Il y vit pour la première fois le jeune duc qui devait être le grand adversaire de sa vie, son élève dans cette prochaine guerre, puis son rival, son vaincu, son dupeur éternel, celui avec qui il aura maille à partir sous toutes les formes et avec qui son écheveau devra s’entremêler et se brouiller sans cesse. […] On fut donc puni, pendant toute la durée de cette guerre qui se fit en Savoie depuis 1690, d’avoir agacé impolitiquement et sans motif les Vaudois en 1686, et d’avoir mis dans ces vallées un foyer sans cesse renaissant de haine et de vengeance. […] Son procédé, tout en combattant le prince qu’il avait eu pour élève dans la première expédition vaudoise, était de continuer à s’en faire estimer et de ne rien porter à l’extrémité, d’épargner les moyens violents, même quand ils lut étaient commandés ; il ne s’agissait pas d’envenimer la lutte : le plus souvent on ne cessait de négocier sous main, d’échanger des pourparlers, tout en se combattant. […] Comme chez tous les persécutés, il n’y a qu’une seule corde qui résonne et qui crie sans cesse.
Marie-Thérèse, ayant à guider de loin, à conseiller dans toutes ses démarches une si jeune dauphine, puis une si jeune reine, qui trouve si peu d’aide auprès de soi, mêle sans cesse dans ses lettres les recommandations d’une bonne mère à celles d’une impératrice. […] Sur ce point seul ne suivez ni l’exemple ni les conseils de la famille ; c’est à vous à donner le ton à Versailles ; vous avez parfaitement réussi ; Dieu vous a comblée de tant de grâces, de tant de douceur et de docilité, que tout le monde doit vous aimer : c’est, un don de Dieu, il faut le conserver, ne point vous en glorifier, mais le conserver soigneusement pour votre propre bonheur, et pour celui de tous ceux qui vous appartiennent. (1er novembre 1770.) » Une des recommandations continuelles de Marie-Thérèse à sa fille et qui reviennent sans cesse et jusqu’à satiété, c’est, après celles qui regardent la santé et la vocation à être mère, de se garder des coteries, des apartés, des sociétés privées où le sans-façon domine, de ne jamais oublier qu’on est un personnage en vue, exposé sur un théâtre, ayant un rôle à remplir ; de ne se relâcher en rien, de se surveiller soi-même en tout, dans les petites choses comme dans les grandes ; de mépriser le qu’en dira-t-on, mais aussi de ne point prêter à de justes reproches. […] Là-dessus aucune négligence, et n’imitez personne ; suivez ce que vous avez vu et appris ici. » Elle ne cesse de conseiller à sa fille des lectures fortes, des lectures suivies ; elle attend tous les mois en vain la liste des livres sérieux que l’abbé de Vermond s’était chargé de procurer à la jeune princesse, et qui, on le sait aujourd’hui par les catalogues, étaient si absents de ses bibliothèques particulières : « Tâchez de tapisser un peu votre tête de bonnes lectures ; elles vous sont plus nécessaires qu’à une autre, … n’ayant aucun autre acquit, ni la musique, ni le dessin, ni la danse, peinture et autres sciences agréables. » Il est permis sans doute, surtout à son âge, de s’amuser, mais d’en faire son unique soin et de n’être occupée qu’à « tuer le temps entre promenades et visites », elle en reconnaîtra le vide et en sera un jour aux regrets. […] Cette Correspondance judicieuse vient avertir à temps de ne point pousser les choses à l’extrême et de cesser d’exagérer dans le sens poétique ou chevaleresque.
Le propre de la nature est d’être variée à l’infini, sans cesse opposée à elle-même, à la foi sublime et naïve ; quand on cesse un instant de considérer les petits mouvements d’un insecte ou d’une plante, on voit autour de soi les paysages profonds, et sur sa tête le ciel immense. […] Il dit que du labeur des ans Pour nous seuls il portait les soins les plus pesants Parcourant, sans cesser, ce long cercle de peines Qui, revenant sur soi, ramenait dans les plaines, Ce que Cérès nous donne et vend aux animaux : Que cette suite de travaux Pour récompense avait de tous tant que nous sommes. […] A l’intérieur ; le second argument se distingue du premier par un changement subit du mètre, et s’y unit par une rime commune ; et, comme la gravité passionnée croît sans cesse, il se déploie en un double distique croisé, dont les longues mesures et les rimes alternatives captivent l’oreille et maîtrisent l’âme.
Quelques phrases de lui, à elles adressées, dans les premiers billets, phrases toutes littéraires dont elle s’exagérait le sens, et qu’elle relisait sans cesse, lui avaient fait croire qu’elle avait pu, un instant, occuper dans son cœur je ne sais quelle place qui n’était plus vacante pour personne, depuis que Mme d’Houdetot y avait passé. […] Mortifiée sans cesse, elle revint à la charge, ne se rebutant jamais. […] Homme étrange, écrivain puissant et prestigieux, il faut faire sans cesse double part en le jugeant. […] Son amour était celui de l’idéale beauté, du fantôme auquel lui-même prêtait, vie et flamme : c’était ce fantôme seul, tiré de son sein, et formé d’un ardent nuage, qu’il aimait, qu’il embrassait sans cesse, à qui il donnait chaque matin ses baisers de feu, sur qui il plaçait, en les rassemblant, ses rares souvenirs de bonheur ; et quand il se présenta une femme réelle qui eut l’orgueil de lui montrer l’objet terrestre de son idéal et de lui dire : Je suis Julie, il ne daigna point la reconnaître ; il lui en voulut presque d’avoir espéré se substituer à l’objet du divin songe.
Mme Du Deffand n’eut de cesse qu’elle n’eût tiré cette jeune personne de sa province, et qu’elle ne l’eût logée avec elle au couvent de Saint-Joseph pour lui tenir compagnie, lui servir de lectrice et lui être d’une ressource continuelle. […] La lutte commence, elle ne cessera plus un moment. […] Voilà l’éternelle note qui commence, elle ne cessera plus. […] elles ne sont pas dignes d’être vos écolières, lui disait-il sans cesse ; votre âme a été chauffée par le soleil de Lima, et mes compatriotes semblent être nées sous les glaces de la Laponie. » Et c’était de Madrid qu’il écrivait cela.
Elle en parle sans cesse, et ses impressions varient dans le courant même de la lecture. […] Il ne cessa, depuis lors, d’écrire et d’épier, dans cette vue, tout ce qu’il pourrait savoir, apercevoir et deviner des choses de son temps. […] On assiste, et en étouffant par moments, à cette comédie perpétuelle et qui ne cesse pas. […] Ce qu’il avait surtout en horreur et à quoi il était le plus antipathique, c’était la platitude, la servilité, la bassesse, l’asservissement d’un chacun à ses plus étroits intérêts, la cabale personnelle et sans un but élevé, l’oubli, la ruine de tous et de l’État en vue de soi ; en un mot, ce qui faisait le grand fonds de corruption des cours, et ce qui peut-être n’a pas cessé d’être encore la plus grande plaie des hommes réunis en commun, voire même des assemblées dites constitutionnelles, nationales ou populaires.
Les causes de l’émotion esthétique sont, contrairement aux causes de l’émotion réelle, une hallucination que l’on sait inconsciemment être fausse, que l’on sent n’avoir rien de menaçant, une hallucination émouvante, dont les images sans cesse combattues en vertu de leur caractère factice, réprimées et modifiées par tout le cours ambiant de la vie, par la conscience générale qu’à leur sujet sur sa sécurité, de sa non souffrance, — cessent d’agir comme des images réelles, demeurent sans cohésion avec le reste du cours mental, ne s’associent pas à des prévisions positives de peine ou de plaisir personnels, et restent ainsi seulement excitantes, comme on n’éprouve d’un assaut avec des épées mouchetées, que l’exhilaration d’un exercice7. […] L’art est la création en nos cœurs d’une puissante vie sans acte et sans douleur ; le beau est le caractère subjectif, déterminant choix, par lequel, pour une personne donnée, les représentations sont ainsi innocentes et exaltantes ; l’art et le beau deviendraient donc des mots vides de sens si l’homme était pleinement heureux et pouvait se passer de l’illusion du bonheur, comme on cesserait alors d’y tendre douloureusement, vainement, par la religion, la morale et la science. […] Car cette mesure fournirait simplement l’indice émotionnel du lecteur ainsi pris au hasard et non l’indice émotionnel de l’œuvre, toujours la même et produisant sans cesse des effets différents.
Il faudrait donc le supposer là tout à fait inférieur à lui-même, et croire que cette partie de son œuvre se serait, du vivant même de l’antiquité grecque, abaissée dans l’ombre et n’aurait pas duré même jusqu’aux lettrés romains, qui, dès le temps de Scipion et d’Ennius, s’étaient si fort occupés de la poésie de la Grèce, et ne cessaient de traduire et d’imiter son théâtre ? […] Les épisodes, ce sont les souvenirs des aïeux sans cesse rappelés, comme une obligation pour les fils et un titre d’orgueil pour les citoyens. […] Et nous, quoique affligés dans a l’âme, ô Muse aux paroles d’or, délivrés de grandes douleurs, ne restons pas comme abattus et sans couronne ; ne cultive pas en nous la tristesse : cessons des tourments inutiles ; laissons-nous vaincre à quelque plaisir. […] Son génie avait combattu pour la Grèce ; et ses chants n’avaient cessé d’inspirer dès longtemps ceux qui venaient de vaincre pour elle.
Une fois qu’on est à bord et dans le détail d’un esprit, on ne le juge plus guère par cette partie essentielle, qui pourtant saute aux yeux au dehors ; on est tenté de l’oublier : elle subsiste jusqu’au dernier jour et ne cesse de dominer le tout. […] Il ne cesse à chaque mouvement de prendre son point d’appui sur le niveau d’alentour.