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343. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — II » pp. 107-121

Quels produits différents de l’intelligence que la pensée qui fait écrire et celle qui fait agir ; la pensée qui se resserre dans les limites d’un acte à accomplir, et celle qui s’étend dans un grand espace et veut juger en général les résultats et les causes ! […] Il a des diagnostics et des pronostics excellents de sagacité ; il sait tâter le pouls à son malade ; il dira le danger, il en expliquera les causes ; mais, comme beaucoup de savants médecins, il ne va pas jusqu’au remède, — je ne parle que du remède efficace, du remède possible à l’heure même. […] Pour s’arracher de lui-même, pour se distraire et s’absorber, il se mit courageusement à l’œuvre ; il tenta de renouveler sa vie ; il s’appliqua à l’étude de l’allemand, à toutes sortes de lectures ; il entreprit son travail sur l’Ancien Régime et sur les causes de la Révolution. […] M. de Tocqueville en prit occasion de venger la mémoire de Turgot, d’honorer son intention généreuse et celle du monarque ami du peuple ; cela le conduisit à une profession libérale des mêmes idées, des mêmes sentiments, qu’il rattachait à une grande, à une sainte, à une immortelle cause, où toutes les destinées de l’humanité étaient renfermées et comprises.

344. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Aussi, le lendemain, je veux dire à peu de semaines de là, Lucrèce pouvait réussir avec l’éclat de succès qu’on a vu, tant à cause d’elle-même et de ses mérites qu’à cause du contraste. […] Feuillet a pris spirituellement leur parti et a gagné leur cause dans ce joli proverbe qui n’était pour lui qu’un prélude. […] Il a accepté résolument la cause que les autres évitaient ou refusaient de plaider.

345. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire Pour peu qu’on ait tracé le tableau de plusieurs époques successives d’une littérature, deux graves questions se présentent auxquelles on ne saurait se soustraire : Pourquoi le goût littéraire varie-t-il d’une époque à une autre ? […] Mieux vaut donc aborder directement la question et remonter à la cause primordiale et commune de toutes les variations dont l’histoire de l’humanité nous offre le spectacle. Or, si l’esprit régnant dans une époque cesse d’être prédominant dans l’époque suivante, la cause en est la nécessité de changement qui est imposée aux sociétés comme aux individus par la constitution même de l’homme et de l’univers. […] Il opère ou tente une quadruple révolution : une révolution économique, liée aux découvertes maritimes qui transportent du bassin de la Méditerranée aux bords de l’Atlantique le siège du grand commerce, qui ouvrent d’immenses débouchés à l’Europe soit aux Indes soit en Amérique, qui accélèrent la substitution de la richesse mobilière à la richesse terrienne, base du régime féodal ; une révolution intellectuelle qu’on a baptisée la Renaissance et qui n’est pas seulement la résurrection de l’antiquité classique, qui est aussi le réveil de l’esprit d’examen, l’essor de la pensée moderne, le point de départ d’une activité féconde dans les sciences, les lettres, la philosophie ; une révolution religieuse qu’on appelle la Réformation et qui, séparant l’Europe occidentale en deux confessions rivales, cause les guerres les plus atroces dont la différence de croyance ait jamais ensanglanté le monde ; enfin une révolution politique, conséquence des trois autres, qui ébranle les bases de la royauté, suscite des théories libérales et républicaines, des soulèvements populaires et même des appels au régicide.

346. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le cardinal de Retz. (Mémoires, édition Champollion.) » pp. 238-254

La cause finale est selon la formule : Car ainsi l’ont promis et juré ledit seigneur Parlement et ladite dame Ville de Paris sur les saintes Évangiles, devant l’église de Notre-Dame, au mois de janvier l’an mil six cent quarante-neuf, et ont signé. […] Retz, qui sait mieux que personne son ménage de Paris, étale à nu au duc de Bouillon toutes les divisions et les causes probables de ruine : « Le gros du peuple qui est ferme, dit-il, fait que l’on ne s’aperçoit pas encore de ce démanchement des parties. » Mais lui, il sent ce démanchement très prochain si l’on n’y prend garde, et il le fait toucher au doigt dans ses paroles meilleures que ses actes. […] Et il montre ces idées comme alors très éloignées de lui, « je ne dis pas seulement par la force de la raison à cause des conjonctures, mais je dis même par mon inclination qui me portait avec tant de rapidité et au plaisir et à la gloire… ». […] On lui en sut peu de gré, et, sa réputation passée s’attachant à lui, non sans cause, on le traita purement en politique, c’est-à-dire qu’après s’être servi de lui dans le premier moment, on l’emprisonna dans le second.

347. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre I : Rapports de cette science avec l’histoire »

On confond peut-être ici la cause avec l’effet. […] Et si les causes de la grandeur et de la chute d’un peuple méritent l’étude attentive des plus grands esprits, que dira-t-on du règne d’une philosophie, de son origine, de ses progrès, de sa chute ? […] Les conceptions des philosophes peuvent être plus ou moins arbitraires quant à leur objet : elles ne le sont pas quant à leur origine et à leurs causes, lesquelles sont dans les lois de l’esprit. […] Sans doute les systèmes philosophiques ont en grande partie leurs causes dans l’état général de la civilisation et des mœurs.

348. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

De plus, pour lui, et c’est là ce qui le distingue des purs positivistes, le fait et la cause sont identiques. […] Chaque groupe de faits est à son tour conditionné par un groupe plus général qui est aussi sa cause, et on pourrait théoriquement remonter de groupe en groupe jusqu’à une cause unique qui serait la condition de tout ce qui existe. […] Ces causes étaient toutes nobles et saintes ; elles se résumaient dans les mots de paix, de justice, de progrès. […] Son cœur embrassa la cause des persécutés, des victimes de l’Église, avec la même sympathie qu’il avait embrassé la cause de l’Église elle-même. […] Le père loue en Dieu la Loi du monde, la mère le prie comme la Cause aimante.

349. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — III »

Instituant les perspectives de l’espace, ce geste créateur ne parvient à lier les choses entre elles par le mécanisme de la cause, à varier indéfiniment, devant le regard du sujet, le spectacle de la multiplicité des objets qu’en livrant toutes les choses au flux du temps. […] Mais à côté de cette image restreinte, voici, dans l’hypothèse métaphysique que l’on élève, parmi l’univers immobile, l’abolition de toutes les relations infiniment nombreuses que réalisait seul, entre objets et sujets, le mécanisme de la cause par l’intermédiaire du temps, en sorte que, supprimant tout état de conscience, cette hypothèse se montre elle-même inimaginable, la vision qu’elle suscitait s’évanouissant dans l’abîme où elle entraîne avec elle toute existence phénoménale et où s’anéantit toute représentation.

350. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre VIII. Bossuet historien. »

« Ce long enchaînement des causes particulières qui font et défont les Empires, dépend des ordres secrets de la divine Providence. […] Il l’aveugle, il la précipite, il la confond par elle-même : elle s’enveloppe, elle s’embarrasse dans ses propres subtilités, et ses précautions lui sont un piège… C’est lui (Dieu) qui prépare ces effets dans les causes les plus éloignées, et qui frappe ces grands coups dont le contrecoup porte si loin… Mais que les hommes ne s’y trompent pas : Dieu redresse, quand il lui plaît, le sens égaré ; et celui qui insultait à l’aveuglement des autres, tombe lui-même dans des ténèbres plus épaisses, sans qu’il faille souvent autre chose pour lui renverser le sens, que de longues prospérités. » Que l’éloquence de l’antiquité est peu de chose auprès de cette éloquence chrétienne !

351. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 20, de la difference des moeurs et des inclinations du même peuple en des siecles differens » pp. 313-319

Je répondrois que le précepte d’aimer ses ennemis n’étant point contesté par Rome ni par Geneve, il s’ensuit que ceux qui prenoient parti pour l’une ou pour l’autre cause de bonne foi, devoient avoir horreur d’un assassinat. […] Quand on voit tant d’effets si bien marquez de l’altération des qualitez de l’air, quand on connoît si distinctement que cette altération est réelle, et quand même on en connoît la cause, peut-on s’empêcher de lui attribuer la difference sensible qui se rencontre dans le même païs entre les hommes de deux siecles differens.

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