que puisqu’il faut que l’homme superstitieux de la nature ait un fétiche, le fétiche le plus simple et le plus innocent sera le meilleur de tous.
La Poésie nouvelle dont il est ici question n’est pas seulement une récente manifestation d’art ; mais sa nouveauté lui est essentielle, comme le principe même de son esthétique. Notre poésie française, fanée, mourait, il y a quinze ou vingt ans. Quelques jeunes hommes survinrent, animés d’une ardeur louable, épris de Beauté ; ils n’essayèrent pas de restituer un semblant de vie aux poncifs anciens, mais ils voulurent inaugurer un art tout neuf dans son aspiration et dans sa forme. Ils affirmèrent leur croyance qu’il n’y a pas de poésie sans la fraîcheur de l’impression, — la poésie, en somme, n’ayant d’autre objet que de nous faire apercevoir la présence réelle de toutes choses. Il serait exquis de se figurer le premier printemps de la terre, si Adam n’avait pas été, sans doute, d’une mentalité trop rudimentaire pour en goûter la grâce fragile… L’habitude et l’utilité nous empêchent de voir les choses avec l’étonnement émerveillé qu’elles méritent ; elles ont bientôt cessé de nous émouvoir, et dès lors notre existence ici-bas, dans le monde vainement délicat et varié, n’a plus ni agrément, ni signification.
Le culte des morts ne ressemblait en aucune manière à celui que les chrétiens ont pour les saints. […] Ce n’en était pas moins le vrai nom ; dans le langage journalier on pouvait désigner l’homme par son surnom individuel, mais dans le langage officiel de la politique ou de la religion, il fallait donner à l’homme sa dénomination complète et surtout ne pas oublier le nom du γένος306. — Il est digne de remarque que l’histoire des noms a suivi une tout autre marche chez les anciens que dans les sociétés chrétiennes.
Cette idée me paraît la folie la plus spirituelle et la plus profonde que j’aie ouïe, et bien préférable aux folies chrétiennes, musulmanes ou philosophiques, des ier , viie et xviiie siècles de notre ère.
. — Suzanne et elle (Dieu fasse miséricorde à toutes les âmes chrétiennes !)