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240. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre VII. Induction et déduction. — Diverses causes des faux raisonnements »

Et Jehanne la bonne Lorraine Qu’Anglais brûlèrent à Rouen ? […] Tel ce voyageur anglais, qui, dans je ne sais quel canton de France, servi par une fille d’auberge aux cheveux roux, notait sur son calepin qu’en ce pays les femmes étaient rousses. […] Je n’ai point vu de roman anglais ou russe, en dépit de l’impartiale observation des auteurs, où l’on donnât d’un Français autre chose qu’une charge ; et l’on peut croire que nous agissons de même à l’égard des étrangers.

241. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Chefs-d’œuvre de la littérature française (Collection Didot). Hamilton. » pp. 92-107

Antoine Hamilton, un des écrivains les plus attiques de notre littérature, n’est ni plus ni moins qu’un Anglais, de race écossaise. […] Mais, avec un peu d’attention, on finit par se reconnaître, comme dans un bal de Cour, au milieu de ce raout de beautés anglaises les plus fines et les plus aristocratiques du monde, et dont le peintre a rendu avec distinction les moindres délicatesses. J’ai sous les yeux la magnifique édition exécutée à Londres en 1792, avec les nombreux portraits gravés ; je vois défiler ces beautés diverses, l’escadron des filles d’honneur de la duchesse d’York et de la reine ; je relis le texte en regard, et je trouve que c’est encore l’écrivain avec sa plume qui est le plus peintre : Cette dame, dit-il d’une Mme de Wetenhall, était ce qu’on appelle proprement une beauté tout anglaise ; pétrie de lis et de roses, de neige et de lait quant aux couleurs ; faite de cire à l’égard des bras et des mains, de la gorge et des pieds ; mais tout cela sans âme et sans air.

242. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (1re partie) » pp. 413-491

Arrêté à Londres, il se croit encore amoureux d’une belle et suspecte Anglaise, amoureuse de son groom. […] Ce jour, le prince Édouard, connu sous le nom du Prétendant, avait la première loge à l’Opéra, à son ordinaire ; il y est arrivé sur les cinq heures, avec deux seigneurs anglais de sa cour. […] Une foule immense se pressait sur leur passage ; les étrangers, les Anglais surtout, si nombreux à Rome, se mêlaient avidement à une population toujours curieuse de ces spectacles, et l’on peut dire que l’entrée de Charles III avec sa jeune femme dans la capitale du monde catholique fut un des événements de l’année 1772. […] Ses excès en ce genre passent toute vraisemblance : il ne vit point le prétendant anglais, mais il le reçut dans ses États sans ombrage. […] XVII C’est peu de temps avant cette lettre d’Horace Mann qu’Alfieri arriva avec sa suite et quatorze chevaux anglais à Florence pour s’établir en Toscane.

243. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

« Peu de jours après, écrit-il, arrivèrent à Sienne mes quatorze chevaux anglais ; j’y avais laissé le quinzième, sous la garde de mon ami Gori : c’était mon beau cheval bai, mon Fido 2, le même qui dans Rome avait plusieurs fois reçu le doux fardeau de ma bien-aimée, et c’était assez pour me le rendre plus cher à lui seul que toute ma nouvelle troupe. […] Ma petite vanité eut alors de quoi se trouver satisfaite, car on distingua surtout mes beaux chevaux anglais qui l’emportaient en force, en beauté, sur tous ceux qu’on avait pu voir en pareille rencontre ; mais, au milieu d’une jouissance si puérile et si trompeuse, je vis, à mon grand désespoir, que dans cette Italie morte et corrompue il était plus facile de se faire remarquer par des chevaux que par des tragédies. […] « Avec tout cela, écrit-il, inébranlable dans ma conviction du beau et du vrai, j’aime mieux (et je saisis toutes les occasions de renouveler à cet égard ma profession de foi), j’aime beaucoup mieux encore écrire dans une langue presque morte et pour un peuple mort, et me voir enseveli moi-même de mon vivant, que d’écrire dans ces langues sourdes et muettes, le français ou l’anglais, quoique leurs armées et leurs canons les mettent à la mode ; plutôt mille fois des vers italiens, pour peu qu’ils soient bien tournés, même à la condition de les voir pour un temps ignorés, méprisés, non compris, que des vers français ou anglais, ou dans tout autre jargon en crédit, lors même que, lus aussitôt par tout le monde, ils pourraient m’attirer les applaudissements et l’admiration de tous. […] Nous avions pris la route de Calais, parce que la guerre n’ayant point encore éclaté entre la France et les Anglais, nous pensâmes qu’il serait plus facile de passer en Angleterre qu’en Flandre, où la guerre se poussait vivement. […] La princesse était restée fidèle à l’orthographe anglaise.

244. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Conclusions »

Milsand Esthétique anglaise, a expliqué à merveille comment la vérité ne peut être le but de l’art. […] Non seulement la sensibilité prédomine, mais elle n’est pas, comme chez le romancier anglais, aussi normale qu’intense. […] La poésie allemande nous attire moins que l’anglaise, plus violente, plus abrupte15 et donnant l’exemple de ce coloris puissant et heurté qui, depuis le romantisme, est le but de notre esthétique. […] Ses analyses de caractère sont mieux poussées que celles du romancier anglais chez lequel elles sont médiocres, ses peintures de milieux beaucoup plus exactes, ses descriptions, ses scènes plus renseignantes, sa composition mieux entendue. […] Ce fut une résolution littéraire tout autre qu’inaugura Rousseau aidé de romanciers anglais que continuèrent Chateaubriand, Mme de Staël, les romantiques.

245. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIe entretien. Boileau » pp. 241-326

Cette originalité a un peu été déteinte par la Bible dans Milton et par la latinité d’Horace dans Pope, l’Horace anglais. […] Il a imprégné le génie littéraire saxon anglais d’une sève septentrionale, sauvage, puissante, qu’elle ne peut plus perdre. […] On ne peut le définir, en politique comme en littérature, que par son nom : l’Anglais est un Anglais. […] que, si l’Indou est un théosophe, le Chinois un raisonneur, le Romain un politique, l’Espagnol un chevalier, l’Arabe un conteur, le Grec un artiste, le Portugais un aventurier héroïque, l’Allemand un philosophe, l’Anglais un patriote, l’Italien moderne un amant du beau, le Français, lui, est par excellence un homme d’esprit. […] Andromaque, Béatrice, Laure, l’épouse et les filles de l’Homère anglais, les héroïnes innomées de l’auteur de Lara, célèbres sous les noms de Médora ou de Gulnare, sont toutes des déifications de ce sexe outragé par Boileau.

246. (1923) Nouvelles études et autres figures

Beau principe qui jette un jour bizarre sur les familles des hobereaux anglais. […] La conduite du gouvernement anglais envers ce malheureux pays l’indignait sincèrement. […] » Shelley redevient de plus en plus Anglais. […] Il avait eu cinq enfants : la justice anglaise et la mort les lui avaient tous enlevés. […] La guerre le surprend inspecteur général : il demande à partir ; on l’envoie au Grand-Quartier anglais assurer les liaisons télégraphiques de l’armée anglaise avec le réseau français.

247. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LES JOURNAUX CHEZ LES ROMAINS PAR M. JOSEPH-VICTOR LE CLERC. » pp. 442-469

C’est ainsi depuis longtemps dans les plus petites comme dans les grandes choses : Dufreny, avant Wathely, avait déjà tenté le genre des jardins dits anglais, qu’on a repris ensuite de l’Angleterre, tout comme Beaufort ou Pouilly nous est revenu par Niebuhr, comme le rationalisme de Richard Simon nous revient par Strauss. […] Quand on aura feuilleté le Pour et Contre de l’abbé Prévost, et plus tard les journaux de Suard et de l’abbé Arnaud, on en tirera, sur l’introduction des littératures étrangères en France, sur l’influence croissante de la littérature anglaise particulièrement, des notions bien précises et graduées, que Voltaire, certes, résume avec éclat, mais qu’il faut chercher ailleurs dans leur diffusion. […] Cet Esprit des Journaux était une espèce de journal (disons-le sans injure) voleur et compilateur, qui prenait leurs bons articles aux divers journaux français, qui en traduisait à son tour des principaux journaux anglais et allemands, et qui en donnait aussi quelques-uns de son cru, de sa rédaction propre. […] Les poésies anglaises nous arrivaient en droite ligne ; les premiers poëmes de Crabbe étaient à l’instant analysés, traduits.

248. (1890) L’avenir de la science « II »

L’esprit que j’attaque ici est celui de la science anglaise si peu élevée, si peu philosophique. Je ne sais si aucun Anglais, Byron peut-être excepté, a compris d’une façon bien profonde la philosophie des choses. Régler sa vie conformément à la raison, éviter l’erreur, ne point s’engager dans des entreprises inexécutables, se procurer une existence douce et assurée, reconnaître la simplicité des lois de l’univers et arriver à quelques vues de théologie naturelle, voilà pour les Anglais qui pensent le but souverain de la science. […] L’Anglais pauvre n’en veut à personne, s’il meurt de faim : c’est la fatalité.

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