Dix ans ne sont point trop pour apprendre tant de choses. […] Il apprend à raisonner et à décider lui-même comme on apprend les autres choses. […] Ils sont, si l’on veut, apprentifs durant un plus long-temps, parce qu’ils apprennent encore à un âge où les artisans ordinaires sçavent déja le peu qu’ils sont capables de sçavoir.
Je n’ai rien appris, sinon l’énormité du sacrifice que Dieu allait exiger de moi. […] Le cœur n’apprend que par la souffrance, et je crois, comme Kant, que Dieu ne s’apprend que par le cœur. […] Aussi ma première question en arrivant à Saint-Sulpice fut pour vous demander afin d’apprendre la cause de ce silence, et plus encore afin de m’entretenir avec vous. Jugez de la peine que j’éprouvai quand j’appris qu’une maladie grave avait été la cause qui avait entravé votre correspondance. […] Il redouble encore quand, quelques heures après, on m’apprend que l’archevêque est venu lui-même au séminaire et demande à nous parler.
Charles Sternay vient apprendre a Clara Vignot qu’un désastre de fortune l’oblige à partir pour l’Amérique. […] Quelques instants après, Clara apprend qu’il va se marier. […] Quand Jacques apprend sa vraie situation, et que la force des choses la divulgue enfin, sa vie en est à peine un instant troublée. […] Nous apprenons, à l’acte suivant, que Clara Vignot doit ses cinq cent mille francs, et la terre de Boisceny, dont son fils porte le nom, à ce personnage élégiaque. […] Alors il apprend qu’André a ordonné à son notaire de lui fermer sa caisse et d’arrêter ses payements.
Ce qu’il a le mieux su, c’est l’anglais qu’il avait appris de bonne heure et qu’il lisait couramment. […] Mais à Toulon, il apprend que tout vient de finir ; aller à Constantine n’est plus que comme aller à Saint-Cloud ; ce n’est qu’une promenade la canne à la main. […] Si j’avais le temps de lui donner une petite éducation, je lui apprendrais à chanter Rabadablabadabla-blabla, pour que sur ma terre d’Afrique il puisse apprendre à ses semblables ce délicieux refrain, et peut-être qu’un jour tous les échos nous le répéteraient. […] Je crois pouvoir dire de Vernet que j’ai appris quelque chose de lui, et que tout le monde peut-être a quelque chose à en apprendre. […] Lors même que l’on sent que cette fécondité n’est pas chose qui s’apprenne, le principe n’en est pas moins admirable, et rien ne peut remplacer la gaieté, l’éternelle ardeur au travail, qui en résultent.
Elle apprend à l’individu son insuffisance et sa dépendance. […] « Il faut apprendre à l’individu, dit M. […] Apprendre à supporter l’ennui — et non seulement à le supporter, — apprendre à le voir entouré d’un charme supérieur ; c’est ce qui fut jusqu’à présent la tâche de toute instruction supérieure. Apprendre quelque chose qui ne nous regarde en rien et sentir que le “devoir” consiste précisément dans cette activité “objective” ; apprendre à évaluer séparément le plaisir et le devoir, voilà la tâche et l’action inappréciable de la pédagogie. C’est pourquoi le philologue fut jusqu’à présent l’éducateur par excellence : son activité elle-même donne l’exemple d’une monotonie s’élevant jusqu’au grandiose ; sous son égide, le jeune homme apprend à bûcher : première condition pour remplir plus tard, avec excellence, le devoir machinal (comme fonctionnaire de l’État, bon époux, rond de cuir, lecteur de journaux, soldat, etc.)
D’ailleurs la musique des romains étoit la même que celle des grecs, dont ils avoient appris cette science. […] On ne doit pas s’étonner qu’Aristides Quintilianus ait dit que la musique étoit un art necessaire à tous les âges de la vie, puisqu’il enseignoit également ce que les enfans doivent apprendre et ce que les personnes faites doivent sçavoir. Quintilien écrit par la même raison que non seulement il faut sçavoir la musique pour être orateur ; mais qu’on ne sçauroit même être bon grammairien sans l’avoir apprise, puisqu’on ne pouvoit pas bien enseigner la grammaire sans montrer l’usage dont y étoient le metre et le rithme. […] Enfin, Quintilien dit dans le chapitre de son livre où il veut prouver que l’orateur est du moins obligé d’apprendre quelque chose de la musique. " on ne me refusera point de tomber d’accord… etc " .
Comment ont appris leur Langue M. de Voltaire, le propagateur de ce paradoxe, & M. d’Alembert qui semble se faire une loi de ne penser que d’après ce Poëte ? […] Ménage prononçoit l’Italien d’une maniere ridicule, parce qu’il l’avoit appris sans maître & qu’il n’avoit jamais été en Italie ; il a pourtant fait des Vers Italiens qui, de l’aveu de tout le monde, n’auroient pas été désavoués par les meilleurs Poëtes d’Italie, & que M. de Voltaire * lui-même trouve fort supérieurs aux Vers François que nous avons de cet Auteur. […] N’avons-nous pas une infinité de Gens de Lettres qui ont appris l’Anglois, l’Espagnol, l’Italien, l’Allemand, par le seul secours des Livres ?
Seulement, est-ce à nous à la vouloir et à la provoquer avec cette furie imprudente, nous qui n’ignorons pas l’histoire et qui avons appris, en la lisant, que l’histrionolâtrie a souillé de ses farces grotesques les derniers moments des plus grands peuples et déshonoré leur agonie ? […] C’est par les journaux, par les petits Bachaumont de la chronique, que la province a pu apprendre depuis quelques jours que la société parisienne avait transformé ses salons en salles de spectacle et que cette société, faite pour donner le ton au monde, le recevait, à cette heure, de ses comédiens. […] Même dans Rome éperdue et perdue, dans Rome devenue la corybante de ses arènes et de ses jeux, une pareille idée ne put effleurer ces cerveaux corrompus, mais qui avaient appris dans la loi romaine la majesté du père et du magistrat domestique : Pater familias. […] Nous ne passons pas notre temps à foudroyer des tourterelles ; seulement il nous est impossible d’admettre, et nous vous défions de la supposer, l’innocence ou la moralité de ces comédies de société où le comédien est mandé pour apprendre le rôle à monsieur, et la comédienne pour l’apprendre à madame et à mademoiselle, et où, dans le laisser-aller de la coulisse, les professeurs peuvent faire échange de fonction et intervertir leur personnage avec la souplesse de leur art et les habitudes de leur état !
Dans les lettres de cette date à Mme de Brinon, Mme de Maintenon entre dans les plus minutieux détails d’économie ; elle envoie du beurre, quelque argent chaque mois : « J’ai des tabliers pour elles, mais je veux leur donner moi-même, et voir si elles ont du potage raisonnablement, car je vous dirai librement que je ne leur ai jamais vu la moitié de ce qu’il leur en faut, et que j’ai quelque soupçon qu’elles meurent de faim. » Depuis qu’elle est gratifiée des bienfaits du roi, elle ne songe qu’à les faire retomber sur celles qui sont pauvres comme elle l’a été ; mais elle n’aime pas à demander, elle pense qu’il faut apprendre à se suffire. […] Qu’on leur apprenne à parler français, mais simplement. […] Cela bien entendu, elle veut le vrai dans l’éducation dès le bas âge : « Point de contes aux enfants, point en faire accroire ; leur donner les choses pour ce qu’elles sont. » — « Ne leur faire jamais d’histoires dont il faille les désabuser quand elles ont de la raison, mais leur donner le vrai comme vrai, le faux comme faux. » — « Il faut parler à une fille de sept ans aussi raisonnablement qu’à une de vingt ans. » — « Il faut entrer dans les divertissements des enfants, mais il ne faut jamais s’accommoder à eux par un langage enfantin, ni par des manières puériles ; on doit, au contraire, les élever à soi en leur parlant toujours raisonnablement ; en un mot, on ne peut être ni trop ni trop tôt raisonnable. » — « Il n’y a que les moyens raisonnables qui réussissent. » — Elle le redit en cent façons : « Il ne leur faut donner que ce qui leur sera toujours bon, religion, raison, vérité. » Dans un siècle où sa jeunesse pauvre et souriante avait vu se jouer tant de folies, tant de passions et d’aventures, suivies d’éclatants désastres et de repentirs ; où les romans des Scudéry avaient occupé tous les loisirs et raffiné les sentiments, où les héros chevaleresques de Corneille avaient monté bien des têtes ; où les plus ravissantes beautés avaient fait leur idéal des guerres civiles, et où les plus sages rêvaient un parfait amour ; dans cet âge des Longueville, des La Vallière et des La Fayette (celle-ci, la plus raisonnable de toutes, créant sa Princesse de Clèves), Mme de Maintenon avait constamment résisté à ces embellissements de la vérité et à ces enchantements de la vie ; elle avait gardé son cœur net, sa raison saine, ou elle l’avait aussitôt purgée des influences passagères : il ne s’était point logé dans cette tête excellente un coin de roman. « Il faut leur apprendre à aimer raisonnablement, disait-elle de ses filles adoptives, comme on leur apprend autre chose. » Et de plus, cette ancienne amie de Ninon savait le mal et la corruption facile de la nature ; elle avait vu de bien près, dans un temps, ce qu’elle n’avait point partagé ; ou si elle avait été effleurée un moment, peu nous importe, elle n’en était restée que mieux avertie et plus sévère. […] — As-tu porté, en ton sein gravée, la sainte prière apprise par l’enfant sous le toit paternel ? […] Et la sainte prière a fui de ma pensée, — la prière apprise sur les genoux de ma mère.