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767. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Jules de Gères »

Or, si l’une est la plus belle, l’autre est la plus charmante. […] Il y a un proverbe anglais, cité par lord Byron dans son extravagante et cependant admirable polémique en faveur de Pope contre Shakespeare, — et dans laquelle le grand poète de génie prouva qu’il avait sur son beau front ce coin de la démence, comme les Anglais l’appellent, et qu’ils y montrent, pour excuser leur infâme conduite à son égard, — il y a un proverbe anglais qui dit qu’on peut faire une bourse de soie avec une oreille de cochon. […] le volume sera classé, et classé très haut, par ces Historiettes, qui sont des poèmes, comme Une Rencontre, Les Oiseaux deux à deux, Sanchette, Cerise, Les deux Lierres, L’Aquarelle à Héroult, Mens agitat molem, Incerta et occulta, La Soif de l’infini, Pâquerette, et enfin L’Arbre devenu vieux, qui me paraît sans comparaison la plus belle pièce du volume, par la hauteur de son inspiration et la luxuriance de ses magnifiques et infatigables strophes. […] Un jour, madame de Girardin, qui était poète, quoique bas bleu (cela peut se rencontrer), écrivit : Le Malheur d’être belle. […] cela est charmant et cela serait parfait sans les deux débilités que j’ai soulignées ; mais ce n’est qu’un cil dans un bel œil bleu.

768. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Conclusion. Le passé et le présent. » pp. 424-475

Elle a beau disparaître du grand monde, sous les mépris de la Restauration, et sous l’importation de la culture française ; elle subsiste sous terre. […] Dernièrement sur la grande place, dans le plus bel hôtel, cinq journées durant, il a fallu laisser le gaz allumé. […] Au moindre soupçon de soleil, elles sourient avec une grâce délicieuse ; on dirait de belles vierges timides et frêles sous un voile qu’on va lever. […] Plusieurs ont l’air de beaux lévriers élancés, humant l’air et en pleine chasse. […] Rien de plus simple que les jeunes filles ; parmi les belles choses, il y en a peu d’aussi belles au monde ; sveltes, fortes, sûres d’elles-mêmes, si foncièrement honnêtes et loyales, si exemptes de coquetterie !

769. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 14 mars 1885. »

Robuste et créée pour les fortes besognes, prête aux plus rudes enfantements, belle d’ailleurs, elle se consumait dans une longue virginité. […] Ce furent de belles fiançailles, gage des noces futures ! […] Lorsqu’on est assis dans une stalle pour assister à une représentation de Lohengrin ou de Tristan et Iseult, il ne faut pas se demander : « Entendrai-je de belles mélodies », ou « Entendrai-je de beaux vers ?  […] Lui aussi aspire à la main de la belle Eva. […] Ô belle franchise de la multitude !

770. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Guarini, et Jason de Nores. » pp. 130-138

C’étoient alors les beaux jours de l’Italie. […] Il osa s’élever contre le goût de son siècle, & se brouiller avec la plus belle moitié du genre humain. […] Il traita ce genre, de monstre enfanté par le mauvais goût & par l’ignorance de la belle latinité. […] Pour peu qu’on ait lu le Pastor fido, il n’est personne qui ne se rappelle la belle scène d’Amarillis dans l’acte troisième.

771. (1910) Propos de théâtre. Cinquième série

Il m’arrive de lire le beau livre de M.  […] D’abord sa belle objection et son beau développement sur « le temple », il l’écarte résolument. […] Le principal mérite de Racine est d’être beau. […] Il est beau comme au temps où j’étais la plus belle. […] Cette scène est très belle.

772. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Venevault, Boizot, Bachelier et Francisque Millet » p. 222

En effet, si vous vous en souvenez, la tête de l’Adam est du plus antique et du plus grand caractère ; la figure de la fille est large et belle ; cette femme échevelée sur le fond, jointe à l’horreur du paysage qui l’entoure, fait frissonner. […] C’est qu’il y a bien de la différence à rencontrer une belle idée, et à faire un bel ouvrage.

773. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Fragonard » p. 280

Fragonard Tableau ovale représentant des groupes d’enfans dans le ciel. c’est une belle et grande omelette d’enfans ; il y en a par centaines, tous entrelacés les uns dans les autres, têtes, cuisses, jambes, corps, bras, avec un art tout particulier ; mais cela est sans force, sans couleur, sans profondeur, sans distinction de plans. […] Ce mot n’a peut-être pas encore été dit, mais il rend bien et si bien, qu’on prendrait cette composition pour un lambeau d’une belle toison de brebis, bien propre, bien jaunâtre, dont les poils entremêlés ont formé par hasard des guirlandes d’enfans. […] Belle omelette, bien douillette, bien jaune et bien brûlée.

774. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

C’était une revanche indirecte sur le succès désordonné de toutes ces belles Longueville. […] a défilé le plus joliment du monde ce chapelet de belles, de violentes et de légères, où il y a un ou deux grains à oraison. […] Dans l’été qui suivit la conclusion de la paix, quelques personnes du beau monde français voulurent voir l’Angleterre ; la comtesse de Boufflers fut des premières à y aller. […] Nivernais est un amateur aussi, qui représente bien à son heure cette belle société du xviiie  siècle. […] — Messieurs de la Régence et des années qui ont suivi, nous en avons trop fait, et plus encore par genre et par bel air que par tempérament et par nature, et c’est ce qui tue ; nous ne sommes plus gaillards et drus d’humeur, comme l’était, par exemple, un Vivonne aux belles années de Louis XIV.

775. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

La difficulté sera plus grande encore auprès de la haute classe qui occupe tous les beaux appartements ; pour qu’elle accepte votre projet, il faudra que son aveuglement ou son désintéressement soient extrêmes. — En Angleterre, elle s’aperçoit très vite du danger. La philosophie a beau y être précoce et indigène ; elle ne s’y acclimate pas. […] Nos gens de bel air adopteront sans difficulté une théorie qui justifie leur pratique. […] Les grands mots, liberté, justice, bonheur public, dignité de l’homme, sont si beaux et en outre si vagues ! […] Ils agissent, ils sont vraiment généreux ; il suffit qu’une cause soit belle pour que leur dévouement lui soit acquis.

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