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20. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXIV » pp. 294-298

Oui, j’aime dire hautement devant vous, messieurs, combien, depuis quinze ans que je m’entretiens avec eux, nos jeunes étudiants m’ont rendu facile et doux l’accomplissement des devoirs du professorat, combien ils m’ont fait chérir ces causeries familières qui parfois aussi pourtant ont leurs difficultés ; car j’y dois critiquer quelquefois ceux que je voudrais toujours admirer 51. […] Dans nos écoles, messieurs, nous croyons à la gloire littéraire du xixe  siècle, et nous en sommes fiers, nous admirons beaucoup et nous espérons beaucoup, mais nous faisons en sorte d’élever l’admiration par la critique et de féconder l’espérance par l’étude. » M. […] Ici, dit-on, un geste de l’orateur avait indiqué celui qu’il aurait voulu toujours admirer.

21. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quinzième. »

Un usage conservé de l’hôtel de Rambouillet l’entretint dans ce tour d’esprit, même après qu’elle eut admiré dans les écrits de Port Royal un style proportionné aux choses. […] Un autre avantage de Bossuet sur Saint-Simon, c’est que Bossuet sait admirer et que Saint-Simon l’ignore. […] Aucun homme plus grand n’a pourtant trouvé plus à admirer. […] Saint-Simon nie ou critique ; il n’admire pas. […] Ne cherchons donc pas ce qui manque à la langue de Saint-Simon ; admirons-y plutôt cette justesse rapide, ces grands traits non tâtés, ces mâles appas que Molière admire dans la fresque.

22. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre premier »

Où Perrault ne voit qu’un brutal, Boileau n’admirait qu’un type de la colère. […] Il met au même rang les médiocres et les excellents, et il n’admire pas les excellents par les bonnes raisons. […] Ce n’est là qu’une sorte de mérite ; il en est un autre plus rare, qui consiste à admirer les beautés partout où elles sont. […] Jeune, il se moquait de l’admiration ; vieux, il n’empêche pas qu’on admire, et par moment, il nous y aide. […] Mais ces ouvrages sont de ceux qu’on goûte et qu’on n’admire pas.

23. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XII » pp. 47-52

Ponsard en le félicitant de Lucréce : « Vous avez beaucoup lu Corneille : eh bien, croyez-moi, fermez Corneille maintenant et ouvrez Racine. » Madame Sand admire un peu malgré Leroux, qui ne trouve pas sans doute Lucrèce assez avancée : mais elle admire. […] 2° Le gros du monde, même des gens d’esprit, est dupe des genres : il admire à outrance, dans un genre noble et d’avance autorisé, des qualités d’art et de talent souvent moindres que celles qu’il laissera passer inaperçues dans des genres moyens non titrés.

24. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Légendes françaises. Rabelais par M. Eugène Noël. (1850.) » pp. 1-18

Un cercle nombreux m’environne et contemple de toutes parts en moi, et admire, en l’écoutant, les merveilles de l’organisation humaine. […] Ce plan d’éducation que j’admire chez Rabelais, chez Montaigne, chez Charron et chez quelques-uns de leurs successeurs, avait une grande opportunité quand il s’agissait d’émanciper la jeunesse, de l’affranchir des méthodes serviles et accablantes, et de ramener les esprits aux voies naturelles. […] Nul auteur n’a été plus admiré que Rabelais, mais il l’a été de deux manières et comme par deux races, très distinctes d’esprit et de procédé. Les uns l’admirent encore moins qu’ils ne le goûtent ; ils le lisent, le comprennent là où ils peuvent, et se consolent de ce qu’ils n’entendent pas, avec les portions exquises qu’ils en tirent comme la moelle de l’os, et qu’ils savourent. […] Il y a une autre manière d’admirer Rabelais, c’est de vouloir en faire un homme de son parti, de son bord, de le tirer à soi, de le montrer, comme Ginguené l’a fait dans une brochure, un des précurseurs et des apôtres de la Révolution de 89 et de celles qui suivront.

25. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — À mon ami M. Grimm » p. 89

Je suis heureux quand j’admire. Je ne demandais pas mieux que d’être heureux et d’admirer

26. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

Il s’étonnait du soin, selon lui excessif, qu’on prenait à décrire si longuement leurs mœurs, et surtout à faire admirer leur industrie : « Car enfin, disait-il, une mouche ne doit pas tenir dans la tête d’un naturaliste plus de place qu’elle n’en tient dans la nature. » Il semble que Buffon, se tenant au point de vue de l’homme et placé entre les deux infinis, celui de l’infinie grandeur et celui de l’infinie petitesse, n’ait été sensible qu’au premier. […] En tout, ceci il y a quelque chose qui m’inquiète : en parlant si vivement de la découverte qu’on a faite il y a seize ans d’un Buffon supérieur à celui qu’on avait admiré jusqu’ici, ne va-t-on pas lui prêter un peu, et dans quel but ? […] Voilà Buffon singulièrement admiré. […] Admirons Buffon, ne l’inventons pas, je vous prie. […] On devrait toujours se demander, quand on admire si fort un génie du passé : « Qu’aurait-il dit de cette manière d’être admiré12 ? 

27. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre troisième »

Quoique ce ne fût que l’apparence de l’art, l’admiration pour cette apparence était féconde ; elle préparait les esprits à admirer l’art lui-même. […] Au reste, avant de regretter ce qui a manqué à Corneille, donnons-nous le plaisir d’admirer tout ce qu’il a créé. […] Il se jugeait lui-même comme il eût fait d’un autre ; aimant ses qualités jusqu’à les admirer, comme s’il n’y avait eu aucun mérite ; critiquant ses défauts sans les grossir par fausse modestie, ni les atténuer par vanité. […] On a admiré l’esprit que déploie Corneille pour varier par les détails une situation qui est toute la pièce. […] Aussi, dans le théâtre antique, où tant de choses touchent le cœur et contentent la raison, où il y a tant à admirer, rien n’étonne.

28. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lamartine, Alphonse de (1790-1869) »

Aussi je ne vous admire pas seulement du fond de l’âme, mais du fond du cœur. Car lorsqu’on chante comme vous savez chanter, produire c’est charmer, et lorsqu’on écoute comme je sais écouter, admirer c’est aimer. […] Pas complètement, sans doute : le moment arrive toujours, même pour les poètes les plus admirés, où la réflexion reprend ses droits. […] Si le poète est incapable d’éteindre le Réel, il est aussi affranchi de sa servitude, et le monde du Rêve infini s’ouvre devant son essor… Aujourd’hui que ces poèmes ont perdu, avec leur magie de nouveauté, le prestige que leur assurait une harmonie profonde entre les aspirations du public et les inspirations de l’auteur, il est malaisé de ranger cette œuvre, tour à tour trop admirée et trop négligée, à sa place définitive. […] Gustave Larroumet À cette heure, nous sommes fatigués des spectacles, nous avons admiré et analysé trop de tours d’adresse et de force : nous demandons des gestes sans étude, des attitudes simples ; nous voulons voir un homme marchant sa marche naturelle.

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